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QUE CHERCHEZ-VOUS ?

Sand men

30 Juin 2018, 01:04am

Publié par Grégoire.

Sand men

Neculai, Aurel et Raj ont tous quitté leurs maisons en Roumanie pour la même raison - chercher une vie meilleure pour leur famille. Maintenant, en Grande-Bretagne, avec leurs proches qui dépendent d'eux, ils survivent en créant des sculptures de sable dans les rues de Londres. Ils essaient de trouver l'espoir dans les épreuves qu'ils endurent, tandis que les pensées sur l'avenir de leurs enfants les aident à continuer.

 

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L'autre : ce qui n'est pas moi, que je n'ai pas fait, qui n'est pas dans mon prolongement...

28 Juin 2018, 00:55am

Publié par Grégoire.

L'autre : ce qui n'est pas moi, que je n'ai pas fait, qui n'est pas dans mon prolongement...

Aimer,

Faire sans cesse l'effort de penser à qui est devant toi,

lui porter une attention réelle, soutenue, ne pas oublier une seconde

que celui ou celle avec qui tu parles vient d'ailleurs, que ses goûts, ses pensées et ses gestes ont été façonnés par une longue histoire, peuplée de beaucoup de choses et d'autres gens que tu ne connaîtras jamais.

Te rappeler sans arrêt que celui ou celle que tu regardes ne te doit rien, ce n’est pas une partie de ton monde, il n’y a personne dans ton monde, pas même toi.

Cet exercice mental - qui mobilise la pensée et aussi l’imagination –

Est un peu austère, mais il te conduit à la plus grande jouissance qui soit : aimer celui ou celle qui est devant toi, l'aimer d'être ce qu'il est, une énigme.

Et non pas d'être ce que tu crois, ce que tu crains, ce que tu espères, ce que tu attends, ce que tu cherches, ce que tu veux. »

Christian Bobin, Autoportrait au radiateur.

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Silence...

26 Juin 2018, 00:27am

Publié par Grégoire.

Silence...
 
Si nous nous méfions tant du silence et nous ingénions à le combler par toutes sortes de bruitages, dont le langage alors réduit à du bavardage, aussi raffiné puisse-t-il être en apparence, c’est parce que nous sentons qu’il recèle un pouvoir singulier, inquiétant : celui de nous dévoiler, à nous-mêmes et aux autres, dans notre fragilité.
Le silence nous dépouille, il nous « simplifie », il nous éclaire furtivement de l’intérieur en nous reconduisant à notre seul souffle, et à celui des autres, nos interlocuteurs mis pareillement à nu par l’éclosion d’un silence imprévu. Le souffle : pure expression de vie, signature à la fois si délicate et si pénétrante, infime et bouleversante, de la présence d’un vivant. Comme la lumière, il frémit à la lisière de la matière et de l’immatériel, entre mystère et merveille. Le souffle des vivants, en écho à celui du Vivant, en lien organique avec lui, qui est sa source. Dieu : un souffle, une voix du fin silence – ainsi se révéla-t-il à Élie au mont Horeb. Mais Élie n’aurait pas pu le percevoir, ce soupir très ténu, s’il n’avait pas au préalable fait taire les bruits autour de lui, et surtout les tumultes tapis en lui, grondant au fond de lui.
 
Ce n’est pas par voie de « puissance » que son Seigneur, précisément, va se manifester à lui, tout au contraire, c’est en finesse, en douceur, dans un ténu bruissement de silence, lui signifiant ainsi qu’il préfère un cœur humble et attentif à un cœur trop ardent et guerrier.
 
Sylvie Germain

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La sagesse, ce n'est pas de vouloir ce qu'on aime, mais d'aimer ce qu'on a....

24 Juin 2018, 00:21am

Publié par Grégoire.

Claude Rich (Panoramix) : "C'est une bonne situation, ça, scribe ?"

Edouard Baer (Otis) : "Mais, vous savez, moi je ne crois pas qu'il y ait de bonne ou de mauvaise situation. Moi, si je devais résumer ma vie aujourd'hui avec vous, je dirais que c'est d'abord des rencontres, des gens qui m'ont tendu la main, peut-être à un moment où je ne pouvais pas, où j'étais seul chez moi. Et c'est assez curieux de se dire que les hasards, les rencontres forgent une destinée...

Parce que quand on a le goût de la chose, quand on a le goût de la chose bien faite, le beau geste, parfois on ne trouve pas l'interlocuteur en face, je dirais, le miroir qui vous aide à avancer. Alors ce n'est pas mon cas, comme je le disais là, puisque moi au contraire, j'ai pu ; et je dis merci à la vie, je lui dis merci, je chante la vie, je danse la vie... Je ne suis qu'amour !

Et finalement, quand beaucoup de gens aujourd'hui me disent "Mais comment fais-tu pour avoir cette humanité ?", eh ben je leur réponds très simplement, je leur dis que c'est ce goût de l'amour, ce goût donc qui m'a poussé aujourd'hui à entreprendre une construction mécanique, mais demain, qui sait, peut-être seulement à me mettre au service de la communauté, à faire le don, le don de soi..."

 

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Swamiji, un voyage intérieur.

22 Juin 2018, 00:30am

Publié par Grégoire.

Seul est libre celui qui n'a plus rien, qui n'attend rien, qui ne cherche rien à atteindre...

Seul est libre celui qui n'a plus rien, qui n'attend rien, qui ne cherche rien à atteindre...

Demeurer dans le silence total des sens et du mental, et rester simplement là… Telle est ma seule vocation. So’ham, je suis Cela ! Il n’y a rien au-delà. Chercher refuge là, et seulement là…

— Swami Ajatananda Saraswati

En 1948, a trente-huit ans, Henri Le Saux, moine de l'abbaye bénédictine de Kergonan rejoint, dans le sud de l'Inde, le père Monchanin. Ils fondent un ermitage, un ashram (Shantivanam) appelé dans leur esprit à devenir le lieu d'une rencontre entre le christianisme et les grands courants mystique de l'Inde. Mais Henri Le Saux s'éloigne peu à peu de l'ashram pour répondre à un appel intérieur plus radical qui le conduit vers l'Himalaya et les sources du Gange.

En février 1998, j'ai eu la chance de vivre quelque temps dans la hutte du Père Le Saux, devant ce large fleuve asséché durant cette période de l'année. De sa vie et a travers l'obscur du quotidien, il a fait de lui-même un pont entre les religions de l'Inde et la révélation du Christ.

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Quand l’âme n’a plus rien que Dieu...

20 Juin 2018, 02:00am

Publié par Grégoire.

Quand l’âme n’a plus rien que Dieu, quand elle n’a plus de vouloir que Sa volonté simple, qu’elle est anéantie et veut tout ce que Dieu veut avec Sa volonté, quand elle est engloutie et réduite à rien [...] l’âme devient avec Lui totalement cela même qu’Il est. (Lettre XIX)

Quand l’âme n’a plus rien que Dieu, quand elle n’a plus de vouloir que Sa volonté simple, qu’elle est anéantie et veut tout ce que Dieu veut avec Sa volonté, quand elle est engloutie et réduite à rien [...] l’âme devient avec Lui totalement cela même qu’Il est. (Lettre XIX)

Ce que l’Amour a de plus doux, ce sont ses violences; son abîme insondable est sa forme la plus belle; se perdre en lui, c’est atteindre le but; être affamé de lui c’est se nourrir et se délecter; l’inquiétude d’amour est un état sûr; sa blessure la plus grave est un baume souverain; languir de lui est notre vigueur; c’est en s’éclipsant qu’il se fait découvrir; s’il fait souffrir, il donne pure santé ; s’il se cache, il nous dévoile ses secrets ; c’est en se refusant qu’il se livre ; il est sans rime ni raison et c’est sa poésie ; en nous captivant il nous libère ; ses coups les plus durs sont ses plus douces consolations; s’il nous prend tout, quel bénéfice ! c’est lorsqu’il s’en va qu’il nous est le plus proche ; son silence le plus profond est son chant le plus haut; sa pire colère est sa plus gracieuse récompense ; sa menace nous rassure et sa tristesse console de tous les chagrins : ne rien avoir, c’est sa richesse inépuisable.

Mais de l'amour on peut dire aussi que sa plus haute assurance nous fait faire naufrage, et son état le plus sublime nous coule à fond; son opulence nous appauvrit et ses bienfaits sont nos malheurs; ses consolations agrandissent nos blessures; son commerce est mainte fois mortel; sa nourriture est famine, sa science égarement; son école nous apprend à nous perdre; son amitié est cruelle et violente; c'est quand il nous est fidèle qu'il nous fuit, sa manifestation consiste à se cacher sans laisser de traces et ses dons, à nous voler encore davantage; ses promesses sont séductrices, sa parure nous dénude, sa vérité nous déçoit et son assurance est mensonge.

Voilà le témoignage que moi-même et bien d'autres nous pouvons porter à toute heure, à qui l'amour a souvent montré des merveilles, dont nous reçûmes dérision, ayant cru tenir ce qu'il gardait pour lui. Depuis qu'il m'a joué ces tours et que j'ai appris à connaître ses façons, je me comporte toute autrement avec lui : ses menaces, ses promesses, tout cela ne me trompe plus : je le veux tel qu'il est, peu importe qu'il soit doux ou cruel, ce m'est tout un. "

Hadewijch d’Anvers, Poèmes spirituels.

 

 

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éloge du désir

18 Juin 2018, 02:46am

Publié par Grégoire.

éloge du désir

À la terrasse d'un café de l'île Saint-Louis, je rêve en regardant les passants défiler sous les nuages dans un automne trop doux. Vers où marchent-ils ? Vers la réalisation d'un désir. Plus ou moins essentiel. Mais c'est lui qui les anime, les aide à se lever quand l'hiver vient ; leur donne la force de rire quand la menace est partout ; leur donne le courage de ne pas se laisser éteindre. Savent-ils au fond qu'ils sont portés par un mystère ? Par une flamme invisible mais bien réelle qui les aide à tenir debout dans les drames, à danser dans la joie. Et si le but de notre existence était de nous fondre dans cet élan originel, de comprendre notre grand désir et de lui donner notre vie ? Alors on ne marcherait pas uniquement seul sous un ciel triste, mais on avancerait vers notre rêve. Même les moments les plus insignifiants seraient portés par ce rêve, notre mission sur terre. Quand le regard change, tout change. Se tourner vers un désir essentiel, c'est transformer son regard. Avoir une autre vie. Même si rien ne bouge.

 

Blanche de Richemont, éloge du désir.

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à l'écart

15 Juin 2018, 23:32pm

Publié par Grégoire.

"Quand je lui ai demandé ce qu’était une ermite, elle m’a dit "une ermite, c’est rien". Françoise vit seule depuis plus de quarante ans dans une forêt du Sud de la France. Elle a accepté que je vienne la voir régulièrement pendant un an et demi avec ma caméra." (Victoria Darves-Bornoz)

"Quand je lui ai demandé ce qu’était une ermite, elle m’a dit "une ermite, c’est rien". Françoise vit seule depuis plus de quarante ans dans une forêt du Sud de la France. Elle a accepté que je vienne la voir régulièrement pendant un an et demi avec ma caméra." (Victoria Darves-Bornoz)

Il y a quelques années, j'étais journaliste et travaillais dans une chaîne de télévision d'information en continu. Des nouvelles du monde entier passaient chaque seconde devant mes yeux, de jour comme de nuit, au tamis d'un ordinateur qui affichait les dernières dépêches AFP et Reuters. Je ressentais à cette place-là une solitude extrême. Supposément au coeur des événements de ce monde, je me sentais habitée par un vide que je n'arrivais pas à apprivoiser. J'ai quitté le journalisme. C'est dans ces circonstances que j'ai rencontré Françoise, femme ermite dans une forêt d'Ardèche, inspirée par la pensée de Maître Eckhart. Contrairement à moi, Françoise semblait rechercher volontairement une forme de vide. Elle en faisait une pratique spirituelle qui m'apparaissait radicale. Pour répondre à mes questions, j'ai pu faire un film de cette rencontre, à la recherche des rythmes quotidiens, d'une chorégraphie personnelle, des traces visibles de la transformation du vide en plein.

un film de Victoria Darvez-Bornoz.

Une coproduction ABACARIS FILMS/KTO, 2014. 

Mention spéciale du jury au festival 2015 Les Écrans du réel, Le Mans.

 

 

à l'écart

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La révolution philanthropique est en marche

14 Juin 2018, 00:49am

Publié par Grégoire.

La révolution philanthropique est en marche

Le serial entrepreneur Alexandre Mars, autoproclamé «activiste du bien social», croit fermement en l’avènement d’une nouvelle ère où le partage deviendrait la norme. Explications 

Pour Alexandre Mars, il ne fait aucun doute: le XXIe siècle sera social ou ne sera pas. Ce quadragénaire français, devenu millionnaire après avoir créé et revendu de nombreuses entreprises aux Etats-Unis, se consacre aujourd’hui pleinement à sa start-up philanthropique baptisée Epic. Il en est convaincu, «la révolution du partage» est en marche, pour reprendre le titre de l’ouvrage qu’il publie aujourd’hui pour donner encore plus de voix à son combat olympien pour une plus grande justice sociale. Chimérique? Interview.

Le Temps: Votre mouvement s’est donné pour mission de faire le lien entre donateurs et associations de terrain, est-ce à dire qu’il y a plus de volonté philanthropique qu’on ne le pense?

Alexandre Mars: On voit une évolution réelle ces dernières années, une volonté, une quête de sens de plus en plus partagée. On ne parle pas d’un nombre limité de philanthropes, mais on s’est rendu compte que de nombreuses personnes aimeraient en faire plus, mais avaient de vraies barrières pour le faire. La première difficulté que l’on a pu observer, c’est que la plupart des gens ne savent pas comment s’y prendre concrètement. Ils ne savent pas quelle organisation choisir, et où les fonds iront exactement. Parfois aussi, ils n’ont pas totalement confiance. On a créé Epic pour les accompagner précisément dans leur démarche, parce que la volonté est là aujourd’hui.

Pour vous, cette nouvelle donne est une affaire de génération. En quoi les «millennials» sont-ils différents sur ces questions?

Les générations précédentes s’intéressaient avant tout au «moi», à ses propres objectifs, à sa carrière, toutes ces choses qui relevaient de notre nombril, de notre vision personnelle. Et puis la génération qui arrive veut clairement inscrire son histoire dans une optique plus large, elle a d’autres rêves, d’autres ambitions. Aujourd’hui, c’est une génération entière qui ne veut plus uniquement voir le succès à travers le nombre de zéros qu’elle aura sur son compte en banque, mais souhaite participer, être active pour une meilleure justice sociale. C’est très nouveau.

Mais d’où viendrait ce changement subit de mentalité?

Pour être franc, je n’ai pas la réponse exacte. Mais ce qui est sûr, c’est que cela a à voir avec ce que nous voyons tous les jours, toutes ces inégalités que nous ne pouvons plus ignorer. Pour ma génération, il y a dix ou vingt ans, la pauvreté, c’était quelque chose de bien lointain, en Afrique ou ailleurs. La télévision était le seul support pour voir cette misère. Aujourd’hui, la pauvreté est arrivée au bas de nos immeubles, elle est là continuellement. Il n’y a quasiment pas une ville où l’on n’observe pas cette misère sociale. De plus, ces jeunes générations ne se contentent plus non plus des médias, elles vont chercher l’information, voir des choses que le grand public ne voit pas forcément. Cela les façonne. Ils sont alors de plus en plus nombreux à ne plus vouloir accepter cet état de fait.

Mais quel peut être l’impact réel de cette prise de conscience sur la société?

Je pense que ces jeunes de moins de 30 ans vont pousser beaucoup de gens, leurs parents, mais aussi leurs employeurs, à penser différemment. Chacun peut agir. En exigeant de travailler dans une entreprise qui fait sens, ou en refusant de consommer des produits d’une marque qui ne fait qu’exploiter la misère sociale au lieu de contribuer à l’éradiquer.

N’est-ce pas un peu utopique?

Non, parce qu’il y a des solutions concrètes et totalement indolores qui peuvent très simplement être mises en place. Nous voulons que le don devienne la norme, qu’il devienne simple et systématique, qu’on ait l’option de donner au moins une fois par jour. Je pense notamment à l’arrondi en caisse (au supermarché, au cinéma, etc.) ou sur salaire. Le don doit être l’affaire de tout le monde, et pas simplement d’un nombre limité de riches philanthropes. Les dirigeants de L’Oréal France, par exemple, viennent de proposer à tous leurs salariés de donner l’arrondi sur leur salaire, soit les petits centimes après la virgule sur leur feuille de paie. Et l’employeur abonde à chaque fois. Tout le monde au sein de l’entreprise est alors engagé dans une vision collective. Et la chose intéressante, c’est qu’ils peuvent voter pour choisir l’organisation sociale qu’ils souhaitent soutenir. Un vote universel, où la personne au bas de l’échelle aura la même voix que le grand patron.

Pour vous, justement, le changement doit venir du monde des entreprises. Pourtant, business et charité ne semblent pas vraiment liés…

Vous avez raison si on regarde le monde d’hier. La différence majeure aujourd’hui, c’est que si les entreprises ne font que des profits sans intégrer ces sujets de justice sociale, elles vont avoir de plus en plus de difficulté pour embaucher. Nous, on le voit aujourd’hui, la deuxième question qu’on pose dans un entretien d’embauche, chez Nestlé ou ailleurs, ce n’est plus la taille du bureau ou est-ce que mon bureau donne sur le lac ou la rue. Ça, c’étaient les questions autocentrées d’avant. La nouvelle question de la génération d’aujourd’hui, celle en tout cas qui peut se permettre de choisir son boulot, ce sera plutôt: «Quelle est votre action sociale?» Et si la réponse ne va pas dans le même sens que ce qu’espère cette génération, elle n’ira pas bosser pour eux. Et à terme, elle n’achètera plus leurs produits. Parce que c’est sa manière d’être activiste.

A vos yeux, le partage n’est plus seulement une question de solidarité, mais vous écrivez «notre seule voie de salut»; en quoi y aurait-il urgence?

Parce que nous ne pouvons pas continuer ainsi. A un moment ou un autre, les réserves que nous avions vont vraiment s’arrêter. D’ici à 2025, 50% des emplois qui existent aujourd’hui n’existeront plus, cela signifie que les problèmes que nous avons aujourd’hui ne risquent pas de s’atténuer. Il y a de plus en plus de gens qui vont être laissés sur le bord de la route, parce que leurs emplois vont globalement ne plus exister… On peut parler de solidarité, mais est-ce qu’il ne s’agit pas tout simplement du nouvel entrepreneuriat? C’est très darwinien, en fait. Nous en sommes persuadés: si le monde de l’entreprise n’évolue pas en se réinventant, il aura de plus en plus de mal à rester performant…

A lire:

Alexandre Mars, «La révolution du partage», Ed. Flammarion, 224 p.

https://www.letemps.ch/culture/revolution-philanthropique-marche

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Facebook est comme un prêtre qui écouterait les confessions de 2 milliards d'individus, sauf que la plupart n'ont pas conscience d'être à confesse.

12 Juin 2018, 00:28am

Publié par Grégoire.

«Beaucoup de ficelles invisibles dans la tech nous agitent comme des marionnettes»

«Beaucoup de ficelles invisibles dans la tech nous agitent comme des marionnettes»

INTERVIEW - Ancien ingénieur de Google, Tristan Harris dénonce les pratiques de son ancien employeur et des grands groupes de la Silicon Valley. Il exhorte les chefs d'États et citoyens à exercer un contre-pouvoir contre leur influence nocive.

Tristan Harris verse calmement du lait de soja dans son expresso, avant de descendre une à une les entreprises de la Silicon Valley et leurs pratiques. Cet ancien ingénieur employé de Google, spécialiste en éthique en technologies, alerte depuis plusieurs années le monde des technologies sur les dérives qu'il a contribué à créer. Avec un certain succès. Son initiative «déconnexionniste» Time Well Spent a fait de lui un speaker remarqué et invité par les PDG de la tech. Désormais, il vise les citoyens. À l'occasion de sa tournée européenne, des couloirs de Bruxelles à l'Elysée, en passant par le MAIF Social Club. Le Figaro l'a rencontré.

LE FIGARO. - Pourquoi êtes-vous parti en guerre contre les réseaux sociaux et les géants du Web?

Tristan HARRIS. - Ces entreprises sont devenues les acteurs les plus puissants au monde, plus que les États. Nous sommes 2 milliards à être sur Facebook, soit davantage de fidèles qu'en compte le christianisme. 1,5 milliard sur YouTube chaque mois, soit plus de fidèles qu'en compte l'Islam. Et à partir du moment où nous éteignons l'alarme de nos smartphones - que nous consultons en moyenne 150 fois par jour - nos pensées vont être perturbées par des pensées que nous n'avons pas choisies, mais que les entreprises technologiques nous soumettent. En ouvrant Instagram, on observe que ses amis se sont amusés sans vous. Cette idée ne vous serait jamais venue sans qu'un acteur des technologies ne l'ait faite advenir.

» LIRE AUSSI - RGPD: premières plaintes contre les géants du Web en France et en Europe

» VOIR AUSSI - La méthode pour voir tout ce que Facebook sait sur vous

En quoi est-ce si grave?

Les réseaux sociaux finissent par construire une réalité sociale alternative. Cela pose des problèmes de santé publique, notamment chez les plus jeunes qui sont sans cesse soumis à des images de leurs amis montrés sous leur meilleur jour et ont une vision déformée de la normalité. Cela pose aussi des problèmes de polarisation: les réseaux sociaux ont tendance à mettre en avant les comportements extrêmes, ce qui pose un troisième problème, cette fois-ci démocratique, car cela influence l'opinion. La question relève enfin de l'antitrust: ces entreprises ont un pouvoir inégalable avec toutes les données qu'elles manipulent chaque jour.

Non seulement Facebook sait quelle photo de votre ex-petite amie vous regardez sur Instagram, mais aussi quels messages vous écrivez sur WhatsApp.

Les concepteurs de ces technologies sont-ils conscients d'exercer un tel pouvoir?

Non! Il y a beaucoup de personnes qui ont une conscience dans la Silicon Valley et s'inquiètent des conséquences de leur travail. Mais si on y réfléchit bien, quand on a entre 20 et 30 ans, qu'on est un jeune ingénieur qui n'a jamais rien fait d'autre que coder et qu'on débarque chez Google, on pense avant tout à toutes les choses incroyables que l'on peut réaliser avec son travail. Pas aux instabilités géopolitiques que ces outils peuvent permettre de créer. Les employés de ces grandes entreprises ne réalisent pas leur pouvoir.

N'est-ce pas la faute d'une culture d'entreprise qui déresponsabilise ses employés?

Ces entreprises font en sorte que les employés n'aient pas une image «globale» de l'impact de leur travail. Je pense que des comparaisons historiques peuvent être faites avec des régimes autoritaires. J'ai beaucoup étudié le fonctionnement des cultes et j'y vois aussi des similitudes. Quand Facebook répète sans cesse cette devise, «nous aidons le monde à être plus connecté», cela devient performatif et on ne voit plus que cela.

Les employés de Facebook sont payés très cher pour ne pas se poser de questions.

De la même façon, ils ne parlent pas d'un problème d'addiction aux technologies mais d'«engagement». Et ils ne disent pas à leurs ingénieurs de concevoir des outils de manipulation des esprits mais des outils pour «augmenter l'engagement sur de la publicité ciblée», car aucun ne voudrait travailler pour eux sinon. Pour reprendre l'écrivain Upton Sinclair, vous ne pouvez pas demander à des gens de se poser des questions quand leur salaire dépend du fait de ne pas se les poser. Et les employés de Facebook sont payés très cher pour ne pas se poser de questions.

N'avez-vous pas l'impression d'utiliser une rhétorique de la peur parfois exagérée à l'égard des technologies?

Je suis d'accord avec ceux qui me critiquent pour défendre un modèle de la peur! (rires) Parce que fondamentalement, je m'intéresse à la question du pouvoir, et qu'il y a une sorte de vérité dérangeante dans la Silicon Valley. Plusieurs PDG comme Eric Schmidt (ex-Google) ou Mark Zuckerberg (Facebook) ont déclaré que la vie privée était morte. Aujourd'hui, avec une intelligence artificielle entraînée, je peux en effet établir votre profil psychologique en étudiant vos clics, vous identifier à travers votre géolocalisation dans moins de cinq lieux, mesurer votre taux de stress ou d'excitation avec la reconnaissance faciale. Nous allons vivre dans un monde où de plus en plus de technologies vont intercepter des signaux de ce que nous pensons avant même que nous n'ayons conscience de le penser, et nous manipuler.

Avez-vous l'impression que vos idées sont entendues par le grand public?

Les gens n'ont pas conscience de l'ampleur de ce que l'on peut déjà faire avec de la publicité ciblée. Il est facile de se dire que nous sommes informés ou éduqués, et que cela ne nous arrive pas à nous, plus malins que les autres. Je veux éveiller les consciences là-dessus: absolument tout le monde, sans exception, est influencé par des ressorts qu'il ne voit pas. Exactement comme dans les tours de magie.

Comment cela fonctionne-t-il concrètement?

«Absolument tout le monde, sans exception, est influencé par des ressorts qu'il ne voit pas».

Il y a beaucoup de «dark patterns» (des design douteux) dans les technologies, c'est-à-dire des ficelles invisibles qui nous agitent comme des marionnettes. Elles reposent sur la captation d'attention par les biais cognitifs, l'excitation... Par exemple, nous vérifions sans cesse les notifications des téléphones en espérant y voir leurs jolies couleurs vives, nous scrollons car il y a toujours de la nouveauté, nous regardons la prochaine vidéo YouTube car elle est bien suggérée... *

Imaginons maintenant que vous vouliez quitter Facebook: pour vous garder, Facebook pourrait envoyer une notification à l'un de vos amis qui a pris une photo de vous, et lui demander «Veux-tu taguer cette personne?». En général, cette question s'assortit d'un gros bouton bleu marqué «OUI» pour que l'ami clique dessus. Il suffit ensuite à Facebook de vous envoyer un mail pour vous dire «Tel ami vous a tagué sur telle photo» et cela vous incite à revenir. Toute l'industrie de la tech utilise ces ressorts.

N'est-ce pas seulement une certaine élite qui peut savoir comment échapper à ce type de manipulation?

Complètement, et c'est bien pour cela que nous voulons forcer les entreprises à changer directement leurs pratiques pour le plus grand nombre. Nous ne pouvons pas souhaiter un monde où seulement 1% de personnes savent comment paramétrer leur téléphone en noir&blanc pour ne plus être autant sollicité par les boutons rouges des notifications, ou savent comment régler leurs paramètres. Nous devons faire en sorte que le design de l'attention soit vertueux par défaut, que les modèles économiques de ces entreprises reposent moins sur le temps passé. Google vient de le faire et cela établit un précédent qui pourrait pousser Apple à faire de même.

Facebook est comme un prêtre qui écouterait les confessions de 2 milliards d'individus, sauf que la plupart n'ont pas conscience d'être à confesse.

Peut-on vraiment avoir confiance quand ces entreprises prétendent nous guérir de l'addiction ou des manipulations qu'elles ont elles-mêmes créées?

Pour moi, c'est le rôle de Facebook de veiller à ce qu'une élection ne soit pas manipulée, et le rôle de Google de restreindre notre addiction. Pour autant, nous ne devons pas les croire sur parole, car ils ont toujours un pouvoir considérable. Facebook est comme un prêtre qui écouterait les confessions de 2 milliards d'individus, sauf que la plupart ne savent même pas qu'ils passent à confesse! Non seulement ils savent quelle photo de votre ex-petite amie vous regardez sur Instagram, mais aussi quels messages vous écrivez sur WhatsApp. Avec leurs traceurs sur plus d'un tiers des sites internet, ils savent que vous songez à changer d'assureur avant même que vous ayez franchi le cap. Ils savent aussi ce que vous allez voter. Et ils vendent ce savoir à des marques pour qu'au confessionnal, on vous suggère telle ou telle action. Je ne dis pas que Facebook et son confessionnal virtuel ne devraient pas exister, mais je dis qu'il ne devrait pas avoir un modèle économique qui ait autant de pouvoir. L'Europe va sombrer si nous ne changeons pas ce système.

Vous avez justement rencontré le président Emmanuel Macron, vous êtes allé à Bruxelles... Avez-vous l'impression que les pouvoirs publics soient sensibles à votre alerte?

Je pense qu'Emmanuel Macron réussit très bien à manœuvrer subtilement, entre d'un côté le fait d'encourager les technologies et de vanter la France auprès des géants, tout en étant très protecteur. Maintenant, nous ne sommes pas entrés dans les détails sensibles et je ne suis pas sûr que les entreprises présentes [au sommet Tech for Good organisé à l'Élysée, NDLR] étaient vraiment investies pour aborder les questions difficiles. Mais je suis heureux que nous ayons l'Europe pour mettre la pression sur le secteur de la tech, car nous ne pouvons plus compter sur les États-Unis. Nous dépendons de vous et nous comptons sur vous, car votre pression marche.

http://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/2018/05/31/32001-20180531ARTFIG00004-tristan-harris-beaucoup-de-ficelles-invisibles-dans-la-tech-nous-agitent-comme-des-marionnettes.php

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Qui sait vraiment quelque chose sur cette vie ?

10 Juin 2018, 03:38am

Publié par Grégoire.

Qui sait vraiment quelque chose sur cette vie ?

Mes maitres à l’école m’ont pendant des années parlé en vain : je n’ai jamais rien retenu de ce qu’ils m’enseignaient peut-être parce qu’ils le tiraient de leurs certitudes et non de l’ignorance printanière de leur âme : Qui sait vraiment quelque chose sur cette vie ?  Même la mort n’est pas sûre : ceux de mes proches que j’ai vus dans un cercueil semblaient tous réfléchir farouchement concentrés sur un problème particulièrement obscur La résurrection est la résolution soudaine de ce problème le jaillissement d’une lumière qui fracasse les os du crâne et les pierres de nos certitudes, cette lumière est déjà là mêlée à nos jours elle perce de tous côtés la nuit qui nous entoure. 

si j’ai oublié ce qu’on s’éreintait à m’apprendre je me souviens très bien des leçons de courage données par le banc dans ma cour; sa peinture verte s’écaillait, il méditait sous le ciel, par tous les temps j’étais son élève. J’ai été aussi instruit de façon très profonde et durable par un bourdon que j’ai regardé un peu par paresse par surprise… il travaillait de façon incroyablement dure: je l’ai vu monter sur une marguerite -en glisser -y remonter il était vaillant c’était magnifique c’était un petit père courage…

Christian Bobin.

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Miroir des âmes simples et anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et désir d’amour

8 Juin 2018, 03:19am

Publié par Grégoire.

Miroir des âmes simples et anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et désir d’amour

Chef-d'oeuvre de la littérature mystique française, Le Miroir des âmes simples et anéanties révèle une richesse spirituelle qui place Marguerite Porete, dans la lignée de saint Bernard, Maître Eckhart ou Hadewijch d'Anvers. Du coeur de l'expérience religieuse la plus radicale - Dieu est Amour -, Marguerite Porete pose les questions de l'Évangile : l'Amour vrai est-il soumis à autre chose qu'à lui-même ? Fût-ce à la morale ? À la religion ? La force et l'audace de ces interrogations, qui en 1310 conduiront Marguerite Porete au bûcher de l'Inquisition, traversent les siècles à la rencontre de tous ceux qui, aujourd'hui comme hier, "fin Amour demandent".

 

- Comme les Hindous l’ont vu, la grande difficulté pour chercher Dieu, c’est que nous le portons au centre de nous-mêmes. Comment aller vers moi ? Chaque pas que je fais me mène hors de moi. C’est pourquoi on ne peut pas chercher Dieu. Le seul procédé, c’est de sortir hors de soi et de se contempler du dehors. Alors, du dehors, on voit au centre de soi Dieu tel qu’il est. Sortir de soi, c’est la renonciation totale à être quelqu’un, le consentement complet à être seulement quelque chose.

 

- La parfaite liberté ne connaît pas de  « pourquoi » 

- Je me repose en paix complètement, seule, réduite à rien, toute à la courtoisie de la seule bonté de Dieu, sans qu’un seul vouloir me fasse bouger, quelle qu’en soit la richesse. L’accomplissement de mon œuvre, c’est de toujours ne rien vouloir. Car pour autant que je ne veux rien, je suis seule en lui, sans moi, et toute libérée ; alors qu’en voulant quelque chose, je suis avec moi, et je perds ainsi ma liberté. Et si je ne veux rien, si j’ai tout perdu hors de mon vouloir, il ne me manque rien : libre est ma conduite, et je ne veux rien de personne » (ch. 51).

Miroir des âmes simples et anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et désir d’amour

 

 

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Si nous attendons du monde qu'il nous anime, de la matière qu'elle nous porte et nous console, il nous reste plus qu'à mourir à petit feu.

7 Juin 2018, 22:33pm

Publié par Grégoire.

Si nous attendons du monde qu'il nous anime, de la matière qu'elle nous porte et nous console, il nous reste plus qu'à mourir à petit feu.

"Je ne suis pas sur terre pour me ménager afin de mourir plus confortablement..." 
JR Huguenin.

« Cette vitesse vertigineuse à laquelle le monde court vers l'avenir s'accompagne d'une absence de contrôle sur la direction de marche. Dans ce voyage à l'aveugle du passager, on a réussi à escamoter entièrement la question essentielle, celle de la destination, et à la remplacer par celle du confort matériel à l'intérieur du véhicule. »

Romain Gary

 

" Depuis ce jour où je décidai de me brûler à la vie pour retrouver le feu, je regardai le monde à travers le prisme du désir. Je suis partie dans le désert, dans un monastère de brousse, sur les routes le jour, dans certains lieux de plaisir de nuit. J’ai cherché à comprendre le mystère de cette force qui nous pousse à nous dépasser malgré tout, contre tout. Je n’ai rien trouvé de définitif, j’ai juste appris peu à peu à vivre de désir.»

Blanche de Richemont.

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Négocier avec un monde absent

6 Juin 2018, 02:00am

Publié par Grégoire.

Négocier avec un monde absent

Il aurait été plus simple et rassurant de classer cet homme comme « simple d’esprit » dans tout autre contexte. Mais j’ai été témoin de sa négociation, en silence, avec l’énergie du désespoir. 

L’homme sans âge faisait le troisième thé. Juste avant il alignait comme un enfant des petits cailloux dans le sable, collier d’années perdues, les retournant entre ses doigts comme des grains de chapelets, noyaux de prières stériles. Puis du plat de la main il les enterra au Sahara et aspergea le sable d’eau, offrant aux petits verres la surface durcie d’un plateau. De temps en temps, il suspend son geste, semble écouter et repose l’or moussu.

Puis il remue les lèvres en silence, attrape ce silence et de ses doigts le transforme en langue des signes pour un auditoire invisible et sourd. Étonné, j'ai écouté puis discrètement cherché des yeux ceux qu'il voyait. Nous ne sommes que deux, mais il prépare six verres. Avec attention il écoute l’absence de réponse aux questions que ses mains posent. Le plomb pesant du silence en échange d’une survie passant d’une année à l’autre, d’un verre à l’autre, combat inégal, négociation injuste du plomb contre l'écume.

J’observe à travers ses gestes le monde qui est le sien et que je ne vois pas. A qui donc parlent ses mains ? Dans ce même monde d’oubli et d’invisibilité on prie aussi un Dieu caché dans cette immensité, osant le murmure interrogatif d’un abandon dans l’affirmation de paroles rituelles et quand on ne prie pas ce Dieu vient la litanie verbeuse et boisée des discours ressassés. Quand il est affamé de justice divine ou humaine, l’espoir se nourrit de mensonges. Les invités aussi restent muets à l’offrande du thé et au discours de ses mains.

Le temps s’écoule d’un verre à l’autre sans trouver preneur. Comme l’ennui recouvrant le temps, la mousse s’installe, dominante. J’ai appris à partager l’ennui chez les Sahraouis. L’ennui est le frère poussiéreux avec lequel jouent les enfants ; l’ennui c’est la couverture dans laquelle tous s’enroulent pour étouffer pendant quelques heures, le temps et ce lieu, donnés par erreur ; l’ennui, c’est ce sang épais et douceâtre qui remplace peu à peu le votre, jusqu’à devenir ce caillot coagulant d’un accord unilatéral qui vous délivre enfin. Venu pour cultiver des jardins, j’y ai d’avantage cultivé l’ennui. Quelques larmes suffisent, en plein désert, pour qu’il germe. L’ennui des oubliés, l’ennui des assistés, l’ennui des désespérés. Lorsqu’il est trop envahissant, on fait le thé ; on coiffe alors l’ennui d’un chèche de mousse.

Nous partageons le dernier thé, doux comme la mort, puis il se lève, refusant l’offre d’un maigre repas. Je le vois sur la piste, sans voix poursuivant les invisibles de ses gestes. Ici, dans les camps, on ne négocie plus l’espoir avec un monde absent, on négocie juste avec le temps, le temps qu’il reste à vivre. 

Jean-françois Debargue Mai 2018

 

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Que reste-t-il d'une vie ?

4 Juin 2018, 02:24am

Publié par Grégoire.

Que reste-t-il d'une vie ?

Le désert m'a menée à ma fenêtre. II ne s'agit plus ici de vivre en apnée en attendant le week-end ou les vacances. Il ne s'agit plus de retrouver le sourire, un billet d'avion entre les mains ; mais de vivre chaque jour le grand voyage. Elle est peut-être là la véritable aventure: savoir partir en voyage par la fenêtre, Peter Pan emmène ses amis au pays imaginaire en passant par la fenêtre, car elle est la porte des rêves. 

Un homme qui vivait entre quatre murs sans ouverture avait dessiné une fenêtre sur l'un d'eux. Il n'a pas subi l'isolement, il a créé un passage pour partir en voyage. Comme un troisième œil qui verrait avec les yeux de l’âme.

Quoi que nous vivions, où que nous soyons, nous pouvons vivre au grand air, nous pouvons revenir à la source, retrouver les forces et le souffle qui nous manquent. C'est très simple, il suffit pour cela d'ouvrir sa fenêtre et de rester assis face à elle sans rien faire, juste sentir l'air du soir sur sa peau et laisser l'esprit vagabonder pendant que le corps se relâche. S'offrir la chance de ne rien donner, rien espérer, juste être là, gratuitement. À l'image de ces journées d'attente dans le désert contre lesquelles on peste avant de comprendre enfin que c'était une grande chance d'être obligé de vivre ces heures qui n'attendent rien de nous.

Si nous sommes à bout de force, n'attendons pas la fin de la semaine, une échappée belle nous espère là, tous les jours, sous nos yeux, par la fenêtre.

 

"Qu'est-ce qui reste dans une vie ? Est-ce que ce sont toutes nos préoccupations avec un millier de choses futiles? Non, Mais il y a des moments privilégiés où on est comme... comme un cri pur, où on est comme un grand regard qui s'ouvre, sur rien peut-être, ce qui est la seule chose existante. Ces moments-là, ils brillent. C'est la seule chose qui reste de nos vingt, trente, quarante ans de vie." 

Et si l'on partait dans le désert justement pour ressentir le choc d'un regard qui s'ouvre sur ce qui brille au coeur du silence? Et si l'on partait pour toucher l'infini ? Pour effleurer cet absolu qui sous-tend toute chose.

La liberté serait d'atteindre cet essentiel en regardant par la fenêtre afin que la joie soit à portée de main. N'est-elle pas l'oasis de tous les déserts intérieurs que nous traversons? N'est-elle pas notre seule aspiration derrière les couches de nos devoirs, nos aspirations, nos amours ? Nos rêves d ailleurs ne dévoilent-ils pas l'espoir secret de trouver un peu de joie sur terre ?

 

Blanche de Richemont.

auteur de : Eloge du désert, Eloge du désir, Pourquoi pas le silence, les passions interdites...

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Il n'y a jamais de mauvaise journée...

2 Juin 2018, 01:37am

Publié par Grégoire.

Il n'y a jamais de mauvaise journée...

(...) Il n'y a jamais de mauvaise journée... Je peux traverser des épreuves comme tout le monde, mais même dans une telle journée je sais que quelque chose fleurira, tôt ou tard. Les mauvais jours, il faut les aimer encore plus que les autres parce qu'ils sont très discrédités : un peu comme la pluie contre laquelle on peste...

Les mauvais jours… peut-être que notre âme est un petit enfant sur une balançoire : de temps en temps  ses pieds touchent le ciel  et de temps en temps ses pieds frôlent le sol. Quelle est la main qui nous pousse pour nous donner notre élan et pour le raffermir ? Ce serait peut-être la main des épreuves La main bénie des épreuves qui nous envoie tout d'un coup au ciel et qui nous empêche aussi parfois de tomber, qui fait qu'il n'y a pas vraiment de position stable dans cette vie qu’il n'y a pas de point fixe -comme dans un berceau,  on est dans une extrême faiblesse indestructible :  le bébé est dépendant de tout, absolument vulnérable et en même temps il y a quelque chose qui sort du berceau : lumière contre laquelle personne ne peut rien.. Autant essayer de ruiner le soleil à coups de pioches ! La vraie puissance c'est d'être exposé à tout comme le nouveau-né !

Le nouveau-né c’est celui qui ressent un monde invisible, que les choses sont plus que ce qu’elles paraissent, que les gens sont plus que ce qu’ils croient être. Le nouveau-né c’est celui qui regarde ce qui tombe de la poche de Dieu et le ramasse.

La première connaissance de Dieu dans la vie est une connaissance amère et sucrée, engloutie avec les premiers aliments d’enfance. L’enfant lèche Dieu, il le boit, il le frappe, il lui sourit, il crie après lui et finit par dormir dans ses bras, repu au creux de l’ombre. C’est une connaissance immédiate, offerte aux nouveau-nés, refusé aux gens d’Église, refusé à ceux qui connaissent Dieu d’une connaissance maigre, séparé de ce qu’elle connait. 

 

Christian Bobin.

 

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