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QUE CHERCHEZ-VOUS ?

Enfants Valises

16 Septembre 2013, 08:32am

Publié par Fr Greg.

Le documentariste Xavier de Lauzanne a filmé le quotidien d’une classe de jeunes venus en France via le regroupement familial : un bijou, en salles depuis mercredi.

 

MAKING OF

Ce film a pour titre mystérieux « Enfants valises », c’est-à-dire des jeunes arrivés en France dans le cadre du regroupement familial, et qui doivent s’initier, à l’âge compliqué de l’adolescence, à un nouveau cadre scolaire, de nouveaux codes, de nouveaux rapports familiaux, bref, se réinventer totalement.

L’Education nationale a créé des structures pour ces quelque 40 000 jeunes par an, venus de pays francophones ou pas, légalement ou pas (l’école de la République a pour obligation d’accueillir tous les jeunes de moins de 16 ans) qui passent par un « sas » avant de rejoindre le tronc commun de l’Education nationale. Ici une classe Français langue écrite renforcée (Fler).

Un an dans une classe de région parisienne

Xavier de Lauzanne a posé sa caméra pendant un an dans une de ces classes d’accueil en région parisienne, et nous fait vivre les joies et les peines, les douleurs et les espoirs, les drames aussi, de ce groupe d’adolescents qui n’aspirent qu’à une chose : une vie « normale ». Ce qui n’est pas simple.

Il l’a fait sans jugement, sans « problématiser », sans enjoliver ou noircir une situation complexe, humainement et socialement. Son ambition, explique-t-il, est d’abord de montrer des individus confrontés à l’exil, parfois la séparation de proches les ayant élevés.

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Mardi soir, j’animais un débat dans une salle parisienne pour la première du film dont Rue89 est partenaire. Plusieurs riverains du site étaient présents.

L’enseignante, premier visage de la France

Mais surtout, cette soirée a réuni pour la première fois depuis le tournage, qui remonte déjà à cinq ans, une partie des élèves et leur enseignante, Julie L.

Les enfants du film sont devenus de jeunes adultes, et ils n’ont qu’un mot à la bouche : « Merci. » Merci d’abord et surtout à leur enseignante qui a été le premier visage de la France pour eux, le visage d’une France qui donne sa chance à des jeunes comme eux, chargés de tant de handicaps.

On les comprend : on la voit dans le documentaire d’un dévouement exceptionnel à la cause de l’intégration de ces enfants venus d’ailleurs, au point de passer des heures, chez elle, à téléphoner pour leur trouver des stages chez des artisans du coin...

Quarante mille enfants, ce n’est pas rien, et, à écouter l’enseignante, on peut s’inquiéter de la pérennité de ce système d’accueil et de la tendance croissante à placer ces enfants d’entrée de jeu dans les classes générales.

La « peur » des autres

En réponse à une question sur leurs rapports avec les autres élèves de l’établissement, un des jeunes présents au débat a expliqué qu’au début, ils avaient « peur » – c’est son mot – de ne pas avoir les codes, le vocabulaire, d’être « différents ». Ce passage par la classe de Julie les a aidés à prendre confiance en eux avant de se confronter à la société française.

Ce film a été réalisé avec trois bouts de ficelle, par la force d’un documentariste qui a déjà consacré plusieurs films à l’enfance et à l’éducation, et à la détermination d’une minuscule équipe.

Et il est distribué dans quelques salles, d’où il disparaîtra très vite sauf bouche à oreille rapide et massif qui, seul, lui donnera la visibilité qu’il mérite dans un système déterminé par les chiffres.

Et la télé publique ?

C’est là que la télévision et l’Education nationale ne jouent pas leur rôle. Aucune chaîne de télé n’a voulu acheter ce documentaire, en particulier aucune chaîne publique dont on aimerait penser qu’elles auraient à cœur de montrer une tranche de vie de notre société, émouvante, stimulante.

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Quant à l’Education nationale, elle devrait elle aussi s’emparer de ce film et le montrer à tous, élèves, enseignants, parents d’élèves. Il est au carrefour de plusieurs problématiques importantes de notre société, montre le rôle crucial de l’éducation et les moyens nécessaires pour faire face à un défi humain, social et nécessairement politique.

Cet appel ne sera sans doute pas entendu par les institutions. Reste l’initiative individuelle, celle d’enseignants ou d’associations qui peuvent faire vivre un film... 

 

 Pierre Haski

http://www.rue89.com/rue89-culture/2013/09/12/les-enfants-valises-disent-merci-a-lecole-republique-245640

 

 

 

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La joie: cohérence de vie et relations d'amitiés

14 Septembre 2013, 08:42am

Publié par Fr Greg.

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Rencontre du pape François avec les novices et les séminaristes du monde

Je demandais à Mgr Fisichella si vous comprenez l’italien et il m’a dit que vous aviez tous la traduction… Je suis un peu plus rassuré.

Je remercie Mgr Fisichella pour ses paroles, et je le remercie aussi pour son travail : il a beaucoup travaillé, non seulement pour cela, mais pour tout ce qu’il a fait et fera en cette Année de la foi. Merci beaucoup! Mais Mgr Fisichella a dit quelque chose, et je ne sais pas si c’est vrai, mais je le reprends: il a dit que vous aviez tous le désir de donner votre vie pour toujours au Christ! À présent, vous applaudissez, vous faites la fête, parce que c’est le temps des noces… Mais quand la lune de miel est terminée, que se passe-t-il? J’ai entendu un séminariste, un bon séminariste, qui disait qu’il voulait servir le Christ, mais pendant dix ans, et ensuite, il pensera à commencer une autre vie… Cela est dangereux! Mais écoutez bien: nous tous, même nous qui sommes plus âgés, nous aussi, nous sommes soumis à la pression de cette culture du provisoire et c’est dangereux parce qu’on ne joue pas sa vie une fois pour toutes. Je me marie tant que dure l’amour ; je deviens religieuse, mais pour «un petit bout de temps», «quelque temps» et ensuite on verra ; je deviens séminariste pour devenir prêtre, mais je ne sais pas comment finira cette histoire. Cela n’est pas possible avec Jésus! Je ne vous fais pas de reproches à vous, je fais des reproches à cette culture du provisoire qui nous maltraite tous, parce qu’elle n’est pas bonne pour nous, parce que, aujourd’hui, il est très difficile de faire un choix définitif. À mon époque, c’était plus facile parce que la culture favorisait les choix définitifs, que ce soit pour la vie matrimoniale, la vie consacrée ou la vie sacerdotale. Mais à notre époque, ce n’est pas facile de faire un choix définitif. Nous sommes victimes de cette culture du provisoire. Je voudrais que vous réfléchissiez à cela: comment puis-je être libre, comment puis-je être libre par rapport à cette culture du provisoire ? Nous devons apprendre à fermer la porte de notre cellule intérieure, de l’intérieur.

Quand je suis rentré, j’ai regardé ce que j’avais écrit. Je voulais vous dire un mot et ce mot, c’est la joie. Partout où il y a les consacrés, les séminaristes, les religieuses et les religieux, il y a de la joie, il y a toujours de la joie ! C’est la joie de la fraîcheur, c’est la joie de suivre Jésus, la joie que nous donne le Saint-Esprit, pas la joie du monde. Il y a de la joie ! Mais où naît la joie ? Elle naît… Samedi soir je rentre à la maison et j’irai danser avec mes vieux amis ? C’est de là que naît la joie ? Pour un séminariste, par exemple ? Non ? Ou oui ?

Certains diront : la joie naît des choses que l’on possède et alors, nous voilà à la recherche du dernier modèle de smartphone, du scooter le plus rapide, de la voiture qui se fera remarquer… Mais je vous le dis, vraiment, cela me fait mal quand je vois un prêtre ou une religieuse avec le dernier modèle d’une voiture : mais ce n’est pas possible ! Ce n’est pas possible ! Alors vous pensez : mais maintenant, Père, il faut que nous nous déplacions en bicyclette ? C’est bien la bicyclette ! Mgr Alfred circule en bicyclette ; lui, il va à vélo. Je pense que la voiture est nécessaire, parce qu’il faut beaucoup travailler et pour se déplacer là-bas… mais prenez-en une plus humble ! Et si tu aimes cette belle voiture, pense à tous les enfants qui meurent de faim. Rien que cela ! La joie ne naît pas, ne vient pas de ce que l’on possède ! D’autres disent que cela vient des expériences les plus extrêmes pour éprouver le frisson des sensations fortes : la jeunesse aime être sur le fil du rasoir, elle aime vraiment cela ! Pour d’autres encore, cela vient des vêtements les plus à la mode, des distractions dans les lieux les plus à la mode — mais je ne veux pas dire par là que les sœurs vont dans ces lieux, je parle des jeunes en général. Pour d’autres encore, la joie vient du succès auprès des filles ou des garçons, en passant même de l’une à l’autre ou de l’un à l’autre. Ça, c’est l’insécurité de l’amour, qui n’est pas sûr : c’est l’amour « à l’essai ». Et on pourrait continuer… Vous aussi, vous êtes au contact de cette réalité que vous ne pouvez pas ignorer.

Nous savons que tout ceci peut satisfaire certains désirs, créer quelques émotions, mais à la fin, c’est une joie qui demeure superficielle, qui ne descend pas dans l’intime, ce n’est pas une joie intime : c’est l’ivresse d’un moment qui ne rend pas vraiment heureux. La joie n’est pas l’ivresse d’un moment : c’est autre chose!

La vraie joie ne vient pas des choses, du fait d’avoir, non ! Elle naît de la rencontre, de la relation avec les autres, elle naît du fait de se sentir acceptés, compris, aimés, du fait d’accepter, de comprendre et d’aimer, et ceci non pas en raison de l’intérêt d’un moment, mais parce que l’autre, homme, femme, est une personne. La joie naît de la gratuité d’une rencontre ! C’est s’entendre dire : « Tu es important pour moi », pas nécessairement avec des paroles. C’est beau… Et c’est précisément cela que Dieu nous fait comprendre. En vous appelant, Dieu vous dit : « Tu es important pour moi, je t’aime, je compte sur toi ». Jésus dit ceci à chacun de nous ! C’est de là que naît la joie ! La joie du moment où Jésus m’a regardé. Comprendre et sentir cela est le secret de notre joie. Se sentir aimé de Dieu, sentir que pour lui nous ne sommes pas des numéros, mais des personnes, et sentir que c’est Lui qui nous appelle. Devenir prêtre, religieux, religieuse n’est pas d’abord notre choix. Je n’ai pas confiance en ce séminariste, cette novice, qui dit : « J’ai choisi cette voie ». Cela ne me plaît pas ! Cela ne va pas ! Mais c’est la réponse à un appel et à un appel d’amour. Je sens quelque chose à l’intérieur, qui me trouble, et je réponds oui. Dans la prière, le Seigneur nous fait sentir cet amour, mais aussi à travers tant de signes que nous pouvons lire dans notre vie, toutes les personnes qu’il met sur notre chemin. Et la joie de la rencontre avec lui et de son appel pousse à ne pas se renfermer, mais à s’ouvrir. Elle nous conduit au service dans l’Église. Saint Thomas disait : bonum est diffusivum sui— ce n’est pas du latin trop difficile ! — le bien se diffuse. Et la joie aussi se diffuse. N’ayez pas peur de montrer votre joie d’avoir répondu à l’appel du Seigneur, à son choix d’amour, et de témoigner de son Evangile dans le service de l’Église. Et la joie, la vraie, est contagieuse, elle contamine… elle fait avancer. En revanche, lorsque l’on se trouve avec un séminariste trop sérieux, trop triste, ou avec une novice comme ça, on pense : mais il y a quelque chose qui ne va pas ! Il manque la joie du Seigneur, la joie qui te pousse au service, la joie de la rencontre avec Jésus, qui te conduit à la rencontre des autres pour annoncer Jésus. Il manque cela ! Il n’y a pas de sainteté dans la tristesse, il n’y en a pas ! Sainte Thérèse — il y a beaucoup d’Espagnols ici et ils la connaissent bien — disait : « Un saint triste est un triste saint ! ». C’est peu de chose… Quand on rencontre un séminariste, un prêtre, une sœur, une novice, qui tire une tête longue, triste, qui donne l’impression qu’on a jeté sur sa vie une couverture bien trempée, de ces couvertures bien lourdes... qui tirent vers le bas… Il y a quelque chose qui ne va pas ! Alors s’il vous plaît : jamais de sœurs, jamais de prêtres avec une tête de « piment au vinaigre », jamais ! La joie qui vient de Jésus. Pensez à cela: quand un prêtre — je dis un prêtre, mais ça pourrait aussi être un séminariste — quand un prêtre, une sœur, n’a pas de joie, qu’il ou elle est triste, vous pouvez penser : « Mais c’est un problème psychologique». C’est vrai : c’est possible, c’est possible, bien sûr. Cela peut arriver, certains, les pauvres, tombent malades… Cela peut arriver. Mais en général, ce n’est pas un problème psychologique. C’est un problème d’insatisfaction ? Eh oui ! Mais où est le cœur de cette absence de joie ? C’est un problème de célibat. Je vous explique. Vous autres, séminaristes, sœurs, vous consacrez votre amour à Jésus, un grand amour. Notre cœur est pour Jésus et cela nous pousse à faire le vœu de chasteté, le vœu de célibat. Mais le vœu de chasteté, le vœu de célibat ne se termine pas au moment du vœu, il continue… Un chemin qui mûrit, mûrit, mûrit jusqu’à la paternité pastorale, jusqu’à la maternité pastorale, et quand un prêtre n’est pas père de sa communauté, quand une sœur n’est pas mère de tous ceux avec lesquels elle travaille, ils deviennent tristes. Voilà le problème. C’est pourquoi je vous le dis : la racine de la tristesse dans la vie pastorale réside précisément dans l’absence de paternité et de maternité qui vient de ce que l’on vit mal cette consécration, qui doit au contraire nous amener à la fécondité. On ne peut pas imaginer un prêtre ou une sœur qui ne soient pas féconds : ce n’est pas catholique ! Ce n’est pas catholique ! C’est cela la beauté de la consécration, c’est la joie, la joie…

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Mais je ne voudrais pas faire rougir cette sainte sœur [il s’adresse à une sœur âgée au premier rang] qui était devant, contre la barrière, la pauvre, elle était vraiment étouffée, mais elle avait un visage heureux. Cela m’a fait du bien de regarder votre visage, ma sœur ! Vous avez peut-être de longues années de vie consacrée, mais vous avez de beaux yeux, je vous voyais sourire sans vous plaindre d’être écrasée… Quand vous trouvez des exemples comme ceux-ci, tant et tant de sœurs, tant de prêtres qui sont joyeux, c’est parce qu’ils sont féconds, ils donnent la vie, la vie, la vie… Cette vie, ils la donnent parce qu’ils la trouvent en Jésus ! Dans la joie de Jésus ! La joie, pas de tristesse, la fécondité pastorale.

Pour être des témoins joyeux de l’Évangile, il faut être authentiques, cohérents. Et voilà un autre mot dont je voulais vous parler : l’authenticité. Jésus se battait beaucoup contre les hypocrites : hypocrites, ceux qui pensent tout bas, ceux qui ont — pour dire les choses clairement — un double visage. Parler d’authenticité aux jeunes n’est pas compliqué parce que les jeunes, tous, ont cette envie d’être authentiques, d’être cohérents. Et cela vous dégoûte tous, quand vous trouvez parmi nous des prêtres qui ne sont pas authentiques ou des sœurs qui ne sont pas authentiques !

C’est une responsabilité avant tout des adultes, des formateurs. De vous, les formateurs qui êtes ici : donner un exemple de cohérence aux plus jeunes. Nous voulons des jeunes cohérents ? Soyons cohérents nous-mêmes ! Sinon, le Seigneur nous dira ce qu’il disait des pharisiens au peuple de Dieu : « Faites ce qu’ils disent, mais pas ce qu’ils font ! ». Cohérence et authenticité !

Mais vous aussi, à votre tour, cherchez à suivre cette route. Je dis toujours ce qu’affirmait saint François d’Assise : Le Christ nous a envoyés annoncer l’Évangile également par la parole. La phrase est celle-ci : « Annoncez toujours l’Évangile. Et, si nécessaire, par la parole ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Annoncer l’Évangile à travers l’authenticité de vie, la cohérence de vie. Mais dans ce monde auquel la richesse fait tant de mal, il est nécessaire que nous, prêtres, que nous, sœurs, que nous tous, soyons cohérents avec notre pauvreté ! Mais quand on se rend compte que le premier intérêt d’une institution éducative ou paroissiale ou de n’importe quelle autre institution, est l’argent, cela ne fait pas de bien. Cela ne fait pas de bien ! C’est une incohérence ! Nous devons être cohérents, authentiques. Sur ce chemin, faisons ce que dit saint François: prêchons l’Évangile par l’exemple, et ensuite par la parole ! Mais c’est avant tout dans notre vie que les autres doivent pouvoir lire l’Évangile ! Là aussi sans crainte, avec nos défauts que nous cherchons à corriger, avec nos limites que le Seigneur connaît, mais aussi avec notre générosité à le laisser agir en nous. Les défauts, les limites et — j’ajouterais aussi — avec les péchés… Je voudrais savoir quelque chose : ici, dans cette salle, y a-t-il quelqu’un qui ne soit pas pécheur, qui n’ait pas de péchés ? Qu’il lève la main ! Qu’il lève la main ! Personne. Personne. D’ici jusqu’au fond… tous ! Mais comment est-ce que je porte mon péché, mes péchés ? Je voudrais vous donner un conseil : soyez transparents avec votre confesseur. Toujours. Dites tout, n’ayez pas peur. « Père, j’ai péché ». Pensez à la Samaritaine qui, pour prouver, pour dire à ses concitoyens qu’elle avait trouvé le Messie, a dit : « Il m’a dit tout ce que j’ai fait », et ils connaissaient tous la vie de cette femme. Toujours dire la vérité à son confesseur. Cette transparence fera du bien, parce qu’elle nous rend humbles, tous. « Mais Père, je suis resté là-dedans, j’ai fait ceci, j’ai détesté »… peu importe de quoi il s’agit. Dire la vérité, sans cacher, sans demi-mots, parce que l’on parle avec Jésus dans la personne du confesseur. Et Jésus sait la vérité. Lui seul te pardonne toujours ! Mais le Seigneur veut seulement que tu lui dises ce qu’il sait déjà. La transparence ! C’est triste quand on trouve un séminariste, une sœur qui se confesse aujourd’hui avec quelqu’un pour effacer la tache et, demain, il ou elle va en voir un autre, et un autre, et encore un autre : une peregrinatio d’un confesseur à l’autre pour se cacher sa vérité. La transparence ! C’est Jésus qui t’écoute. Ayez toujours cette transparence devant Jésus présent dans le confesseur ! Mais c’est une grâce. Père, j’ai péché, j’ai fait ceci, ceci, cela… avec tous les mots. Et le Seigneur te serre dans ses bras, il t’embrasse ! Va, et ne pèche plus ! Et si tu reviens ? Encore une fois. Je dis cela par expérience. J’ai croisé tant de personnes consacrées qui tombent dans ce piège hypocrite du manque de transparence. « J’ai fait ceci », humblement. Comme le publicain qui se trouvait au fond du temple : « J’ai fait ceci, j’ai fait ceci… ». Et le Seigneur te fait taire : c’est lui qui te fait taire ! Ce n’est pas à toi de le faire ! Vous avez compris ? De notre péché, surabonde la grâce ! Ouvrez la porte à la grâce, avec cette transparence !

Les saints et les maîtres de vie spirituelle nous disent que pour nous aider à faire croître notre vie en authenticité, la pratique quotidienne de l’examen de conscience est très utile, et même indispensable. Que se passe-t-il dans mon âme ? De cette façon, ouvert, avec le Seigneur, puis avec le confesseur, avec le père spirituel. Cela est si important !

Combien de temps avons-nous encore, Mgr Fisichella ?

[Mgr Fisichella : Si vous parlez comme cela, nous, nous sommes là jusqu’à demain, sans problème !]

Il dit jusqu’à demain… Qu’il vous apporte au moins un sandwich et un Coca Cola, si on est là jusqu’à demain…

La cohérence est fondamentale pour que notre témoignage soit crédible. Mais cela ne suffit pas, il faut aussi une préparation culturelle, je souligne, une préparation culturelle, pour donner raison de notre foi et de notre espérance. Le contexte dans lequel nous vivons nous invite constamment à « donner raison » et c’est une bonne chose, parce que cela nous aide à ne rien considérer comme acquis. Aujourd’hui, nous ne pouvons rien considérer comme acquis ! Cette civilisation, cette culture… nous ne pouvons pas. Mais il est certain que c’est également exigeant, cela demande une bonne formation, équilibrée, qui unisse toutes les dimensions de la vie, humaine, spirituelle, la dimension intellectuelle avec la dimension pastorale. Dans votre formation, il y a quatre piliers fondamentaux : la formation spirituelle, c’est-à-dire la vie spirituelle ; la vie intellectuelle, ces études afin de « donner raison » ; la vie apostolique, commencer à aller annoncer l’Évangile ; et quatrièmement, la vie communautaire. Quatre. Et pour cette dernière, il est nécessaire que la formation se fasse en communauté au noviciat, au prieuré, dans les séminaires… Je pense toujours à cela : le pire des séminaires est mieux que pas de séminaire ! Pourquoi ? Parce que cette vie communautaire est nécessaire. Souvenez-vous des quatre piliers : vie spirituelle, vie intellectuelle, vie apostolique et vie communautaire. Il y en a quatre. C’est sur ces quatre piliers que vous devez édifier votre vocation.

Et je voudrais ici souligner l’importance, dans cette vie communautaire, des relations d’amitié et de fraternité qui font partie intégrante de cette formation. Nous abordons un autre problème ici. Pourquoi est-ce que je dis cela : les relations d’amitié et de fraternité. Très souvent, j’ai trouvé des communautés, des séminaristes, des religieux ou des communautés diocésaines où les conversations les plus communes sont les « commérages » ! C’est terrible ! Ils « se font la peau » entre eux… Et ça, c’est notre monde clérical, religieux… Excusez-moi, mais c’est courant : jalousies, envies, mal parler de l’autre. Pas seulement mal parler des supérieurs, ça, c’est un classique ! Mais je veux vous dire que c’est si fréquent, si fréquent. Moi aussi, je suis tombé dedans. Je l’ai fait si souvent, si souvent ! Et j’ai honte ! J’en ai honte ! Ce n’est pas bien de faire cela : aller commérer. « Tu as entendu… Tu as entendu… ». Mais c’est l’enfer, cette communauté ! Cela ne fait pas du bien. Et c’est pour cela que la relation d’amitié et de fraternité est importante. Les amis sont peu nombreux. La Bible dit ceci : les amis, un, deux… Mais la fraternité, entre tous. Si j’ai un problème avec une sœur ou un frère, je le lui dis en face, ou je le dis à la personne qui peut aider, mais je ne le dis pas aux autres pour « le salir ». Et les commérages, c’est terrible ! Derrière les commérages, sous les commérages, il y a les envies, les jalousies, les ambitions. Pensez-y. Une fois, j’ai entendu parler d’une personne qui, après les exercices spirituels — une personne consacrée, une sœur… Ça, c’est bien ! Cette sœur avait promis au Seigneur de ne jamais dire du mal d’une autre. Ça, c’est un beau chemin, un beau chemin vers la sainteté ! Ne jamais dire du mal des autres. « Mais, Père, il y a des problèmes… ». Dis-le au supérieur, dis-le à la supérieure, dis-le à l’évêque, qui peut trouver une solution. Ne le dis pas à celui qui ne peut pas aider. C’est important : la fraternité ! Mais dis-moi, dirais-tu du mal de ta mère, de ton père, de tes frères ? Jamais. Alors pourquoi le fais-tu dans la vie consacrée, au séminaire, dans la vie entre prêtres ? Uniquement cela : réfléchissez, réfléchissez… La fraternité ! Cet amour fraternel.

Mais il y a deux extrêmes : dans cet aspect de l’amitié et de la fraternité, il y a deux extrêmes : aussi bien l’isolement que la dissipation. Une amitié et une fraternité qui m’aident à ne tomber ni dans l’isolement, ni dans la dissipation. Cultivez les amitiés, elles sont un bien précieux : mais elles doivent vous éduquer non pas à la fermeture, mais à sortir de vous-mêmes. Un prêtre, un religieux, une religieuse ne peut jamais être une île, mais une personne toujours disponible à la rencontre. Les amitiés s’enrichissent ensuite des divers charismes de vos familles religieuses. C’est une grande richesse. Pensons aux belles amitiés de tant de saints.

Je crois que je dois couper un peu, parce que vous êtes très patients !

[Les séminaristes : « Non ! ! ! »]

Je voudrais vous dire ceci : sortez de vous-mêmes pour annoncer l’Évangile, mais pour faire cela, vous devez sortir de vous-mêmes pour rencontrer Jésus. Il y a deux sorties : l’une vers la rencontre de Jésus, vers la transcendance, l’autre vers les autres pour annoncer Jésus. Elles vont ensemble. Si l’on n’en prend qu’une, cela ne va pas ! Je pense à Mère Teresa de Calcutta. Elle était courageuse, cette sœur… Elle n’avait peur de rien, elle allait dans les rues… Mais cette femme n’avait pas peur non plus de s’agenouiller, pendant deux heures, devant le Seigneur. N’ayez pas peur de sortir de vous-mêmes dans la prière et dans l’action pastorale. Ayez le courage de prier et d’aller annoncer l’Évangile.

Je voudrais une Église plus missionnaire, moins tranquille. Cette belle Église qui va de l’avant. Ces jours-ci, de nombreux missionnaires sont venus à la Messe du matin, ici à Sainte-Marthe, et quand ils me saluaient, ils me disaient : « Je suis une sœur âgée, il y a quarante ans que je suis au Tchad, que je suis ici, que je suis là… ». Comme c’est beau ! Mais on comprenait que cette sœur avait passé ces années de cette façon parce qu’elle n’avait jamais cessé de rencontrer Jésus dans la prière. Sortir de soi, vers la transcendance à Jésus dans la prière, vers la transcendance aux autres, dans l’apostolat, dans le travail. Apportez votre contribution à une telle Église : fidèle à la route que veut Jésus. N’apprenez pas de nous, de nous qui ne sommes plus très jeunes, n’apprenez pas de nous ce sport que nous, les vieux, nous avons souvent pratiqué : le sport des lamentations ! N’apprenez pas de nous le culte de la « déesse lamentation ». C’est une déesse, celle-là... toujours en train de se plaindre… Mais soyez positifs, cultivez la vie spirituelle et, en même temps, allez, soyez capables de rencontrer les personnes, surtout celles qui sont le plus méprisées et désavantagées. N’ayez pas peur de sortir et d’aller à contre-courant. Soyez des contemplatifs et des missionnaires. Gardez toujours la Vierge Marie avec vous, priez le chapelet, s’il vous plaît… ne l’abandonnez pas ! Gardez toujours la Vierge avec vous, chez vous, comme le faisait l’apôtre Jean. Qu’elle vous accompagne et vous protège toujours. Et priez aussi pour moi, parce que moi aussi j’ai besoin de prières, parce que je suis un pauvre pécheur, mais allons de l’avant.

Merci beaucoup. Nous nous reverrons demain. Avancez, dans la joie, la cohérence, toujours avec le courage de dire la vérité, le courage de sortir de soi pour rencontrer Jésus dans la prière et de sortir de soi pour rencontrer les autres et leur donner l’Évangile. Avec la fécondité pastorale ! S’il vous plaît, ne soyez pas des « vieilles filles » et des « vieux garçons ». Allez de l’avant !

François, Pape, 6 juillet 2013.

 

 

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La misère abruti-t-elle ?

13 Septembre 2013, 13:21pm

Publié par Fr Greg.

 

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Il est des ouvrages qui marquent notre temps. Dans un livre paru récemment (Scarcity. Why having too little means so much ? Times Books, 2013), l’économiste d’Harvard Sendhil Mullainathan et le psychologue de Princeton Eldar Sharif constatent que si la pauvreté conduit à des comportements irrationnels, ce ne sont en fait pas ces choix hasardeux qui conduisent à la précarité mais que, bien au contraire, c’est cette précarité qui affecte les comportements et conduit aux mauvais choix. Une théorie intéressante, certainement à contre-courant des idées reçues du plus grand nombre, où le contexte modifie le comportement… A l’aide de nombreux exemples les auteurs démontrent ainsi que l’état "de manque" conduit à une vision limitée à très court terme et hypothèque l’avenir, se traduisant par une forme de focalisation sur les besoins immédiats et négligeant le contexte environnemental, et qu’en fait la pauvreté crée une mentalité qui perpétue la pauvreté… De façon particulièrement intéressante, cet état d’esprit n’est pas lié strictement au manque d’argent, où les situations humainement les plus dramatiques sont évidentes, mais se retrouve parfaitement transposable selon les auteurs dans d’autres situations ; tel le manque de temps chronique lié à une hyperactivité professionnelle ou encore lorsque les personnes sont seules et souffrent d’un déficit de contacts sociaux. Dans chaque cas se développe une sorte de cercle vicieux, qui fait que la situation ne peut qu’empirer : le manque d’argent amène à solliciter toujours plus de crédits de façon irrationnelle et à hypothéquer sa santé en sacrifiant par exemple l’accès aux traitements voire simplement à ne plus se nourrir correctement, le surbooking affecte clairement les décisions à prendre et conduit à des choix qui imposent encore plus de travail et les personnes isolées se complaisent dans leur situation en auto-centrant leurs préoccupations, ce qui renforce encore leur isolement. Les études réalisées par les auteurs amènent à constater que ce type de situation altère les capacités de jugement de façon permanente et dramatique, à peu près comme c’est le cas après une nuit blanche et une forte dette de sommeil… Pour le neurobiologiste un tel constat n’est pas sans rappeler la dépendance aux drogues d’abus… L’analogie est dès lors intéressante en ce sens que la dépendance présente de nombreuses similarités avec les situations décrites par les auteurs. De fait, le toxicomane adopte rapidement un comportement centré sur la recherche de sa substance d’addiction et néglige pour cela les contingences les plus élémentaires, conduisant aussi à des comportements irrationnels que chacun a constatés ; par exemple prendre sa voiture en pleine nuit pour aller s’enquérir du lieu où il pourra se fournir en cigarettes ou en alcool et pallier ainsi le manque, pour ne prendre que des situations très banales… Et le comportement renforce l’addiction. On peut même aller plus loin en considérant aussi que, dans une certaine mesure, le manque peut aussi avoir des effets positifs sur le comportement… à la condition qu’il soit limité et parfaitement temporaire. Ainsi une cigarette peut-elle permettre une meilleure concentration et une gêne financière temporaire peut-elle amener à retarder rationnellement certaines décisions d’achat ou encore un léger stress et une anxiété mesurée sont-ils moteurs pour avancer dans la vie... L’analogie s’arrête là mais elle illustre bien des processus mentaux quelque peu similaires. La différence qui cependant peut les distinguer est peut-être que le toxicomane trouve une satisfaction au moment où il consomme. Mais cela n’est-il pas quelque part le cas de la personne en grande détresse financière qui trouve quelques nouveaux subsides ? Ou encore de la personne seule qui se complait dans sa solitude ? 


Dès lors que l’on accepte le rapprochement entre ces situations, l’approche des problèmes peut aussi amener à proposer des solutions qui pourraient avoir des fondements  communs. D’abord, l’analogie avec la toxicomanie pourrait permettre de comprendre comment le manque d’argent, de temps ou d’interactions sociales affecte les comportements et génère une forme de "mentalité du manque" basée en grande partie sur l’anxiété considérable de demain qui accompagne ce manque. Ce point est souligné par les auteurs qui montrent bien combien l’anxiété permanente altère le jugement et ce qu’ils nomment une forme de "bande passante" du cerveau. Une vision à très court terme, dans tous les cas. Ensuite, si l’on sait qu’à l’évidence traiter la dépendance aux substances d’abus ne passe pas par un simple accès libre au produit mais par de longs protocoles de désintoxications conduisant à une désaccoutumance, il pourrait paraître simpliste de simplement combler le manque d’argent pour ramener à des comportements plus rationnels. C’est d’ailleurs ce que proposent les auteurs en considérant que la solution à la pauvreté n’est pas forcément de donner de l’argent –ce qui aurait pour effet de renforcer les comportements inappropriés- mais de permettre par exemple l’accès à la santé en fournissant des médicaments ou des bons de nourriture. Fondamentalement, c’est d’ailleurs la démarche des associations à vocation humanitaire auxquelles il faut rendre hommage, sans négliger l’éducation : "Apprendre à pêcher plutôt que de fournir du poisson…". Ces solutions ne sont pas nouvelles mais ce qui est intéressant dans l’étude de Mullainathan et Shafir est d’avoir tenté d’apporter des bases à une théorie "unifiée" de la mentalité de la pauvreté. Une démarche originale et qui nous interpelle.

 

http://www.atlantico.fr

 

 

" Donner de la nourriture sans offrir la possibilité de marcher par soi-même ne suffit pas. Une charité qui laisse le pauvre tel quel est insuffisante. La miséricorde qui nous vient de Dieu tend à la justice, afin que le pauvre sorte de son état. L'Eglise nous demande, ainsi qu'à Rome et aux institutions publiques, de faire en sorte que personne n'ait besoin de la soupe populaire, d'un abri de fortune, d'une assistance juridique pour se voir reconnaître le droit de vivre et travailler, d'être à plein titre une personne... Servir et accompagner signifie aussi prendre le parti des plus faibles... Combien de fois nous ne savons ou ne voulons pas donner voix à qui n'en a pas, à vous qui avez souffert et souffrez en voyant vos droits bafoués!... Il est important pour l'Eglise que l'accueil du pauvre et la promotion de la justice ne soient pas confiés à des ce qu'on appelle des spécialistes mais fassent partie de l'action pastorale... Et je voudrais inviter les congrégations religieuses à lire sérieusement et avec le sens de la responsabilité les signes des temps car le Seigneur les appelle au courage et à la générosité en mettant à disposition leurs maisons et couvents vides. Ces locaux ne peuvent servir à l'Eglise transformés en hôtels pour faire de l'argent. Ils ne sont pas notre propriété mais sont destinés à l'accueil de la chair du Christ que sont les réfugiés... Certes, ce n'est pas chose facile. Il faut du discernement, de la responsabilité et du courage. L'Eglise fait tant mais elle est peut-être appelée à faire plus encore en partageant avec décision ceux que la Providence nous donne à servir".

 

François, Pape.

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Le Pape roule en 4L blanche avec 300.000 km au compteur

11 Septembre 2013, 11:36am

Publié par Fr Greg.

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Un prêtre du nord de l'Italie, proche des pauvres, a eu l'idée d'offrir sa vieille 4L dans laquelle il a accompli tout son sacerdoce au Pape. François a volontiers accepté. Ancien propriétaire d'une 4L en Argentine le pape aurait même pris le volant du véhicule pour l'essayer.

 

Dans le garage du Vatican les grosses berlines noires se languissent. Elles sont rutilantes, prêtes à ronronner lentement et sûrement au contact des foules mais elles sont ouvertement délaissées par François. Ce pape a une prédilection pour les petites autos... Il l'a montré à Lampedusa en circulant dans la simple voiture qu'un habitant de l'île lui avait prêtée. Il l'a montré au Brésil, lors des JMJ où il se déplaçait dans une petite Fiat de série «Idea» fabriquée là bas sous licence. Il l'a montré mardi après-midi en se rendant dans un centre pour réfugiés à Rome dans une berline bleue de moyenne gamme.

Il ne l'a pas montré samedi après-midi - mais a été vu par une photographe de l'AFP Andreas Solaro - dans une Renault 4L blanche de 300.000 kilomètres! A faire pâlir de jalousie les deux Renault Kangoo électrique flambants neuves que Carlos Ghosn, président du Groupe Renault était venu en personne offrir à Benoit XVI !

L'hebdomadaire catholique italien Famiglia Cristiana a très vite mené l'enquête et à découvert que cette 4L mythique lui avait été offerte le jour même par le Père Renzo Rocca, un prêtre de Vérone au nord de l'Italie. Dans cette guimbarde, ce curé des pauvres a parcouru ces 300.000 kilomètres pendant 25 ans pour visiter les personnes handicapées, les personnes âgées, les paumés de toutes sortes, dont les jeunes drogués.

Bref, une vie vouée aux plus éloignés de l'Église, aux délaissés, que le pape François place aujourd'hui en priorité. Ce qui a donné l'idée à ce prêtre âgé de 70 ans de lui offrir sa voiture de toutes les charités - pneus neiges dans le coffre «on ne sait jamais» a confié le prêtre - pour l'encourager et comme le symbole d'une vie de sacerdoce.

Le Père Rocca a donc écrit au Pape qui lui a lui même… téléphoné pour accepter ce cadeau et fixer le jour de livraison: samedi 7 septembre dernier. Juste avant la veillée de prière pour la paix et jour de jeune décrété par François dans toute l’Eglise Catholique pour la Syrie.


Par hasard la scène où le pape monte à l'avant de la 4L n'a pas échappé à l'objectif du photographe Solaro. Car c'est le prêtre qui semble avoir conduit le Pape de la résidence Saint Marthe derrière la basilique Saint-Pierre vers la place où 100.000 personnes l'attendaient mais où le pape s'est présenté à pied. Le prêtre raconte que François lui a dit avoir eu, lui aussi, une 4L! Et que François en aurait même profité pour la conduire quelques minutes… Mais cela aucune photo ne l'atteste.

Message de sobriété

Le contraste est grand en tout cas avec les scènes du pontificat précédent où Benoît XVI avait fini par se laisser enfermer, y compris dans l'enceinte du Vatican, dans de grosses berlines allemandes blindées et frappés de ses armes pontificales. Et avec force dispositif de sécurité de la Gendarmerie Vaticane - de recrutement italien et sans aucun rapport avec la Garde Suisse - qui semblait craindre un attentat à chaque instant.

Le temps de cette surenchère de sécurité est révolu. Mardi après-midi c'est sans escorte, sinon le chef de cette Gendarmerie Vaticane, surdimensionnée aujourd'hui, que le pape François s'est rendu dans la ville de Rome pour visiter un centre d'accueil de réfugiés tenus par les Jésuites.


Une occasion pour le Pape de renouveler le message de sobriété qu'il diffuse depuis le début de son pontificat et pour lequel il entend donner l'exemple notamment par la simplicité de son mode de déplacement: «Les couvents vides ne servent pas à l'Église, a-t-il prévenu, pour qu'elle les transforme en hôtels pour gagner de l'argent. Les couvents vides ne sont pas à nous, ils sont pour la chair du Christ que représentent les réfugiés». Certes, a-t-il poursuivi, «ce n'est pas quelque chose de simple, il faut des critères, de la responsabilité mais aussi du courage. Nous faisons tant (en faveur des réfugiés, ndlr) mais peut-être sommes-nous appelés à faire davantage», a-t-il ajouté. Car «la charité qui laisse le pauvre tel qu'il est ne suffit pas»: «il ne suffit pas de donner un sandwich». En effet «la vraie miséricorde (…) demande justice, veut que le pauvre puisse trouver la voie pour ne plus l'être».

Mardi matin, dans son homélie, il avait d'ailleurs critiqué «l'Église triomphaliste» et les «Chrétiens triomphalistes». A cette heure, la petite 4L dormait encore dans le garage des voitures du Pape où elle a sa place à côté des grosses berlines et un abri... Celles-ci n'ont plus rien trouvé à redire.

Le figaro.fr

 

 

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Michael Kohlhaas

10 Septembre 2013, 08:17am

Publié par Fr Greg.

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Avec Mads Mikkelsen

Jusqu’à présent, aucun des deux films de fiction d’Arnaud des Pallières (Adieu et Parc) ne nous avait totalement convaincus – la qualité de son oeuvre documentaire (Drancy avenir ou Disneyland, mon vieux pays natal), étant par ailleurs indiscutable. Même ses essais documentaires à base d’archives (Diane Wellington, Poussières d’Amérique) nous avaient laissés un peu dubitatifs, ne nous semblant pas à la hauteur du grand talent qu’on a toujours senti bouillir en lui sans qu’il en apporte la preuve définitive. Comme si ce cinéaste singulier choisissait des sujets trop petits pour lui, comme s’il leur appliquait une forme bien trop grande…

Michael Kohlhaas est donc la première bonne nouvelle dans la carrière de des Pallières, qui semble avoir enfin trouvé un sujet et un auteur (un texte magnifique et solide de Kleist, inspiré de faits réels) dont il serait digne. L’adéquation entre la forme et le fond est parfaite. Tout au long du film règnent une austérité et un souffle romanesque qui font bon ménage. D’un côté, un personnage minéral, intransigeant, radical, interprété avec fougue et retenue par un Mads Mikkelsen qui n’en fait jamais trop (ça lui est arrivé par le passé) et une mise en scène très cadrée, très rigide elle aussi. De l’autre, une nature à la palette de couleurs limitée, mais qui reflète au plus près les sentiments violents qui habitent les hommes (c’est la définition même du romantisme).

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L’action se déroule au XVIe siècle dans les Cévennes (terre protestante) et raconte l’histoire d’un éleveur et marchand de chevaux, heureux en amour et en affaires. Mais un jour, deux de ses chevaux sont retenus par un petit seigneur qui fait encore usage de pratiques féodales pourtant dépassées. Quand Michael Kohlhaas finit par récupérer ses chevaux, ils ont été maltraités. Il intente un procès au petit seigneur, qui le gagne. Alors Kohlhaas, parce qu’il croit en la justice mais qu’elle n’a pas voulu l’entendre, va prendre les armes pour la faire régner par lui-même.


Quand Kleist écrit cette nouvelle, en 1810, l’Europe est à un tournant. Les monarchies et empires régnants ont été bousculés par les idées révolutionnaires en marche. L’écrivain s’est enthousiasmé pour Bonaparte, il déteste Napoléon. Il a aussi lu Kant. Connaît son impératif catégorique énoncé dans Fondements de la métaphysique des moeurs, paru en 1785. On peut y lire notamment : “Agis seulement d’après la maxime grâce à laquelle tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle” et “Agis de façon telle que tu traites l’humanité, aussi bien dans ta personne que dans toute autre, toujours en même temps comme fin, et jamais simplement comme moyen”.

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Michael Kohlhaas met en scène un homme de bien qui va devenir un hors-la-loi afin d’obtenir justice. Mais si tout le monde faisait comme lui, à quoi ressemblerait le monde ? N’a-t-il pas entraîné avec lui des hommes dans des combats où ils n’étaient plus que des armes, donc des moyens ? C’est à peu près ce que va lui reprocher le personnage du pasteur (Denis Lavant) : on ne peut rendre la justice par le crime.

Un débat moral auquel la princesse qui règne sur la région (Roxane Duran) va elle-même être confrontée : comment réparer l’affront qu’a subi Kohlhaas, mais comment aussi le punir pour les crimes qu’il a commis ? La réponse sera aussi absurde qu’administrative, et l’on n’est pas surpris d’apprendre à quel point Franz Kafka adorait ce texte de Kleist…

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Deux heures durant, Arnaud des Pallières nous aura passionnés pour une question morale à laquelle le monde contemporain se trouve toujours confronté, avec des réponses pas toujours convaincantes ni définitives : où se situe la frontière entre la lutte armée politique et le meurtre ? Entre la résistance à l’oppression et le terrorisme ?

Jean-Baptiste Morain, les inrocks.

 

Michael Kohlhaas d’Arnaud des Pallières, avec Mads Mikkelsen, Mélusine Mayance, Roxane Duran (Fr., All., 2013, 2 h 02) 

 

 

 

 


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Marie-Dominique Philippe, la soif de la lumière divine.

8 Septembre 2013, 15:08pm

Publié par Fr Greg.

 

 

 

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      Marie-Dominique Philippe 08 sept 1912-26 Août 2006

 

"Dieu seul sonde les reins et les cœurs. Il ne juge pas selon les réalisations matérielles, mais selon les intentions profondes de chacun.

Les  hommes s'habituent tellement à juger leurs frères selon leurs résultats : ‘qu'astu fais dans ta vie ?’ et quand cela commence à être négatif, c'est terrible. Il n'y a plus de place pour eux. Le dossier négatif faison cheminement ! C'esterrible cette humanité d’aujourd'hui, parce qu'on ne voit que l'aspect négatif et on juge les personnes en fonction de cela, alors que Dieu remonte à lsource et voiles intentionsEn Dieu, in'y a pas de jugement à partir des réalisationsDieu nous poursuijusqu'au bout pour qu'on redécouvrson amour de Père, sa sollicitude aimantsur nous. »

 

P. Marie Dominique Philippe. Retraite sur l’Apocalypse. 1995

 

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Il est difficile de présenter en quelque mots une personnalité aussi riche et profonde que celle d’un grand philosophe, théologien et mystique qui a voué toute sa vie au service de la recherche de la Lumière divine. Cela vaut pourtant la peine, car même avec des mots insuffisants pour le faire découvrir, cela garde valeur de témoignage et de gratitude. Le père Marie-Dominique Philippe était un dominicain, un prêtre catholique, né à Cysoing le 8 septembre 1912 et mort le 26 août 2006 au prieuré de Saint-Jodard dans la Communauté Saint-Jean qu’il a fondée après avoir enseigné la philosophie et la théologie à l’Université de Fribourg en Suisse.


Un philosophe passionné par la recherche de l’être à l’homme

La philosophie du père Marie-Dominique Philippe est curieusement terriblement méconnue. Il en avait pourtant exposé les grands traits dans un petit livre étonnant : Lettre à un ami, un itinéraire donnant les grandes étapes d’un cheminement philosophique s’achevant en sagesse. Le titre de ce livre n’était pas fortuit. Ce n’était pas un titre vendeur proposé par un éditeur. Il exprimait très exactement ce que le père Philippe considérait comme la condition pour faire de la philosophie ensemble. Il faut cette amitié. Ce n’est pas une amitié fondée sur une attirance sensible ou un amour passionnel ! Non, une amitié parce que les regards sont tournés vers le même but : la recherche de la vérité. Pour lui, la philosophie était une quête éperdue de la vérité. Il possédait en ce domaine une sorte de ferveur contagieuse. La recherche de la vérité, même en philosophie, réclame une bienveillance de fond qui permet de garder les yeux ouverts pour regarder et écouter l’autre. L’autre c’est d’abord l’ami. C’est l’autre le plus important pour nous. L’autre c’est l’homme dans toute sa diversité et toute sa profondeur, c’est aussi l’homme dans toute sa complexité. Le père Philippe a eu de très nombreux amis, de tous âges, dans tous les milieux, dans de nombreuses nations, des amis de droite ou de gauche, pauvres comme Job ou riches. Il ne faisait pas le tri, des amis qui partageaient avec lui leurs questions, leurs recherches, leurs travaux mais aussi leurs joies et leurs peines. Tout l’intéressait.


04-06-2006 - PARAY - Pere prechant

 

Il disait dans son enseignement que le philosophe ne peut pas se spécialiser dans tel ou tel aspect de la philosophie parce qu’il regarde l’homme. L’homme n’est pas d’abord l’affaire de spécialistes, faire de la philosophie, c’est chercher à vivre pleinement notre vie d’homme, chercher à la vivre avec intelligence. C’est pourquoi il pensait que la philosophie n’était pas réservée à une élite, à un petit cercle universitaire. Chacun, à son rythme pouvait y avoir accès. Chercher à comprendre l’homme n’est pas une petite affaire. « Connais-toi toi-même », disait Socrate. De ce point de vue-là, il y avait quelque chose de socratique chez Marie-Dominique Philippe. La philosophie devait apporter à l’homme une connaissance profonde de ce qu’il est avec ses grandeurs, ses limites, ses erreurs. La philosophie avait une fonction « dévoilante ». Il fallait aller toujours plus loin, approfondir, découvrir ce qui n’était pas immédiatement donné ou évident.

La philosophie doit permettre à l’intelligence d’être plus elle-même, de voir tout ce qui est, avec un discernement plus grand, une pénétration plus profonde. Cette recherche de la vérité sur l’homme n’était pas abstraite pour lui. Elle regardait d’abord le philosophe lui-même et puis tous ceux qu’il rencontrait et était amené à découvrir.

 

Un philosophe passionné par l’art

Marie-Dominique Philippe aimait l’art et les artistes. Il ne se contentait pas de faire des analyses d’œuvres d’art. Il n’appliquait pas de méthode dans l’approche des œuvres d’art. Sa philosophie de l’activité artistique était beaucoup plus profonde qu’une simple esthétique. Il se déplaçait, allait voir tantôt une pièce de théâtre, un spectacle de danse contemporaine, une exposition de peinture, un concert etc. Il avait de grands amis artistes dans toutes les formes d’art et regardait avec une attention particulière ce que ceux-ci réalisaient. Il en parlait avec eux. Sa culture était immense. Il a encouragé la création de festivals, notamment le FestivalAgapè, qui s’est développé à Genève d’abord puis continue son travail dans différents endroits, en France et à l’étranger.


Pour découvrir la pensée de Marie-Dominique Philippe sur l’art, il y a – outre les cours nombreux qui ont été enregistrés – la découverte des deux tomes imposants d’un essai philosophique, L’activité artistique, réédité sous le titre Philosophie de l’art. Cette lecture devrait, à elle seule, nous permettre de comprendre le regard que pose le philosophe sur cette activité profondément humaine du « faire ». Si nous y réfléchissons un peu, nous comprenons tout de suite combien le « faire » tient une place importante dans notre vie. Combien d’heures passons-nous chaque jour (et dès l’enfance avec l’école) à travailler ? Si l’homme ne peut se résumer à l’homme travailleur (ce serait l’amputer d’autres dimensions de lui-même qui ne sont pas moins importantes), combien le travail sous toutes ses formes tient une place importante. Alors chercher à comprendre ce qu’est un travail humain devient une préoccupation essentielle pour le philosophe.

 

Le philosophe de l’amitié

Nous l’avons dit, le père Marie-Dominique Philippe avait de très nombreux amis. Il était ce que nous pourrions appeler un homme « amicable » (amicabilis). Il a compris sans doute à travers sa lecture profonde d’Aristote (mais au fond on ne trouve vraiment dans un philosophe que ce que l’on y cherche !) l’importance de l’amitié dans le vie humaine. Elle est une véritable finalité, elle donne un sens à la vie humaine. Aristote disait que l’homme sans ami était le plus malheureux des hommes. L’amitié permet de faire l’expérience humaine du bonheur. Il l’appelait l’amour d’amitié. Un bien beau nom : « amour d’amitié » veut dire un amour pleinement humain engageant l’homme non seulement au niveau des passions mais avec son intelligence et son cœur. Un amour spirituel pourrait-on dire. Mais un tel nom est souvent mal compris. C’est un amour humain qui procède d’une attraction que l’ami opère sur nous. Il nous attire. Une attraction qui va impliquer une délibération, un choix et une décision. On s’engage dans l’amitié librement, consciemment et si possible avec toute notre intelligence. C’est pourquoi Marie-Dominique Philippe aimait répéter dans son enseignement que l’intelligence devait être gardienne de l’amour. Non pour le bloquer, non pour l’écraser, non pour s’exalter elle-même et le tuer, mais pour lui permettre de demeurer toujours un amour pleinement humain et responsable. Le père Philippe avait une très grande limpidité dans ses relations amicales, peut-être tout simplement parce que sa sensibilité était extrêmement limpide.

Le père Philippe a enseigné l’éthique et avait le projet de sortir un ouvrage qui n’existe malheureusement que sous la forme d’un double polycopié.

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Le philosophe de la coopération

Marie-Dominique Philippe n’était pas un homme politique au sens où nous pouvons l’entendre habituellement. Certains l’imaginaient en homme de droite, d’autres le trouvaient sans doute trop à gauche. Il était un homme pour qui la politique était avant tout la gestion de la communauté humaine où chacun amenait sa contribution au service de tous et tous au service de chacun. Il comprenait très bien qu’en philosophie politique il n’y a pas de principes propres. La philosophie politique est une dimension de l’éthique dans laquelle nous trouvons le principe propre de l’activité humaine. La finalité humaine est toujours personnelle et non communautaire. La vie politique est de l’ordre de la disposition. Elle doit permettre à chacun et à tous de parvenir à cette finalité humaine que l’on découvre dans l’amitié et pour certains dans la contemplation.

Un philosophe contemplatif

Il suffisait d’écouter les cours du « maître » de la Fribourg Suisse pour comprendre l’altitude de ses pensées. Formé à l’école des Grecs (il enseignait l’histoire de la philosophie grecque à Fribourg), il y avait chez lui une compréhension profonde de la nature et du vivant. Il avait appris à la regarder avec un regard simple et pénétrant, sans doute à l’école des premiers physiciens, d’Héraclite, puis de Platon et d’Aristote. Il a tout naturellement développé une philosophie du vivant à laquelle seuls quelques privilégiés ont accès, car il s’agit, je crois, d’un polycopié qui n’a jamais été édité. Mais nous avons accès aux lignes directrices de la philosophie seconde du père Philippe à travers son œuvre si importante : Introduction à la philosophie d’Aristote. Quelques éléments apparaissent également dans la Lettre à un ami.

Mais évidemment le père Philippe s’est illustré particulièrement dans sa philosophie première. La philosophie de « ce qui est en tant qu’il est ». Ses études si profondes sur la problématique de l’être ont été réunies dans les volumes de ses essais surL’être, puis la grande remontée vers l’existence d’un Être Premier dans ses ouvrages réunis sous le nom : De l’être à Dieu. Tout cela a été repris dans l’ouvrage Retour à la source, publié chez Fayard en deux volumes.

La métaphysique du père Philippe n’était pas la scolastique thomiste classique. Il n’a pas fait une métaphysique à partir de Thomas d’Aquin, mais une philosophie première fondée sur le présupposé à toutes nos expériences : le jugement d’existence, qui vient débusquer l’être à l’intérieur même du devenir. Pas d’intuition de l’être à la manière de Jacques Maritain, mais des analyses profondes de ce qui est regardé en tant qu’il est. Le père Philippe était ce que l’on pourrait appeler un grand aristotélicien. Je me souviens d’avoir interrogé à la fin d’une conférence Emmanuel Levinas pour lui demander ce qu’il pensait du père Philippe. Il a eu cette réponse spontanée : « C’est un bon aristotélicien », ce qui, dans sa bouche n’avait rien de péjoratif.

Toute la métaphysique du père Philippe était finalisée dans un premier temps par la compréhension en profondeur de la personne humaine. L’être sert à comprendre ce qu’est l’homme, ce qu’est l’esprit en l’homme. Dans un deuxième temps sa métaphysique s’achevait dans la question puis la découverte d’un Être Premier que l’on peut reconnaître comme le Dieu des traditions religieuses monothéistes. Alors sa pensée s’achevait dans un regard de sagesse posé sur toutes choses dans la Lumière de cette ultime découverte.

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Un théologien catholique

Le père Philippe était un théologien très attaché à son Église. Il sentait que le navire était terriblement secoué, que beaucoup perdaient ou se détournaient de la foi. Il comprenait la difficulté de garder la foi dans une culture façonnée par les grandes idéologies athées qui se sont développées aux xixe et xxe  siècles. Il aimait beaucoup l’Église orthodoxe. Quelques temps avant sa mort, alors que nous conversions sur la situation des Églises, il me dit : « Les orthodoxes ont gardé la foi ». Ce n’était pas seulement pour me faire plaisir. Mais il comprenait l’importance d’enraciner la théologie dans la prière, la Parole divine et une liturgie qui soit un vecteur fidèle de la foi. La théologie du père Philippe s’est faite principalement à l’école de saint Jean. Il vivait du mystère du disciple bien-aimé comme peu d’hommes. C’était pour lui une nourriture permanente. L’Apocalypse le maintenait dans l’espérance, la Première Epître le donnait à ses frères, l’Evangile nourrissait sa foi contemplative.

Théologien du Christ crucifié et glorifié

Le père Philippe vivait d’un regard constamment tourné vers le Christ. Pour lui, l’Heure du Christ, la Croix était la Victoire du Christ sur le Mal. Le Christ à la Croix glorifie le Père et le Père le glorifie. C’est donc une grande victoire de la Lumière divine qui se réalise à l’heure même où les ténèbres s’abattent sur le monde.

Le père Marie-Dominique Philippe a composé un merveilleux ouvrage de théologie mystique johannique : Le Mystère du Christ Crucifié et Glorifié. Mais ce n’est là encore qu’un échantillon de son enseignement spirituel.

 

Théologien de la Mère de Dieu

Une de ses œuvres majeures est intitulée Le Mystère de Marie. Il y regarde la Mère de Dieu dans la perspective de la croissance en Elle de l’amour divin. Sur la Terre, Marie n’a cessé de croître d’amour en amour jusqu’à son entrée dans le Ciel. Comprendre cette croissance de la Mère de Dieu et les étapes de cette croissance nous éclaire sur notre propre parcours. Les chemins que nous devons traverser sont illuminés par celle qui est Mère de la vie divine des fils de Dieu. Le père Philippe à la suite de saint Jean avait réellement pris Marie chez lui. Ce n’était pas une dévotion sentimentale. Il l’avait prise avec toute son intelligence et son cœur parce qu’il avait compris que c’est Elle seule qui peut nous mener à bon port.

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Voilà j’ai rédigé ces quelques mots en hommage à un professeur, un maître et un ami qui nous a quittés il y a sept ans… A Dieu cher père Philippe…

 Blagnac le 28/05/13 Frédéric Tavernier-Vellas © www.theologieorthodoxe.com

 

 

 

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L’art a été le premier cri de l’homme et il sera le dernier...

7 Septembre 2013, 10:39am

Publié par Fr Greg.

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Le laid en art, c’est vieux ! Il y a surtout aujourd’hui une conception plus subjectiviste de l’art, conséquence de la position philosophique de la subjectivité : on exprime ses émotions plus que dans l’art contemplatif. 

Dante dit que l’art est petite fille de Dieu(1), il achève l’œuvre de la création. Tandis qu’il y a dans toute la perspective moderne un aspect de la négation, de la rupture, et c’est cet aspect qu’on veut exprimer en premier lieu. C’est la conséquence d’une vision du monde et de l’homme. Alors il y a des choses belles, mais il n’y a pas de grand chef-d’œuvre parce qu’on reste dans quelque chose de très individuel sans atteindre à ce qui est universel. Quelqu’un qui est brisé par la souffrance, ça peut être très grand et très beau et pourtant ça restera très individuel et moins communicable que ce qu’on appelle le beau, l’harmonie, la proportion.

L’art a été le premier cri de l’homme et il sera le dernier. Quand l’homme n’est plus religieux, il est errant, il ne sait plus d’où il vient, et il ne sait plus où il va. Et l’art exprime cette cassure et cette errance. Il y a des ébauches d’art dans notre monde qui appelle. Mais des œuvres parfaites...

Pourtant j’aime beaucoup certaines choses de la peinture de ce siècle. C’est dans ce domaine qu’il y a eu les choses les plus nouvelles, de Manet à Rouault.

Marie-Dominique Philippe. Le temps de l'église n°3, novembre 1992

 

 

(1) ... si tu lis bien ta Physique, tu trouveras, sans tourner beaucoup de pages, que votre art, autant qu'il le peut, suit la nature comme le disciple suit son maître ;si bien que votre art est comme le petit-fils de Dieu.

DANTE, Inferno, XI, 101-105.

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Appel

6 Septembre 2013, 19:16pm

Publié par Fr Greg.

 

 

 

 

 

Depuis 3 ans, ce blog essaye de mettre en lumière certaines dimensions de nos personnes, de sortir de nos chemins tracés, de redécouvrir nos désirs profonds, nos capacités, sortir du moralisme ambiant et du défaitisme culturel ...

 

Vous êtes en moyenne + 100 personnes à lire ce blog tous les jours, soit près de 82,000 connexions à ce jour et près de 150,000 pages visitées ! 

 

Et, je cherche  50 euros pour l'hébergement du site (over-blog) avant le 05/10/2013.   Merci.   fr Grégoire.

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Catherine ou la juste estime de soi...

5 Septembre 2013, 18:34pm

Publié par Fr Greg.

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POUR ÊTRE SAINT, IL N’EST PAS NÉCESSAIRE D’AVOIR UNE TÊTE D’IMAGE PIEUSE

3 Septembre 2013, 09:58am

Publié par Fr Greg.

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Résumé Audience du 17 juin 2013

Je ne comprends pas les communautés chrétiennes qui sont fermées, Il est plus facile de rester à la maison avec notre unique brebis, pour la brosser et la caresser, mais nous les prêtres et tous les chrétiens, le Seigneur veut que nous soyons des pasteurs, pas des brosseurs de brebis !"

“Il y a eu beaucoup de révolutionnaires dans l’histoire, mais aucun n’a eu la force de la révolution apportée par Jésus, une révolution (…) qui change en profondeur le cœur de l’homme, Dans l’histoire, les révolutions ont changé les systèmes politiques, économiques, mais aucune n’a vraiment modifié le cœur de l’homme“,

Ici, si quelqu’un n’est pas un pécheur, qu’il lève la main“, a encore lancé le pape François en déclenchant des rires dans la salle des audiences et avant de préciser que “nous sommes tous pécheurs“, sauvés cependant du péché par “la grâce de Jésus-Christ“. “Pour être saint, il n’est pas nécessaire d’avoir une tête d’image pieuse“, mais “il faut accueillir la grâce“, a poursuivi le pape en déclenchant d’autres éclats de rires.

le pape a également fustigé les “chrétiens découragés“ et “tristes“ dont “on se demande s’ils croient aux Christ ou en la déesse des plaintes“.

“Nous, disciples du crucifié, pouvons-nous refuser d’aller en ces lieux où nul ne veut aller de peur de se compromettre et du jugement des autres, reniant d’annoncer à nos frères la Parole de Dieu ? “n’ayez pas peur“. “N’ayez pas peur de l’amour de Dieu“, ou encore “de sortir de vous-même“.

 


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Pour être saint, il n’est pas nécessaire d’avoir une tête d’image pieuse

 

Bonsoir à tous, chers frères et sœurs !

L’apôtre Paul finissait le passage de sa lettre à nos ancêtres par ces paroles : vous n’êtes pas sous la Loi, mais sous la grâce. Et ceci est notre vie : marcher sous la grâce, parce que le Seigneur nous a aimés, nous a sauvés, nous a pardonnés. Le Seigneur a tout fait, et cela est la grâce, la grâce de Dieu. Nous sommes en chemin sous la grâce de Dieu, qui est venu à nous, en Jésus Christ qui nous a sauvés. Mais cela nous ouvre à un vaste horizon, et cela est une joie pour nous. « Vous n’êtes pas sous la Loi, mais sous la grâce ». Mais que signifie ce « vivre sous la grâce » ? Nous chercherons à expliquer quelque chose de ce que signifie vivre sous la grâce. Nous ne sommes plus esclaves de la Loi: nous sommes libres parce que Jésus Christ nous a libérés, il nous a donné la liberté, cette pleine liberté de fils de Dieu, qui vivons sous la grâce. C’est un trésor. Je chercherai à expliquer un peu ce mystère si beau, si grand : vivre sous la grâce.

Soyez RÉVOLUTIONNAIRES!

Cette année, vous avez beaucoup travaillé sur le baptême et également sur le renouveau de la pastorale post-baptismale. Le baptême, ce passage de « sous la Loi » à « sous la grâce », est une révolution. Il y a eu beaucoup de révolutionnaires dans l’histoire, beaucoup. Mais personne n’a eu la force de cette révolution que nous a apportée Jésus : une révolution pour transformer l’histoire, une révolution qui change en profondeur le cœur de l’homme. Les révolutions de l’histoire ont changé les systèmes politiques, économiques, mais aucune d’elles a véritablement modifié le cœur de l’homme. La vraie révolution, celle qui transforme radicalement la vie, c’est Jésus Christ qui l’a accomplie à travers sa Résurrection. Et Benoît XVI disait de cette révolution qu’elle est « la plus grande mutation de l’histoire de l’humanité ». Mais pensons à cela : c’est la plus grande mutation de l’histoire de l’humanité, c’est une véritable révolution et nous sommes les hommes et les femmes révolutionnaires de cette révolution, parce que nous marchons sur ce chemin de la plus grande mutation de l’histoire de l’humanité. Si un chrétien n’est pas révolutionnaire, à notre époque, ce n’est pas un chrétien ! Il doit être révolutionnaire pour la grâce ! C’est précisément la grâce que le Père nous donne à travers Jésus Christ crucifié, mort et ressuscité qui fait de nous des révolutionnaires parce que — et je cite à nouveau Benoît XVI — « c’est la plus grande mutation de l’histoire de l’humanité ». Parce que le cœur change. Le prophète Ezéchiel le disait : « J’ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair ». Telle est l’expérience que vit l’apôtre Paul : après avoir rencontré Jésus sur la route de Damas, il change radicalement de perspective de vie et reçoit le baptême. Dieu transforme son cœur ! Mais pensez : un persécuteur, quelqu’un qui poursuivait l’Église et les chrétiens, devient un saint, un chrétien jusqu’à la moelle des os, un vrai chrétien ! Avant c’était un persécuteur violent, à présent il devient un apôtre, un témoin courageux de Jésus Christ au point de ne pas avoir peur de subir le martyre. Ce Saul qui voulait tuer celui qui annonçait l’Évangile, à la fin donne sa vie pour annoncer l’Évangile. C’est cela le changement, le plus grand changement dont nous parlait le Pape Benoît XVI. Il change notre cœur, de pécheur — de pécheur : nous sommes tous pécheurs — il nous transforme en saint. Y a-t-il parmi nous quelqu’un qui n’est pas pécheur ? S’il y a quelqu’un, qu’il lève la main ! Nous sommes tous pécheurs, tous ! Nous sommes tous pécheurs ! Mais la grâce de Jésus Christ nous sauve du péché : elle nous sauve ! Si nous accueillons la grâce de Jésus Christ, il nous change à tous notre cœur de pécheurs et nous rend saints. Pour être saint il n’est pas nécessaire de lever les yeux et de regarder de côté, il n’est pas nécessaire d’avoir une tête d’image pieuse ou de prendre le visage des images de saints ! Non, ce n’est pas nécessaire ! Une seule chose est nécessaire pour devenir saints : accueillir la grâce que le Père nous donne en Jésus Christ. Voilà, cette grâce change notre cœur. Nous continuons à être pécheurs, parce que nous sommes tous faibles, mais également avec cette grâce qui nous fait sentir que le Seigneur est bon, que le Seigneur est miséricordieux, que le Seigneur nous attend, que le Seigneur nous pardonne, cette grande grâce qui change notre cœur.

Et le prophète Ezéchiel disait qu’il change un cœur de pierre en un cœur de chair. Qu’est-ce que cela veut dire ? Un cœur qui aime, un cœur qui souffre, un cœur qui se réjouit avec les autres, un cœur empli de tendresse pour ceux qui, portant en eux les blessures de la vie, se sentent aux périphéries de la société. L’amour est la plus grande force de transformation de la réalité, parce qu’il abat les murs de l’égoïsme et comble les fossés qui nous maintiennent éloignés les uns des autres. Et cela est l’amour qui vient d’un cœur changé, d’un cœur de pierre qui est transformé en un cœur de chair, un cœur humain. Et c’est la grâce qui fait cela, la grâce de Jésus Christ que nous avons tous reçue. L’un d’entre vous sait-il combien coûte la grâce ? Où se vend la grâce ? Où je peux acheter la grâce ? Personne ne connaît la réponse, non. Je vais l’acheter au secrétariat de la paroisse, peut-être que l’on y vend la grâce ? Est-ce qu’un prêtre la vend, la grâce ? Écoutez bien ceci : la grâce ne s’achète pas et ne se vend pas ; c’est un don de Dieu en Jésus Christ. Jésus Christ nous donne la grâce. C’est le seul qui nous donne la grâce. C’est un don: il nous l’offre à nous. Prenons-la. Cela est beau. L’amour de Jésus est ainsi : il nous donne la grâce gratuitement, gratuitement. Et nous, nous devons la donner à nos frères, à nos sœurs, gratuitement. C’est un peu triste lorsque l’on rencontre certaines personnes qui vendent la grâce : dans l’histoire de l’Église, parfois, cela est apparu, et cela a fait du mal, beaucoup de mal. Mais on ne peut pas vendre la grâce : on la reçoit gratuitement et on la donne gratuitement. Et cela est la grâce de Jésus Christ.

 

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Au milieu de tant de douleurs, de tant de problèmes qui sont ici, à Rome, il y a des gens qui vivent sans espérance. Chacun de nous peut penser, en silence, aux personnes qui vivent sans espérance, qui sont plongées dans une profonde tristesse dont ils tentent de sortir en croyant trouver le bonheur dans l’alcool, la drogue, dans les jeux de hasard, dans le pouvoir de l’argent, dans la sexualité déréglée... Mais ils sont encore plus déçus et laissent parfois éclater leur colère envers la vie par des comportements violents et indignes de l’homme. Combien de personnes tristes, combien de personnes tristes, sans espérance ! Pensez aussi aux nombreux jeunes qui, après avoir expérimenté tant de choses, ne trouvent pas de sens à leur vie et cherchent le suicide comme solution. Savez-vous combien il y a de suicides de jeunes dans le monde aujourd’hui ? Un nombre très élevé ! Pourquoi ? Ils n’ont pas d’espérance. Ils ont essayé tant de choses et la société, qui est cruelle — elle est cruelle ! — ne peut leur donner d’espérance. L’espérance est comme la grâce : on ne peut l’acheter, c’est un don de Dieu. Et nous devons offrir l’espérance chrétienne avec notre témoignage, avec notre liberté, avec notre joie. Le don que nous fait Dieu de la grâce apporte l’espérance. Nous, qui avons la joie de nous apercevoir que nous ne sommes pas orphelins, que nous avons un Père, pouvons-nous être indifférents envers cette ville qui nous demande, peut-être même inconsciemment, sans le savoir, une espérance qui l’aide à se tourner vers l’avenir avec une plus grande confiance et sérénité ? Nous ne pouvons pas être indifférents. Mais comment pouvons-nous faire cela ? Comment pouvons-nous aller de l’avant et offrir l’espérance ? Avancer sur notre chemin en disant : « Moi j’ai l’espérance » ? Non ! À travers votre témoignage, à travers votre sourire, dire : « Je crois que j’ai un Père ». L’annonce de l’Évangile, c’est cela : à travers ma parole, à travers mon témoignage, dire : « J’ai un Père. Nous ne sommes pas orphelins. Nous avons un Père », et partager cette filiation avec le Père et avec tous les autres. « Père, à présent, je comprends : il s’agit de convaincre les autres, de faire du prosélytisme ! ». Non, rien de tout cela. L’Évangile est comme la semence : tu la sèmes, tu la sèmes par ta parole et par ton témoignage. Puis, tu ne fais pas de calculs sur la façon dont les choses sont allées : c’est Dieu qui le fait. Lui fait croître cette semence, mais nous devons semer avec la certitude que c’est Lui qui donne l’eau, c’est lui qui donne la croissance. Et ce n’est pas nous qui faisons la récolte : c’est un autre prêtre, un autre laïc, une autre laïque, un autre qui le fera. Mais avec la joie de semer à travers le témoignage, parce que la parole seule ne suffit pas, elle ne suffit pas. La parole sans le témoignage est vide. Les paroles ne suffisent pas. C’est le véritable témoignage dont parle Paul.

L’annonce de l’Évangile est destinée avant tout aux pauvres, à ceux qui manquent souvent du nécessaire pour conduire une vie digne. C’est à eux en premier qu’est annoncé le message joyeux que Dieu les aime avec prédilection et qu’il va à leur rencontre à travers les œuvres de charité que les disciples du Christ accomplissent en son nom. Avant tout, aller vers les pauvres : cela est le premier point. Au moment du Jugement dernier, pouvons-nous lire chez Matthieu, chap. 25, nous serons tous jugés sur cela. Mais certains pensent également que le message de Jésus est destiné à ceux qui n’ont pas de préparation culturelle. Non ! Non ! L’apôtre affirme avec force que l’Évangile est pour tous, également pour les érudits. La sagesse, qui dérive de la Résurrection, ne s’oppose pas à celle humaine, mais au contraire, elle la purifie et l’élève. L’Église a toujours été présente dans les lieux où s’élabore la culture. Mais le premier pas est toujours la priorité aux pauvres. Mais nous devons également aller aux frontières de l’esprit, de la culture, au sommet du dialogue, du dialogue qui édifie la paix, du dialogue intellectuel, du dialogue raisonnable.

L’Évangile est pour tous. Le fait d’aller vers les pauvres ne signifie pas que nous devons devenir paupéristes ou un genre de « clochards spirituels » ! Non, non, ça ne signifie pas cela ! Cela signifie que nous devons aller vers la chair de Jésus qui souffre, mais la chair de Jésus souffre aussi de ceux qui ne le connaissent pas par leur étude, leur intelligence, leur culture. Nous devons aller là ! C’est pourquoi j’aime utiliser l’expression « aller vers les périphéries », les périphéries existentielles. Aller vers tous, vers tous ceux-là, de la pauvreté physique et réelle à la pauvreté intellectuelle, qui est elle aussi réelle. Aller là, vers toutes les périphéries, toutes les croisées des chemins : aller là. Et là, semer la semence de l’Évangile, à travers la parole et le témoignage.

 

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Et cela signifie que nous devons avoir du courage. Paul VI disait qu’il ne comprenait pas les chrétiens découragés : il ne les comprenait pas. Ces chrétiens tristes, anxieux, dont on peut se demander s’ils croient en Christ ou en la « déesse de la lamentation » : on ne sait jamais. Ils se lamentent tous les jours, ils se lamentent : regarde comment va le monde, regarde, quelle catastrophe, toutes ces catastrophes. Mais pensez-y : le monde n’est pas pire qu’il y a cinq siècles ! Le monde est le monde ; il a toujours été le monde. Et quand quelqu’un se plaint : c’est ainsi, on ne peut rien y faire, ah la jeunesse... Je vous pose une question : connaissez-vous des chrétiens qui sont ainsi ? Il y en a, il y en a ! Mais le chrétien doit être courageux et devant les problèmes, devant une crise sociale, religieuse, il doit avoir le courage d’aller de l’avant, aller de l’avant avec courage. Et quand on ne peut rien y faire, avec patience : en supportant. Supporter. Courage et patience, deux vertus de Paul. Courage : aller de l’avant, faire les choses, rendre un témoignage fort ; aller de l’avant ! Supporter : porter sur ses épaules les choses que l’on ne peut pas encore changer. Mais aller de l’avant avec cette patience, avec cette patience que nous donne la grâce. Mais que devons-nous faire avec le courage et avec la patience ? Sortir de nous-mêmes : sortir de nous-mêmes. Sortir de nos communautés, pour aller là où les hommes et les femmes vivent, travaillent et souffrent et leur annoncer la miséricorde du Père qui s’est faite connaître aux hommes en Jésus Christ de Nazareth. Annoncer cette grâce qui nous a été offerte par Jésus. Si j’ai demandé aux prêtres, Jeudi Saint, d’être des pasteurs avec l’odeur des brebis, à vous, chers frères et sœurs, je dis : soyez partout des porteurs de la Parole de vie dans vos quartiers, sur les lieux de travail et partout où les personnes se retrouvent et développent des relations. Vous devez aller à l’extérieur. Je ne comprends pas les communautés chrétiennes qui sont fermées, en paroisse. Je veux vous dire quelque chose. Dans l’Évangile se trouve un beau passage qui nous parle du pasteur qui, quand il revient à la bergerie, se rend compte qu’il manque une brebis, laisse les 99 autres et va la chercher, va en chercher une. Mais nous, frères et sœurs, nous en avons une : il nous manque les 99 autres ! Nous devons sortir, nous devons allers vers elles ! Dans cette culture — disons-nous la vérité — nous n’en avons qu’une, nous sommes une minorité ! Et nous, sentons-nous la ferveur, le zèle apostolique d’aller et de sortir, et de trouver les 99 autres ? Il s’agit d’une grande responsabilité et nous devons demander au Seigneur la grâce de la générosité et le courage et la patience pour sortir, pour sortir annoncer l’Évangile. Ah, cela est difficile. Il est plus facile de rester à la maison, avec cette unique brebis ! Cela est plus facile avec cette brebis, la peigner, la caresser... mais nous les prêtres, vous aussi chrétiens, nous tous : le Seigneur veut que nous soyons des pasteurs, pas des coiffeurs de brebis ; des pasteurs ! Et quand une communauté est fermée, toujours avec les mêmes personnes qui parlent, cette communauté n’est pas une communauté qui donne vie. C’est une communauté stérile, elle n’est pas féconde. La fécondité de l’Évangile vient par la grâce de Jésus Christ, mais à travers nous, notre prédication, notre courage, notre patience.


Cela paraît un peu long, n’est-ce pas ? Mais ce n’est pas facile ! Nous devons nous avouer la vérité : le travail d’évangéliser, de porter de l’avant la grâce gratuitement n’est pas facile, car nous ne sommes pas seuls avec Jésus Christ ; il y a aussi un adversaire, un ennemi qui veut garder les hommes séparés de Dieu. Et c’est pourquoi il instille dans les cœurs la déception, quand nous ne voyons pas notre engagement apostolique immédiatement récompensé. Chaque jour le diable jette dans nos cœurs des semences de pessimisme et d’amertume, et cela décourage, nous nous décourageons. « Cela ne va pas ! Nous avons fait cela, ça ne va pas ; Nous avons fait ceci et ça ne va pas ! Et regarde cette religion comme elle attire tant de personnes et pas nous ! ». C’est le diable qui fait cela. Nous devons nous préparer à la lutte spirituelle. Cela est important. On ne peut pas prêcher l’Évangile sans cette lutte spirituelle : une lutte de tous les jours conte la tristesse, contre l’amertume, contre le pessimisme ; une lutte de tous les jours ! Semer n’est pas facile. Il est plus beau de récolter, mais semer n’est pas facile, et cela est la lutte quotidienne des chrétiens.

Paul disait qu’il ressentait l’urgence de prêcher et il avait l’expérience de cette lutte personnelle, quand il disait : « J’ai dans ma chair une épine de satan et tous les jours je la sens ». Nous avons nous aussi des épines de satan qui nous font souffrir et nous font avancer avec difficulté et qui parfois nous découragent. Nous préparer à la lutte spirituelle : l’évangélisation nous demande un véritable courage également pour cette lutte intérieure, dans notre cœur, pour dire avec la prière, avec le sacrifice, avec l’envie de suivre Jésus, avec les sacrements qui sont une rencontre avec Jésus, dire à Jésus : merci, merci de ta grâce. Je veux l’apporter aux autres. Mais cela est un travail : c’est un travail. Cela s’appelle — ne vous effrayez pas — cela s’appelle le martyre. Le martyre est cela : lutter, tous les jours, pour témoigner. Cela est le martyre. Et à certains le Seigneur demande le martyre de la vie, mais il y a le martyre de tous les jours, de toutes les heures : le témoignage contre l’esprit du mal qui ne veut pas que nous soyons des évangélisateurs.

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Et à présent, je voudrais finir en pensant à une chose. En cette époque, où la gratuité semble diminuer dans les relations interpersonnelles car tout se vend et tout s’achète, et où il est difficile de trouver la gratuité, nous chrétiens nous annonçons un Dieu qui pour être notre ami ne demande rien, si ce n’est d’être accueilli. C’est l’unique chose que Jésus demande : être accueilli. Pensons à ceux qui vivent dans le désespoir car ils n’ont jamais rencontré quelqu’un qui leur a apporté de l’attention, qui les a consolés, qui les a faits se sentir précieux et importants. Nous, disciples du Crucifié, pouvons-nous nous refuser d’aller dans ces lieux où personne ne veut aller par peur de se compromettre et du jugement des autres, et nier ainsi à ces frères l’annonce de la Parole de Dieu ? La gratuité ! Nous avons reçu cette gratuité, cette grâce, gratuitement ; nous devons la donner, gratuitement. Et c’est cela que, pour finir, je veux vous dire. Ne pas avoir peur, ne pas avoir peur. Ne pas avoir peur de l’amour, de l’amour de Dieu, notre Père. Ne pas avoir peur. Ne pas avoir peur de recevoir la grâce de Jésus Christ, ne pas avoir peur de notre liberté qui est donnée par la grâce de Jésus Christ ou, comme disait Paul : « Vous n’êtes plus sous la Loi, mais sous la grâce ». Ne pas avoir peur de la grâce, ne pas avoir peur de sortir de nous-mêmes, ne pas avoir peur de sortir de nos communautés chrétiennes pour aller trouver les 99 brebis qui ne sont pas à la maison. Et aller dialoguer avec elles, et leur dire ce que nous pensons, aller montrer notre amour qui est l’amour de Dieu.

 

Chers amis, chers frères et sœurs: n’ayons pas peur ! Allons de l’avant pour dire à nos frères et à nos sœurs que nous sommes sous la grâce, que Jésus nous donne la grâce et cela ne coûte rien : il faut seulement la recevoir. Allons de l’avant !

François, Pape.

www.vatican.va

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Les six traits de caractère qu'il faut avoir absolument pour réussir dans la vie

2 Septembre 2013, 10:03am

Publié par Fr Greg.

 

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Six. Six traits de caractère, de personnalité qu’a recensé le professeur Jeffrey Pfeffer. Ces six traits sont pour lui la clé de la réussite, de la puissance et de la performance, afin d’atteindre le haut niveau. Mais le professeur n’a pas fait que comparer ce qu’avaient les "champions" en commun : son analyse s’est également penchée sur le manque des moins "forts".

Le premier trait concerne l’énergie et l’endurance physique. En partant de ce postulat, effectivement, il y a déjà une sélection qui s’effectue. Car tous les individus n’ont pas la résistance physique d’aligner au minimum dix heures de travail par jour, et des semaines oscillant entre 60 et 65 heures, minimum. Pour le professeur Pfeffer, la capacité et la volonté de travailler comme un acharné a caractérisé bon nombre de personnages puissants. Cette masse de travail abattu permet de "dépasser" certains individus, pourtant plus intelligents ou compétents. De plus, cette énergie dépensée dans le travail va inspirer l’entourage à travailler également plus. Une émulation par le labeur en somme.

Deuxième clé de la réussite, la concentration / application / attention  / perspective. Le focus, en un mot. Le professeur cite l’exemple d’un étudiant qui a refusé un excellent poste dans une compagnie pétrolière. La raison ? Son ambition de conquérir le bureau ovale étant plus forte que tout, travailler dans le pétrole, l’or noir du XXIe siècle l’aurait grandement compromis. Selon Jeffrey Pfeffer, les directeurs à succès de grands groupes sont ceux qui ont concentré leurs efforts de carrière au sein de la même entreprise, ou d’un nombre restreint.

Un peu d’humanité dans ce monde de brute : la troisième clé du succès repose sur la sensibilité aux autres. Car savoir ce que les autres veulent aide à mieux communiquer. Mais, il y a un pas entre savoir ce qu’autrui désire, et ce qu’il obtient. Et le professeur de Standford le sait bien. La négociation entre alors en compte.

 La quatrième clé réside dans la flexibilité. Et là, cela devient complexe, voire schizophrène comme le décrit l’auteur de l’article de Business Insider, qui n’hésite pas à parler de Machiavel. Un subtil dosage s'avère nécessaire Pour Pfeffer, si la flexibilité peut conférer un grand pouvoir, elle s’oppose à la fois à la clé numéro 2, ainsi qu’indirectement à la clé numéro 3. Dans le rapport aux autres, être flexible peut être compris comme faible, peu ferme par rapport aux autres…Un subtil dosage de toutes ces clés s’avère donc primordial.

L’avant dernière clé du conflit réside dans la capacité à tolérer les conflits. Mais il ne faut pas pour autant forcément les fuir. C’est un peu comme remporter une bataille, ou la guerre…

Enfin, la dernière clé à assembler aux cinq autres, concerne la capacité à maîtriser son ego, à ravaler parfois sa fierté. Car l’ego peut être un ennemi redoutable.

La conclusion peut être déroutante : s’il faut parfois tracer son chemin en solitaire, carriériste, il est bon aussi à certains moments de créer des alliances et des réseaux d’amitié. Pour Jeffrey Pfeffer, les gens qui peuvent accéder aux plus hautes charges sont en mesure de modifier leur comportement en fonction de l’opportunité qui se présente à eux. Légèrement schizophrène donc. Mais six vous possédez ces six traits de personnalité, et que vous le souhaitez, vous devriez parvenir à de grandes carrières.

 

http://www.atlantico.fr/decryptage/six-traits-caractere-qu-faut-avoir-absolument-pour-reussir-dans-vie-829349.html#tshKCd47fGTZQCBw.99

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Contre la sagesse bourgeoise des valeurs…

1 Septembre 2013, 03:58am

Publié par Father Greg

 

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J’ai vu « Chacun sa vérité » de Pirandello. Cela a la force et la simplicité des chefs d’œuvre. Suzanne Flon y est admirable. Chacun sa vérité est un des truismes profonds que la science la plus pointue confirme et qui ridiculise les systèmes. Les uns après les autres ils s’effondrent sous nos yeux, non sans dégâts.

 

 

Naturellement les dogmatiques s’indignent. Ils crient à l’individualisme déchaîné, au déclin des valeurs. Ces valeurs dont ils se réclament n’ont de valeur que si elles sont  assumées par une conscience. Une valeur imposée est sans valeur. Pour ce problème d’éducation, on ne peut se passer du secours de la tradition.

 

La tradition n’est pas une vérité en soi, mais le socle indispensable pour construire. La table rase est une vue de l’esprit, donc rien. Chacun doit repenser la tradition qu’il a reçue, sans l’accepter ni la refuser en bloc. Tâche difficile et dont beaucoup n’aperçoivent même pas l’intérêt. Il n’est pas vrai de dire que la liberté est le désir le plus violent de l’homme. Appeler à la liberté, ce n’est pas appeler au bonheur. Beaucoup préfèrent la servitude dorée à la liberté misérable. La vocation de clochard n’est pas très répandue. Dans l’ordre de l’esprit, je préfère être clochard qu’esclave. Affaire de goût.

 

Jacques de Bourbon Busset

 


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Mais n'oubliez pas, mettez la pagaille! !!!

30 Août 2013, 08:57am

Publié par Fr Greg.

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J'aimerais vous dire une chose. Qu'est-ce que j'attends comme conséquence de la Journée mondiale de la jeunesse? J'espère de la pagaille! Va-t-il y avoir de la pagaille ici? Oui! Est-ce qu'ici à Rio il va y avoir de la pagaille? Oui! Mais je veux de la pagaille dans les diocèses! Je veux que vous alliez à l'extérieur! Je veux que l'Eglise sorte dans les rues! Je veux que nous nous gardions de tout ce qui est mondanité, installation, de tout confort, de tout cléricalisme, de toute fermeture sur nous-mêmes. Les paroisses, les écoles, les institutions, sont appelés à sortir! S'ils ne sortent pas, ils deviennent une ONG et l'Eglise ne peut pas être une ONG.

Que les évêques et les curés me pardonnent, si ensuite quelqu'un met la pagaille, mais c'est un conseil… merci pour ce que vous pouvez faire. Regardez, je pense qu'en ce moment, cette civilisation mondiale est allée trop loin, est allée trop loin! Parce que le culte fait au dieu de l'argent est tel! Nous assistons à une philosophie et une pratique de l'exclusion des deux pôles de la vie qui sont les promesses du peuple. Et justement, parce qu'on pourrait penser qu'il pourrait y avoir une sorte d'euthanasie cachée. C'est-à-dire : on ne s'occupe pas des personnes âgées! Mais il y a aussi cette euthanasie culturelle: ne les laissez pas parler, ne les laissez pas agir! Et l'exclusion des jeunes: le pourcentage de jeunes qui sont sans travail, sans emploi, est très élevé! C'est une génération qui n'a pas l'expérience de la dignité gagnée par le travail. Autrement dit, cette civilisation nous a conduits à exclure les deux pointes qui sont notre avenir!

Par conséquent, les jeunes doivent sortir, ils doivent se mettre en valeur. Les jeunes doivent sortir et se battre pour les valeurs, se battre pour les valeurs! Et les vieux doivent ouvrir la bouche, les anciens doivent ouvrir la bouche et nous enseigner, nous transmettre la sagesse des peuples! Dans le peuple argentin, je le demande du fond du cœur aux anciens: ne manquez pas d'être la réserve culturelle de notre peuple qui transmette la justice, qui transmette l'histoire, qui transmette les valeurs, qui transmette la mémoire du Peuple. Et vous, s'il vous plaît, ne vous mettez pas contre les vieux! Laissez-les parler, écoutez-les, et avancez! Mais sachez, sachez qu'en ce moment, vous, les jeunes et les anciens, êtes voués au même sort: l'exclusion! Ne vous laissez pas exclure! Est-ce clair? Je pense que vous devez travailler à cela.

Et la foi en Jésus-Christ n'est pas une plaisanterie, c'est quelque chose de très sérieux, c'est un scandale. Dieu était venu se faire l'un de nous: c'est un scandale! Et qu'il soit mort sur la croix:  c'est un scandale, le scandale de la croix. La Croix continue d'être un scandale, mais c'est le seul chemin sûr, celui de la Croix, de Jésus, dans l'incarnation de Jésus!

S'il vous plaît, ne diluez pas la foi en Jésus-Christ! Il y a du jus d'orange dilué, du jus de pomme dilué, du jus de banane dilué, mais s'il vous plaît ne prenez pas du jus de foi dilué! La foi est entière, elle ne se dilue pas! C'est la foi en Jésus. C'est la foi dans le Fils de Dieu fait homme, qui m'a aimé et qui est mort pour moi.

Donc, mettez une belle pagaille! Prenez soin des extrémités du Peuple que sont les anciens et les jeunes! Ne vous laissez pas exclure, et n'excluez pas les anciens, et ensuite ne diluez pas la foi en Jésus-Christ.

Les Béatitudes! Que devons-nous faire, mon père? Regarde, lis les Béatitudes qui vont bien t'aller, et si tu veux savoir ce que tu dois faire concrètement, lis Matthieu 25, qui est le protocole selon lequel nous serons jugés. Avec ces deux choses vous avez votre programme d'action: les Béatitudes et Matthieu 25, pas besoin de lire quoi que ce soit d'autre. Je vous le demande de tout mon cœur!

Eh bien, je vous remercie de votre proximité, je suis désolé que vous soyez enfermés en cage, mais je veux vous dire une chose. Je sens par moments combien c'est moche d'être mis en cage! Je vous l'avoue de tout coeur! Mais bon ... je les comprends! ... J'aurais aimé être plus proche de vous, mais comprends que pour des raisons d'ordre, ce n'est pas possible.

Merci de votre proximité, merci de prier pour moi, je vous le demande de tout coeur, j'en ai besoin ! J'ai besoin de votre prière, j'en ai très besoin! Merci pour cela!

Eh bien, je vais vous donner la bénédiction, puis nous allons bénir la statue de la Vierge qui ira dans toute la République et la Croix de saint François, qui vont faire un parcours missionnaire.

Mais n'oubliez pas, mettez la pagaille! Prenez soin des deux extrémités de la vie, les deux extrémités de l'histoire des Peuples, qui sont les anciens et les jeunes! Et ne se diluez pas la foi!

 

François, Pape. 25 Juillet 2013, RIO de Janeiro

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Toute opinion est respectable... ?!?

30 Août 2013, 05:30am

Publié par Father Greg

 

Toute opinion est respectable...??

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— Pourvu qu'elles soient sincères, ajouta finement le marchand de poisson.

— Bien entendu, reprit avec bonhomie la patronne de la Corne d'Or, qui venait d'acheter un peu de marée en putréfaction pour ses pensionnaires. Moi, voyez-vous, je suis pour la liberté. Chacun pour soi et le bon Dieu pour tous.

— A la bonne heure ! Voilà qui est parlé. Alors, comme ça, vous ne voulez pas de mes moules ? Je vous les laisserai pour rien, histoire de les finir.

— Non, non, merci, je vais voir ma soupe que j'ai laissée sur le feu.

Et la digne hôtesse, qui paraissait, en effet, impatiente de rentrer, se remit en circulation aussi rapidement que le lui permettaient son embonpoint et le poids d'un filet énorme plein de provisions.

Mme Zola exploitait, depuis vingt ans, un hôtel meublé de dix-septième ordre, auquel s'annexait un restaurant fort à craindre. La Corne d'Or, située dans le voisinage du Val de Grâce, avait, en apparence, une clientèle de jeunes gens pauvres. Mais la location à l'heure, et même à la course, de presque toutes les chambres rémunérait agréablement la tenancière, qui eût été indignée et stupéfaite si on lui avait dit que sa maison était un bordel.

Elle avait été autrefois, du temps de la jeunesse de feu Vallès, une espèce de jolie femme qui avait échappé, disait-on, à la fusillade en se retroussant prodigieusement devant les soldats éblouis. Elle passait pour avoir joué, non sans virtuosité, du bidon à pétrole et de l'étoupe enflammée sous quelques balcons, dans les douces nuits de mai. C'était pour cette raison, sans doute, qu'elle voulait que toutes les opinions fussent respectées. Cela, elle y tenait absolument.

— Où est le petit cochon ? demanda-t-elle en arrivant.

— On l'a vu filer du côté de l'église, comme à l'ordinaire, il y a plus d'une heure et il n'est pas encore rentré, répondit Ferdinand, le garçon du lieu.

— Là ! J’en étais sûre ; Toujours l'église, toujours la messe, toujours son bon Dieu ! Ah ! zut à la fin ! J'ai bien envie de le flanquer à la porte, quand il reviendra.

Le petit cochon était un long bougre de trente cinq ans. Ruiné par des spéculations habiles, il vivait d'un humble emploi et, tenté par le prix modique, avait cru bien faire de prendre pension à la Corne d'Or. C'était un homme bien élevé, espèce de monstre à peu près inconnu des nouvelles générations, et qui, bientôt, ne sera plus rencontrable que chez quelques belluaires anglo-saxons. Il était même dévot, chose qui dépassait les moyens de Mme Zola et la bouleversait de fond en comble. Elle aurait pu rester tranquille, dira-t-on, s'installer dans l'indifférence. Eh ! bien, non, elle ne le pouvait pas. Elle avait le cœur pris, le cœur ravagé. Ce demi-siècle  avait rêvé de finir dans les bras de son pensionnaire.

L'héroïne de 71 avait espéré le saloir de ce dernier amour pour sa vieille viande. Voyant l'objet pauvre, silencieux et triste, et discernant en elle-même une consolatrice de première classe, elle s'était dit qu'il lui serait sans doute facile de s'emparer d'un malheureux. Puis, voilà que cette sacrée religion s'y opposait ; car il n'y avait pas d'illusion possible. Elle ne pourrait jamais marcher avec le bon Dieu, son commerce non plus et ce jésuite foutrait le camp aussitôt qu'il se verrait aimé par une jolie femme !

Précisément, ce matin, elle avait résolu de tenter une démarche concluante, analogue peut-être à celle qui avait autrefois désarmé les culottes rouges de Mac-Mahon. Et voilà que le misérable était allé faire ses dévotions, sans avoir l'air de se douter de rien. Il n'avait donc rien vu, rien compris ! Ah ! Parbleu ! Elle ne s'était pas jetée à son cou, elle ne s'était pas mise sur ses genoux, ce qui eût été décisif, au moins pour les vieilles chaises de la Corne d'Or, Mme Zola ne pesant pas loin de trois cents kilos. Mais les petites attentions dont il était l'objet, les chatteries, les mamours, les avances à peine dissimulées de chaque minute et renouvelées sans cesse, tant de regards et tant de sourires, tout n'aurait-il pas dû l'éclairer ?

Hélas ! Pleine de ces pensées  douloureuses, elle ouvrit machinalement une lettre que lui remettait un commissionnaire. « Très chère dame, disait ce message, veuillez confier au porteur la valise que vous trouverez dans ma chambre. Je vous quitte avec une douleur extrême, heureusement adoucie par l'espoir de rendre la paix à votre âme, en dérobant à vos yeux très purs l'excitante beauté de mon visage. O trop tendre et trop inflammable Zola, je vous respecte à l'égal d'une opinion, d'une de ces opinions innombrables, toujours vieilles et toujours si jeunes, que vous recommandâtes si souvent de respecter. Adieu donc, ô Émilie, dont l'image est indécrochable ment fixée dans mon cœur.

ALPHONSE ALLAIS, ex-pharmacien de 1ère classe».

— Sale calotin ! Vociféra la douce hôtesse qui ne croyait pas si bien dire. Il est sans exemple qu'une bourgeoise se soit trompée.

 

L.B, Exégèse des lieux communs.


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Le Confort intellectuel...

29 Août 2013, 05:53am

Publié par Father Greg

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 Au cours d’une promenade en forêt, M. Lepage m’entretint encore des mots et particulièrement des adjectifs dont le sens se relâchait tellement, disait-il, que les plus usuels seraient bientôt tous des synonymes. L’étaient déjà selon lui, la plupart de ceux qui nous servent, dans la conversation, à exprimer la valeur esthétique d’un objet. Ainsi des adjectifs : beau, joli, superbe, formidable, magnifique, épatant, étonnant, inouï, extraordinaire, etc…, sans compter les néologismes argotiques qu’affectionnent les bourgeois.


            « Quand vous voulez vous extasier sur un poème ou sur un tableau, vous pouvez employer indifféremment l’un quelconque de ces adjectifs. Et si vous le faites précéder de la particule très ou d’un adverbe, le résultat cherché est le même. Vous le savez comme moi, le superlatif absolu ne signifie plus rien. Si vous venez de voir un chef d’œuvre ou un ivrogne en train  de vomir dans le ruisseau, dites : joli ou tout à fait joli, ou quelle que soit l’expression employée, vous êtes sûr de vous faire entendre de vos interlocuteurs. Faire entendre quoi ? Direz-vous. Pas grand-chose. Il s’agit d’une vague émotion, la même pour le chef-d’œuvre que pour l’homme soûl, une émotion qu’un vocabulaire dégénéré et omnibus vous empêche de vous préciser à vous-même. Ces obscurs remuements dont on ne sait s’ils sont de la chair ou de l’esprit, nos élites bourgeoises n’en sont du reste pas peu fières, et il leur semblerait perdre beaucoup si elles y voyaient un peu clair. C’est justement pour que subsiste cette incertitude brumeuse, cette ignorance de soi-même, devenue un besoin et un opium, que tant de mots ont fini par perdre leur substance, tant d’adjectifs se gonfler de vent. Il importe avant tout de défendre et de perfectionner les habitudes de paresse d’esprit et les commodités de tout confondre, qui sont le résultat d’un siècle et demi de romantisme. Ce n’est pas en vain qu’une rhétorique vague et magnifique a célébré si longtemps, avec un égal enthousiasme, la beauté, la laideur, le chaotique, le bizarre, le monstrueux, pas en vain non plus que tant de poètes se sont défendus de contrôler leur inspiration.

 

A présent, les gens distingués qui hantent les vernissages et font les réputations littéraires et artistiques auraient honte de justifier leur préférences par des raisons et ils en sont du reste incapables la plupart du temps. Leur choix s’élabore dans une région de la sensibilité où l’intelligence n’a pas accès. Les impressions qui leur tiennent lieu de jugements sont si personnelles, si secrètes à eux-mêmes, et pour tout dire si incommunicables qu’elles n’ont pas besoin, pour s’exprimer, des ressources du langage. Au lieu de prononcer les mots formidables, inouïs et autres consacrés, l’amateur de peinture pourrait se contenter de pousser un rugissement. Ce serait encore suffisant pour traduire ce qu’il éprouve d’indéfinissable, d’impossible à situer et qui n’a à mes yeux pas plus d’importance, s’il n’apporte rien à l’esprit, qu’une démangeaison au doigt de pied. A force d’être personnelles, de telles impressions finissent d’ailleurs par devenir parfaitement impersonnelles. Du moment où tout le monde les traduit par les mêmes qualificatifs, on n’est pas fondé à croire qu’elles diffèrent d’un individu à l’autre. En fait notre bourgeoisie si cultivée se montre peu curieuse de comprendre et ne se soucie que de sentir. »

 

 

Marcel Aymé, Le Confort intellectuel.

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L’art ou l’appel à la Sagesse

28 Août 2013, 09:00am

Publié par Father Greg

L'art, hérauts des désirs du cœur de l’homme, prophète d'une terre promise ...

 

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« L’on recherche l’utilité dans la vie moderne : on s’efforce d’améliorer l’existence : la science invente tous les jours de nouveaux procédés pour alimenter, vêtir ou transporter les hommes : elle fabrique économiquement de mauvais produits frelatées : il est vrai qu’elle apporte aussi des perfectionnements réels à la satisfaction de nos tous besoins.

Mais l’esprit, mais la pensée, mais le rêve, il n’en est plus question. L’art est mort.

L’art c’est la contemplation. C’est le plaisir de l’esprit qui pénètre la nature et qui y devine l’esprit dont elle est elle-même animée. C’est la joie de l’intelligence qui voit clair dans l’univers et qui le recrée en l’illuminant de conscience. L’art, c’est la plus sublime mission de l’homme puisque c’est l’exercice de la pensée qui cherche à comprendre le monde et à le faire comprendre.


Mais aujourd’hui l’humanité croit pouvoir se passer d’art. Elle ne veut plus méditer, contempler, rêver : elle veut jouir physiquement. Les hautes et les profondes vérités lui sont indifférentes : il lui suffit de contenter ses appétits corporels. L’humanité présente est bestiale : elle n’a que faire des artistes.


L’art c’est encore le goût. C’est sur tous les objets que façonne un artiste, le reflet de son cœur. C’est le sourire de l’âme humaine sur la maison, sur le mobilier… Aujourd’hui, tout est laid, tout est fabriqué à la hâte et sans grâce par des machines stupides. Les artistes sont les ennemis. »

 

Auguste Rodin. L’art. 1911.

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"Un homme doit toujours garder en lui la capacité de s'opposer et de résister".

28 Août 2013, 08:36am

Publié par Father Greg

 

Helie"Avant de nous juger, j'aimerais que les jeunes générations sachent par quelles angoisses nous sommes passés lorsque nous avons compris que, dans le conflit algérien, le général De Gaulle utilisait comme des armes courantes le mensonge, la duplicité et le cynisme. Quelque chose de vital et de définitif s'est cassé en nous qui ne vivra plus jamais (...)


Ma génération n'a pas été en reste d'une trahison. Il fallait entendre, en 1958, les roulements de tambour des salons algérois à l'arrivée du général De Gaulle ! Les épaules galonnées rivalisaient d'ardeur en faveur de l'Algérie française absolue, intégrale et glorieuse. Frétillants, ils citaient par cœur des passages entiers des articles de Michel Debré, devenu Premier ministre, ces textes hallucinants d'inconséquence qui, je l'espère, le poursuivent encore dans la tombe. Notre cohorte de capitaines et de commandants, un peu en retrait, était dépassée par tout ce qu'Alger comptait d'ambitieux et de beaux parleurs. Pourtant, après la révolte de 1961, je n'ai rencontré aucun de ces jusqu'au-boutistes dans les coursives des prisons que j'ai fréquentées.



    Lorsque j'ai répondu oui au général Challe, acceptant d'entrer dans la rébellion, je n'avais pas prémédité cette décision. Mais c'était la dernière pièce d'une sorte de puzzle fait d'engagements. Aussi contestable qu'elle puisse paraître aux yeux de certains, elle correspond à une suite logique dans ma propre vie, que je n'ai pas à regretter. Un homme doit toujours garder en lui la capacité de s'opposer et de résister. Trop d'hommes agissent selon la direction du vent. Leurs actes disjoints, morcelés, n'ont plus aucun sens. J'aime la phrase de maître Eckhart : 
"Ce ne sont pas nos gestes qui nous sanctifient, mais nous qui sanctifions nos gestes." C'est là notre seule liberté.



   Helie denoix de St MarcAu fil des heures, nous avons vu avec inquiétude nos chefs s'épuiser au téléphone. La victoire éclair du premier matin était suivie de tractations et de négociations laborieuses. Les dernières heures à Alger furent tragiques. L'atmosphère semblait magnétique. Challe, Salan, Jouhaud, Zeller étaient écrasés dans de lourds fauteuils. L'euphorie était consumée. Une foule de cent mille Algérois était autour de nous, comme une houle qui pouvait d'une minute à l'autre nous engloutir. Je me demande encore comment nous avons passé ces heures de perdition sans une fusillade ou un massacre. Je me forçais à tenir mes troupes pour contrôler la tension. Dans le chaos que nous traversions, je voulais garder la tête haute, pour ceux dont j'avais la charge et pour les miens. Demain, si nous étions encore en vie, il fallait au moins ne pas avoir honte de nous-mêmes. J'ai jeté ma fatigue dans l'action en organisant notre repli vers Zéralda. Challe décida de se rendre pour répondre de ses actes. Il voulait me dissuader de rester, m'invitant à choisir la clandestinité et la fuite vers l'étranger. Il préférait payer seul. "Je vais être fusillé. Vous êtes trop jeune pour finir ainsi."


Trois solutions s'offraient à moi : une balle de revolver dans la bouche, la fuite dans la nature ou bien assumer mon action. Je n'ai pas voulu me dérober. Les responsabilités que j'avais prises étaient trop lourdes. J'ai voulu couvrir entièrement mes subordonnés. Ils avaient agi sur mes ordres. Je ne pouvais pas les laisser seuls face à la justice.


Je me souviens de la dernière nuit africaine, ma dernière nuit d'homme libre. Je revenais inlassablement sur l'enchaînement des évènements, qui m'avaient échappé. Après quatre nuits de fièvre, j'étais devenu "un félon", "un putschiste", "un amateur de pronunciamiento". En France, la rumeur publique et le clan des aboyeurs commençaient déjà à salir nos mobiles. Je  devinais que ce n'était qu'un début. Cette nuit de Zéralda était fraîche et pure. Je regardais la lumière des étoiles, partie du temps des premiers hommes, quelques millions d'années auparavant. A l'échelle du temps, notre passage n'était rien, nos efforts paraissaient vains. J'ai pensé à Don Quichotte, à cette foi qui va au-delà de la raison, à sa certitude que l'homme se mesure à ses rêves intérieurs".

 

+ Hélie Denoix de Saint-Marc.

 

 

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Peut-on Le nommer ?

27 Août 2013, 21:00pm

Publié par Fr Greg.

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Ne parlons pas de Dieu. Nous ne dirions que des bêtises. Laissons le plutôt parler de lui, à sa manière étrange. Il se sert des roses, des catastrophes des nuits d’été. Il se sert de tout. J’ai vu un punk, invité à manger, proposer de faire la vaisselle : un ange avec un collier de cadenas et une mèche iroquoise. Dieu se sert aussi des livres. Si nous ne mourons pas tout de suite à notre naissance, c’est parce qu’une présence silencieuse vient à notre secours. C’est ce genre de présence que nous recherchons en ouvrant un livre. Les vraies phrases se détachent de leur auteur, volent dans la nuit qu’elles éclairent. Géronimo a mal au dos est un livre de Guy Goffette. Une vision sortie d’une de ses pages flotte depuis quelques mois dans mon cerveau : une salle à manger chez les pauvres. Elle brille mieux qu’un meuble passé à la cire surnaturelle par Vermeer. Cette salle est si propre qu’on a interdiction d’y entrer toute l’année. Elle est en souffrance. Belle, parfumée à la cire, lumineuse. Et en souffrance. Elle ne sert qu’une fois, pour la mort du père. On met le corps dans cette salle. La pensée de cette pièce vide me bouleverse. 

Allez savoir pourquoi. Peut-être cet espace ébloui, vierge de toute poussière sentimentale, est-il une image juste de notre cœur ? Le ménage, c’est une affaire d’anges, n’est-ce pas. Il y a deux sortes d’anges dans nos villes, les femmes de ménage et les éboueurs. Invisibles comme il se doit. Le monde se plaît à maltraiter ses anges. Une salle claire, avec au milieu une longue table de bois, et sur la table un mort impérial (tous les morts deviennent rois de Naples) : cette image insiste, revient, survit à ma lecture. Peut-être parle-t-elle de l’éternel à sa façon ? Il y a dans notre cœur un espace si pur que nous n’y entrons jamais. C’est d’ailleurs ce qui nous sauve : le meilleur de nous est hors de notre portée. Et en même temps si proche. Depuis 60 ans, un poème inédit de André Dhotel fait son travail de chuchoteur. Il est écrit au crayon sur la porte du grenier d’une maison de Mont-de-Jeux, dans les Ardennes. Dhotel y passait les vacances d’été. Le poème parle de la guerre. Pour le protéger, on l’a mis sous une vitre encadrée par une baguette de bois. Le texte est comme son auteur, sans prétention. On devrait toujours se méfier des humbles. En un seul mot ils délivrent toutes les forces du ciel, et c’est un déluge de bleu sur la vie. Le grenier de cette maison ardennaise protège une des plus belles prières jamais écrite, une supplique à Dieu distrait. Un corps dans une pièce si pauvre que le soleil est flatté d’y entrer, un poème oublié dans une maison de Mont-de-Jeux : il n’y a que la mort et la beauté pour entrer dans les lieux fermés du cœur. Le poème avance en boitant vers sa fin. J’ai sursauté en découvrant les derniers mots : une déflagration de douceur. Le lecteur invente son livre, le croyant invente son Dieu : « Seigneur, ne partez pas sans laisser d’adresse et ressuscitez d’abord les enfants »

Christian Bobin.

 

http://www.lemondedesreligions.fr/chroniques/regions/un-deluge-de-bleu-01-09-2013-3317_164.php

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Le loin-près...

25 Août 2013, 03:31am

Publié par Fr Greg.

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..Ce nom que toutes les femmes pourraient donner à leur mari : le loin-près.

Ni jamais là, ni jamais ailleurs, ni jamais absent, ni vraiment présent !

 

La douleur est dans la vie des femmes comme un chat qui se faufile entre leurs jambes quand elles repassent le linge, refont les lits, ouvrent les fenêtres, épluchent une pomme. Un chat qui parfois leur prend le cœur, l’envoie rouler à plusieurs mètres, le reprend dans ses griffes, en joue comme d’une souris mourante. Ce chat est dans la vie des femmes même quand il les laisse en paix. Elles savent qu’il est là, dans un coin. Elles ne l’oublient jamais. Jusque dans la joie elles l’entendent respirer, comme on perçoit le chant d’une source sous tous les bruits de la forêt.

 

Les hommes ne laissent pas la souffrance séjourner en eux. A peine l’ont-ils devinée qu’ils l’expulsent en violence, en colère, en travaux… »

 

Christian Bobin. Le Très-bas.

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Vie de l’art

23 Août 2013, 15:32pm

Publié par Fr Greg.

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Un artiste, voyez-vous, il n’y a ni gloire ni ambition qui compte pour lui. Il doit faire son œuvre parce que le bon Dieu le veut, comme un amandier fait sa fleur... comme l’escargot fait sa bave.

 

La nature vue, la nature sentie, celle qui est là (il montrait la plaine verte et bleue), celle qui est ici (il se frappait le front) qui toutes deux doivent s’amalgamer pour durer, pour vivre d’une vie moitié humaine, moitié divine, la vie de l’art, écoutez un peu... la vie de Dieu.

 

Je veux, moi, me perdre en la nature, repousser avec elle, comme elle, avoir les tons têtus des rocs, l’obstination rationnelle du mont, la fluidité de l’air, la chaleur du soleil. Dans un vert, mon cerveau tout entier coulera avec le flot séveux de l’arbre. Il y a devant nous un grand être de lumière et d’amour, l’univers vacillant, l’hésitation des choses. Je serai leur olympe, je serai leur dieu. L’idéal au ciel s’épousera en moi. Les couleurs, écoutez un peu, sont la chair éclatante des idées de Dieu. La transparence du mystère, l’irisation des lois.

 

Les artistes, aux vieux temps, étaient les maîtres d’enseignement de la foule. Tenez, vous voyez Notre-Dame là-bas. La création et l’histoire du monde, les dogmes, les vertus, la vie des saints, les arts et les métiers, tout ce qu’on savait alors était enseigné par son porche et ses vitraux. Comme dans toutes les cathédrales de France, d’ailleurs. Le moyen âge apprenait sa foi par les yeux, comme la mère de Villon... le paradis où sont harpes et luths.

 

C’était la vraie science, et c’est tout l’art religieux. Ce que l’abbé Tardif, votre ami, dit qu’on trouve dans saint Thomas, le peuple le cherchait dans les statues du portail, à son église. Cet ordre, cette hiérarchie, cette philosophie, allez, ça valait la Somme et pour nous c’est plus vrai, puisque c’est plus beau et que nous le comprenons encore sans efforts.

 

Paul CÉZANNE.

Propos rapportés par Joachim GASQUET dans Cézanne.

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Contemplations

21 Août 2013, 14:22pm

Publié par Fr Greg.

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Tu peux, comme il te plaît, me faire jeune ou vieux.

Comme le soleil fait serein ou pluvieux

L'azur dont il est l'âme et que sa clarté dore,

Tu peux m'emplir de brume ou m'inonder d'aurore.

Du haut de ta splendeur, si pure qu'en ses plis,

Tu sembles une femme enfermée en un lys,

Et qu'à d'autres moments, l'oeil qu'éblouit ton âme

Croit voir, en te voyant, un lys dans une femme.

Si tu m'as souri, Dieu! tout mon être bondit!

Si, Madame, au milieu de tous, vous m'avez dit,

A haute voix: «Bonjour, Monsieur», et bas: «Je t'aime!»

Si tu m'as caressé de ton regard suprême,

Je vis! je suis léger, je suis fier, je suis grand;

Ta prunelle m'éclaire en me transfigurant;

J'ai le reflet charmant des yeux dont tu m'accueilles;

Comme on sent dans un bois des ailes sous les feuilles,

On sent de la gaîté sous chacun de mes mots;

Je cours, je vais, je ris; plus d'ennuis, plus de maux;

Et je chante, et voilà sur mon front la jeunesse!

Mais que ton coeur injuste, un jour, me méconnaisse;

Qu'il me faille porter en moi, jusqu'à demain,

L'énigme de ta main retirée à ma main;

-- Qu'ai-je fait? qu'avait-elle? Elle avait quelque chose.

Pourquoi, dans la rumeur du salon où l'on cause,

Personne n'entendant, me disait-elle vous? --

Si je ne sais quel froid dans ton regard si doux

A passé comme passe au ciel une nuée,

Je sens mon âme en moi toute diminuée;

Je m'en vais, courbé, las, sombre comme un aïeul;

Il semble que sur moi, secouant son linceul,

Se soit soudain penché le noir vieillard Décembre;

Comme un loup dans son trou, je rentre dans ma chambre;

Le chagrin -- âge et deuil, hélas! ont le même air, --

Assombrit chaque trait de mon visage amer,

Et m'y creuse une ride avec sa main pesante.

Joyeux, j'ai vingt-cinq ans; triste, j'en ai soixante.

 

Victor Hugo "Contemplations"

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Pour approcher la douceur, il faut faire un travail de guerrier  !

20 Août 2013, 10:45am

Publié par Fr Greg.

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      Puissance de la douceur (1), écrit par cette philosophe et psychanalyste, est une incitation à la sérénité. Ou comment, de nos tempêtes et tourments, naît une extraordinaire force de vie.

- L’époque proclame volontiers « Sois doux avec toi-même ! » plutôt que « Sois doux avec les autres ! ». Pourquoi ?

Anne Dufourmantelle - Parce que notre époque redécouvre la douceur… pile à l’endroit où elle peut la pervertir. Nous vivons dans une grande arène où il faut d’abord être performant, faire face à des « Tu dois ! » de tout ordre, qui créent des corps retranchés. Des corps qui manquent d’espace et qui ne se touchent presque plus. Le « Sois doux avec toi-même » a ceci de pervers qu’il méconnaît le fait qu’on n’y est pas prêt du tout ! Pour approcher la douceur, il faut d’abord prendre conscience de la sauvagerie en place. Et faire un travail de guerrier pour dénicher ce qui fait rage, en nous comme hors de nous. Cela demande du discernement, un rapport à la vérité, à l’absolu, de l’intransigeance. C’est très exigeant.

Comment s’en rapproche-t-on ?

Être doux, c’est arriver à être compréhensif envers soi. Admettre sa vulnérabilité. S’accompagner dans ce qu’on veut être. C’est un choix : on fait acte de douceur. Le mot comprend une part de spirituel et de charnel. C’est pourquoi il est tellement passionnant.

La douceur, selon vous, n’offre aucune prise au pouvoir. Est-ce rassurant ?

Longtemps, on a associé la douceur à des valeurs dites féminines : l’écoute, la compréhension, la compassion, etc., parce qu’on l’avait reliée à la maternité. Puis on l’a mise du côté de la mollesse, de la compromission. À tort. Elle peut être un compromis, oui, car elle est évidemment du côté du participatif, de l’altérité. La douceur n’a de sens que si elle s’éprouve, se donne, se distille. Mutualisée, elle offre une force prodigieuse. Elle recèle un pouvoir de transformation sur les êtres et les choses. Mais elle provoque aussi de la violence, car effectivement elle n’offre aucune prise possible au pouvoir.

Elle est en quelque sorte l’extrême pointe sublimée de la violence. Elle peut aller de pair avec un refus, et une grande fidélité à soi. Une confiance qui devient bel et bien une puissance inaliénable. La douceur est chrysalide, en ce sens qu’elle accouche d’un nouvel élan vital. C’est un aboutissement, pas un sacrifice. On peut dire qu’elle est politique.

Est-elle forcément éphémère, ou se peut-il que la douceur… dure ?

Peut-on s’établir dans la douceur ? Gandhi l’a fait, au prix de quels efforts… La douceur est un état d’être qui relève de l’expérience. Cela peut être une proposition éducative. Il faut être attentif, car aujourd’hui on déguise le manque criant de douceur par un vocabulaire doucereux. Ce qui nous manque en réalité est un espace de tendresse non productif. Je crois que la douceur porte la vie, la sauve et l’accroît. 

(1) Chez Payot, le 21 août.

http://madame.lefigaro.fr/societe/pour-approcher-douceur-faut-faire-travail-de-guerrier-170813-442966

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Remerciements à une élue engagée

19 Août 2013, 20:07pm

Publié par Fr Greg.

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Rapide portrait de Mme Hakima AIT EL KHADI , Adjointe au Maire d'Avignon,  extrait tiré du documentaire de Marie Mittérand le Bonheur au féminin conjuguée par des femmes engagée d'une façon ou d'une autre dans la vie civile ou politique. 

 

Hakima Ait El Kadhi est la seule élue qui s'est déplacée lors de l'agression du 13 mai dernier et qui manifeste par ses actes, un réel engagement social vis à vis de ceux qui voudraient se réfugier dans des réactions extrêmes ou qui souffrent de ne pouvoir se faire entendre.

 

 

 

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Réseaux sociaux ou l'angoisse des possibles infinis...

19 Août 2013, 10:25am

Publié par Fr Greg.

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FOMO est l’acronyme de Fear Of Missing Out. En français : la peur de rater quelque chose. Samedi, faut-il mieux fêter les 50 ans de Tatie ou les 30 de Matthieu ? Aller à ce vernissage ou à ce concert ? Ces petits dilemmes n’ont rien de nouveau. Sauf qu’avec les réseaux sociaux, ils se démultiplient enlive sur nos écrans, au point de générer une véritable angoisse. C’est grave ?

Postée il y a moins de trois minutes sur votre mur, une photo de vos amies Sarah et Marion, assises à la terrasse de votre Q.G., un verre de chardonnay à la main. Vous crevez d’envie de les rejoindre : Sarah rentre de vacances, il est certain que ça va papoter et vous risquez de passer à côté d’un scoop. Mais aujourd’hui, c’est la soirée de rentrée du boulot, tous vos collègues y seront et vous avez confirmé avant-hier. Quoi que vous décidiez de faire, vous allez manquer quelque chose. Et cela vous agace prodigieusement ! Ce sentiment déplaisant est le nouveau mal du moment, il porte même un nom : FOMO. Encore peu utilisé en France, c'était le "mot du jour" le 14 avril dernier dans le Urban dictionnary, la bible du nouveau vocabulaire alimentée chaque jour par des internautes du monde entier. Sûr, le terme FOMO sonne bien, mais correspond-il à un réel syndrome ? Nous en avons parlé avec deux spécialistes.

Alain Dervaux est psychiatre à l’hôpital Sainte Anne, à Paris. Il travaille notamment sur les addictions au virtuel. « Aujourd’hui, personne ne se présente en consultation en se plaignant de FOMO, tient-il à préciser. Ce terme utilisé dans les médias anglo-saxons désigne une angoisse spécifique, mais qui n’est pas médicalisée. » 

Cette peur est induite par les réseaux sociaux, toujours prompts à nous proposer plus d’événements, plus d’occasions, plus d’informations. Et ce qu'elle révèle en premier lieu, c'est que cette multiplicité des possibles pourrait remettre en question notre capacité à faire des choix.

Deux théories co-existent quant au fondement de ce syndrome : d’un côté LE FOMO serait la simple conséquence d’une addiction à Internet, de l’autre il relèverait de la compulsion. C’est cette dernière thèse que défend le psychologue et psychothérapeute Jean-Charles Nayebi (1), qui traduit le sigle par « anxiété de ratage ». « C’est une envie irrépressible de se connecter à des réseaux pour savoir ce qu’il s’y passe, pour ne pas rater un événement ou laisser échapper une information intéressante. »

 

A trop se poser la question du choix, on pourrait bien ne plus savoir quoi en faire

Mais en quoi est-ce grave ? « Nous ne sommes pas égaux face à ces situations, certaines personnes sont plus vulnérables que d’autres, répond Alain Dervaux. Cela devient un problème si la personne ou son entourage en souffre.» 

Car à trop se poser la question du choix, on pourrait bien ne plus savoir en faire. Et, finalement, n’aller ni au vernissage, ni au concert, ni au débriefing des vacances de Sarah, mais rester à guetter son écran au cas où une meilleure option se profilerait ? « Nous sommes immatures par rapport à la technologie, constate Jean-Charles Nayebi. Comme nous n’avons pas encore de culture suffisante pour l’appréhender, nous tombons parfois dans l’excès. » Alors, pour ne pas céder au méchant FOMO, rappelons-nous qu'autrefois, quand on avait « l’embarras du choix », c’était plutôt une bonne nouvelle.


(1) Auteur de Cyberdépendance en 60 questions, Ed. Retz, 2007.

http://madame.lefigaro.fr/societe/fomo-vrai-mal-130911-172900

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Solitude

18 Août 2013, 14:09pm

Publié par Fr Greg.

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« Une vie dans laquelle il n’y a pas de solitude est une vie sans force et sans intérêt. En somme, la solitude est le lieu le moins solitaire qui soit, puisque la vitalité de notre être la peuple immédiatement, si bien qu’on peut dire qu’une vie dans laquelle il n’y a pas de solitude est la plus solitaire au monde. C’est dans la solitude que les idées prennent possession de nous. Il faudrait se figurer les idées non comme passives et capables d’être examinées puis laissées de côté, mais comme très actives et nous épiant, prêtes à tout moment à bondir sur nous et nous asservir à elles. »

 

Julien Green, On est si sérieux quand on a 19 ans, Journal 1919-1924

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