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QUE CHERCHEZ-VOUS ?

"la première voix féminine du monde, le premier homme à avoir parlé d'une voix féminine, c'était Jésus-Christ." Romain Gary.

30 Juillet 2014, 17:35pm

Publié par Fr Greg.

"la première voix féminine du monde, le premier homme à avoir parlé d'une voix féminine, c'était Jésus-Christ." Romain Gary.

"La seule chose qui m'intéresse, c'est la femme, je ne dis pas les femmes, attention, je dis la femme, la féminité. Le grand motif, la grande joie de ma vie a été l'amour rendu pour les femmes et pour la femme. Je fus le contraire du séducteur malgré tout ce que l'on a bien voulu raconter sur ce sujet. C'est une image totalement bidon et je dirais même que je suis organiquement et psychologiquement incapable de séduire une femme. Cela ne se passe pas comme ça, c'est un échange, ce n'est pas une prise de possession par je ne sais quel numéro artistique de je ne sais quel ordre, et ce qui m'a inspiré donc dans tous les livres, dans tout ce que j'ai écrit à partir de l'image de ma mère, c'est la féminité, la passion que j'ai pour la féminité. Ce qui me met parfois en conflit avec les féministes puisque je prétends que la première voix féminine du monde, le premier homme à avoir parlé d'une voix féminine, c'était Jésus-Christ. La tendresse, les valeurs de tendresse, de compassion, d'amour, sont des valeurs féminines et, la première fois, elles ont été prononcées par un homme qui était Jésus. Or il y a beaucoup de féministes qui rejettent ces caractéristiques que je considère comme féminines. En réalité, on s'est toujours étonné du fait qu'un agnostique comme moi soit tellement attaché au personnage de Jésus.

Ce que je vois dans Jésus, dans le Christ et dans le christianisme, en dépit du fait qu'il est tombé entre les mains masculines, devenues sanglantes et toujours sanglantes par définition, ce que j'entends dans la voix de Jésus, c'est la voix de la féminité en dehors de toute question de religion et en dehors de toute question d'appartenance catholique que je puis avoir techniquement. Je puis donc simplement dire que mon rapport avec les femmes a été d'abord un respect et une adoration pour ma mère, qui s'est sacrifiée pour moi, et un amour des femmes dans toutes les dimensions de la féminité, y compris bien sûr celle de la sexualité. On ne comprendra absolument jamais rien à mon oeuvre si l'on ne comprend pas le fait très simple que ce sont d'abord des livres d'amour et presque toujours l'amour de la féminité. Même si j'écris un livre dans lequel la féminité n'apparaît pas, elle y figure comme un manque, comme un trou. Je ne connais pas d'autres valeurs personnelles, en tant que philosophie d'existence, que le couple. Je reconnais que j'ai raté ma vie sur ce point, mais si un homme rate sa vie, cela ne veut rien dire contre la valeur pour laquelle il a essayé de vivre.

Je trouve que c'est ce que j'ai fait de plus valable dans ma vie, c'est d'introduire dans tous mes livres, dans tout ce que j'ai écrit, cette passion de la féminité soit dans son incarnation charnelle et affective de la femme, soit dans son incarnation philosophique de l'éloge et de la défense de la faiblesse, car les droits de l'homme ce n'est pas autre chose que la défense du droit à la faiblesse. Et si on me demande de dire quel a été le sens de ma vie, je répondrais toujours - et c'est encore vraiment bizarre pour un homme qui n'a jamais mis les pieds dans une église autrement que dans un but artistique - que cela a été la parole du Christ dans ce qu'elle a de féminin, dans ce qu'elle constitue pour moi l'incarnation même de la féminité. Je pense que si le christianisme n'était pas tombé entre les mains des hommes, mais entre les mains des femmes, on aurait eu aujourd'hui une tout autre vie, une tout autre société, une tout autre civilisation.

Pour le reste, que voulez-vous que je vous dise ? Je voudrais simplement avoir encore le temps de continuer dans la même direction, aussi longtemps que possible, et je le dis tout de suite, pas tellement pour écrire d'autres romans et en tirer je ne sais quelle gloire, mais simplement par amour de la féminité, par amour de la femme, et je crois que l'on trouvera cet amour, on trouvera cette fidélité dans mon nouveau roman qui s'appelle Les Cerfs-volants. Et je ne voudrais simplement pas qu'il y ait plus tard, quand on parlera de Romain Gary, une autre valeur que celle de la féminité. "

"Le sens de ma vie" dernier entretien de Romain Gary 

© Gallimard

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Un tout petit rien.

29 Juillet 2014, 20:07pm

Publié par Fr Greg.

Un tout petit rien.

Rien – mais qu’est-ce que « rien » ? Pourquoi tant de journées données à vivre ? Est-ce qu’une rose passe un seul jour où il n’y aurait « rien » ? Sans doute pas. Le chuchotement d’une brise, les fêtes galantes d’un oiseau, une mélancolie soudaine du ciel est pour elle un évènement. Il nous reste à traverser la vie avec la sensibilité d’une rose, de façon à ne jamais pouvoir dire, le soir venu : « rien ». Ce matin, une belle Égyptienne était tombée au fond de l’évier. Les parois se révélaient trop lisses pour qu’elle puisse jamais en sortir. Elle errait dans un pays de zinc, lentement empoisonnée par la nostalgie comme le poète Du Bellay, au XVIe siècle, le fut goutte à goutte dans les marbres italiens, loin de son Anjou natal. Elle a sursauté en me voyant. Combien pèse le cerveau d’une araignée ? Si petit soit-il, il peut contenir l’infini d’une terreur. De trembler pour sa vie avait fait d’elle ma semblable. J’étais l’ange idiot du destin. Je pouvais la noyer, l’écraser. Me penchant sur les abîmes humides, je lui ai parlé – d’abord trop fort : le souffle des voyelles et des consonnes la fit se replier, guetter le pire. Et puis je crois qu’elle a compris. Il y a entre la sainteté et l’effroi un lien très sûr. C’est parce qu’ils ont tutoyé les abîmes que les saints parlent si bien du ciel. Les œuvres complètes des mystiques peuvent tenir dans la chambre mentale d’une toute petite araignée. Elle s’est détendue imperceptiblement. Je ne l’ai pas prise dans ma main, de peur de froisser sa robe de ténèbres. J’ai cherché une feuille de papier blanc – il y en a partout, brûlant d’un feu patient dans cette maison où l’écriture a envahi chaque centimètre carré – et je l’ai glissée dans l’évier. L’araignée a sauté sur le papier. Une gaieté lui remontait dans les jambes. J’ai secoué la feuille dans un coin de la maison. En souplesse, la brodeuse a atterri et s’est enfuie loin de mon regard. La vie a continué jusqu’à ce que la nuit vienne tout reprendre du jour dans sa main de croupier aux manches cousues. En épargnant la petite Du Bellay, j’avais crocheté la serrure du temps. Une porte s’était entrebâillée dans le ciel. Je prie cependant le Dieu inconnu de ne plus croiser mon chemin avec celui de la dentellière noire : le nouveau récit serait peut-être sombre. Je ne suis pas un saint. Je le suis sans aucun doute bien moins que cette créature que son angoisse avait ce matin amnistiée, lavée à pleines eaux de toutes ses malices passées. J’avais sauvé Thérèse de Lisieux d’une noyade annoncée. Je ne reverrai sans doute jamais ma belle visiteuse. J’ai été témoin de son angoisse et de la joie qui la suivit. Je ne suis pas sûr de son identité. C’était peut-être Hildegarde de Bingen, ou la grande d’Avila : l’infortunée était trop petite pour que je puisse lire son nom sur l’étiquette cousue dans le col de sa blouse noire.|

Christian Bobin

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"Le porteur d'histoire" Jubilatoire !

28 Juillet 2014, 15:08pm

Publié par Fr Greg.

"Le porteur d'histoire"  Jubilatoire !

 

"Tout notre passé est une fiction", dit l'un des personnages au début de la soirée. C'est une invite à un curieux voyage dans l'Histoire et la fiction. Car Alexis Michalik va tendre un fil, puis un autre, et prendre le spectateur dans une toile d'araignée qui sans cesse fait des sauts dans le temps et à travers les frontières. 

Au départ, un voyageur français rencontre deux femmes en Algérie, dans un village. Il semble que ces personnages n'aient rien à se dire, les femmes veulent parler le moins possible à ce visiteur. Mais il y a des livres dans cette maison perdue, toute une bibliothèque qui témoigne d'un goût de la lecture et des histoires - c'est l'un des thèmes de la pièce - mais aussi d'un passé commun entre ces individus qui semblent si loin des uns et des autres. Dès lors on avance dans différentes temporalités. Reculades dans diverses strates du passé, essentiellement à l'époque romantique, au temps d'Alexandre Dumas qu'on ne va pas tarder à rencontrer (hommage non dissimulé au maître du roman historique et échevelé, le grand modèle !), mais aussi jusqu'en 1348 ! Progressions dans notre présent : ces premiers personnages - car on en croisera beaucoup d'autres - ne vont pas se quitter et vont vivre de nouvelles histoires, liées au passé, sous nos yeux. 

Deux histoires centrales 

Les éléments sont multiples. On s'y perdrait s'il n'y avait pas deux massifs, deux points centraux. D'un côté, l'histoire donnée comme utopique ou incertaine d'une famille "de Saxe de Bourville" dont l'une des figures est l'un des mystères de la soirée. De l'autre, une famille ardennaise où un homme a laissé des carnets qui éclairent des dizaines d'années d'un point de vue privé et public. Livres et récits intimes sont, d'une certaine façon, d'autres personnages de la pièce, tant Michalik leur donne de rôles dans son roman théâtral. Il sera même question de dizaines de livres retrouvés dans un cercueil à la place d'un corps, lorsque la boîte oblongue sera ouverte longtemps après l'inhumation ! 

Michalik, dans la présentation du programme, parle de son texte comme ouvrant "des tiroirs narratifs et des pistes illimitées de récit", ce qui est sans doute un peu exagéré. Mais il a mis en place un jeu dont on peut dévider les bobines pendant des heures et qu'aucun résumé bref, comme le nôtre, ne peut évoquer vraiment. La scène est presque nue, les acteurs sont au début en maillot de corps. Mais un vestiaire visible, non loin d'un tableau noir où s'inscrivent quelques mots essentiels, va permettre aux acteurs d'opérer les transformations nécessaires, et elles seront nombreuses. 

Vertige fort stimulant

Amaury de Crayencour, Évelyne El Garby Klai, Magali Genoud, Éric Herson-Macarel et Régis Vallée changent aisément de personnalité, en résolvant d'abondantes difficultés : parfois, deux acteurs jouent en même le même personnage, mais à deux échelles du temps différentes ! 

Michalik a réussi avec ses interprètes la traduction théâtrale et charnelle d'un projet qui aurait pu rester abstrait. C'est donc d'un vertige fort stimulant. Même si l'on peut éprouver un sentiment de gratuité ou d'ivresse un peu facile. À maintes reprises il fait l'éloge du savoir et celui de l'imaginaire, deux notions qu'il raccorde mal. Umberto Eco est sans doute plus profond que Michalik. Mais ce dernier n'en est pas moins un fabricant de jeux diaboliques et passionnants.

Le porteur d'histoire, texte et mise en scène d'Alexis Michalik.

"Le porteur d'histoire"  Jubilatoire !

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"La chaste vie de Jean Genet" à la cour d'honneur du Palais des Papes!

27 Juillet 2014, 11:48am

Publié par Fr Greg.

"La chaste vie de Jean Genet" à la cour d'honneur du Palais des Papes!

Extraits:

« On dit que plus un rosier souffre et plus il donne de belles roses. Les jardiniers le savent, qui en plantant cet arbuste lui flanquent rituellement quelques coups, du plat de la pelle. Ainsi en était-il de Genet : chaque heure de souffrance à Mettray, pinçant les cordes de ses nerfs, faisait croître son génie. Bientôt il tirera lui-même de son désespoir, comme d'une harpe merveilleuse, les sons mélodieux du malheur. »

 

À la fin de sa vie, le vieux vagabond était revenu huit fois à Alligny saluer secrètement le petit paysan dévoreur de livres qu’il avait été, enchaîné à la banalité de son village comme un saint au lieu de son ravissement. Combien lui avait-il fallu d’épreuves avant de devenir ce vieillard inconnu, acclamé par les battements d’ailes des papillons ! [...] Au coeur de son oeuvre blasphématoire, il avait caché - comme une fleur séchée dans le bréviaire d’un hérétique - cette déclaration d’homme du blâme : « Si vous saviez fouiller dans l’ordure, que j’accumule exprès pour mieux vous défier et vous bafouer, vous y trouveriez mon secret, qui est la bonté. 

« La chasteté est moins l’abstinence que la grâce de laisser tout ce qu’on touche d’une pureté de neige : la surnaturelle impossibilité de souiller la vie quoi qu’on fasse. »

"La chaste vie de Jean Genet" à la cour d'honneur du Palais des Papes!

« Je crois qu’on écrit d’abord pour s’aider soi-même, ensuite, dans le meilleur des cas, et si on en est capable, pour aider les autres. » 

 

« Je ne parle pas d’une beauté académique, mais de l’impalpable — innommable — joie des corps, des visages, des cris, des paroles qui cessent d’être mortes, je veux dire une joie sensuelle et si forte qu’elle veut chasser tout érotisme. » 

 

A travers Jean Genet, une vraie figure du Christ pauvre, ce "délinquant spirituel" venu confondre les puissants et se mettre à genoux devant les pauvres, dénonçant l'inhumanité de ceux qui se prétendent "du coté du Bien", Lydie Dattas nous propose une grande lecture de ce saint des temps modernes qui touche autant à la petite Thérèse qu'a Marie Madeleine, à Benoit Labre et à François d'Assise. 

 

à Lire sans retenue!

"La chaste vie de Jean Genet" à la cour d'honneur du Palais des Papes!
"La chaste vie de Jean Genet" à la cour d'honneur du Palais des Papes!

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Petit mot amical de Christian Bobin après "du minuscule et de l'imprévisible"

24 Juillet 2014, 23:33pm

Publié par Fr Greg.

Petit mot amical de Christian Bobin après "du minuscule et de l'imprévisible"

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Rencontre avec Christian Bobin. Avignon off 2014

24 Juillet 2014, 14:15pm

Publié par Fr Greg.

Rencontre avec Christian Bobin. Avignon off 2014
Rencontre avec Christian Bobin. Avignon off 2014

J'ai eu l'immense joie mercredi d'avoir au milieu des spectateurs "du minuscule et de l'imprévisible" d'avoir Christian Bobin et Lydie Dattas ! Avec sa délicatesse habituelle et sa douceur incroyable il m'a fait prévenir en arrivant...

Au terme du spectacle, Christian est venu dire quelques mots, me remerciant de mettre emparé de cette textes qui désomrais ne lui appartiennent plus a-t-il dit... et s'escusant auprès des lys qu'il malmenait un peu alors en leur donnant du: '"des fleurs trop 'm'a tu vu dans ma robe de gala'..." :-)  

et en repartant, pendant que Lydie écrivait quelques mots sur le livre d'or, il me dit dans un large sourire, éclatant même de rire: "vous donnez une gaité incroyable, de la joie.. à mort!"

Un petit film suivra... !!!!

fr Grégoire. 

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Revue de presse: Avignon city-news

24 Juillet 2014, 09:28am

Publié par Fr Greg.

Revue de presse: Avignon city-news
LE PITCH

Un homme s'avance. Au cœur et dans le choeur d'une grande église, il capte notre attention. Lui aussi fait attention. Il est en équilibre. Sur un banc. Il en descend lestement et nous déclare tout de go que le plus beau métier du monde serait d'être gardien d'un brin d'herbe...Sa voix porte, sa voix nous porte. Elle nous ouvre les routes de l'invisible dans le brouhaha, de l'inaudible dans la purée médiatique internaute. De ces petits riens qui sont tout et ne sont accessibles qu'à ceux qui ne font rien... afin d'être prêts. Prêts, quand ce petit rien qui est tout, se présentera. Ainsi va la joie d'aller !

L'AVIS DU FESTIVALIER

Nous avions été déjà subjugués l'an passé par la portée des paroles de Grégoire Plus à travers Christian Bobin. Le miracle se réitère même si les lieux ont quelque peu changé. Bien que profond, le serment est à nouveau charmant. Et quoique laïque, le prêche, encore miraculeux ! La Chapelle Saint-Louis a laissé la place à celle de l'Oratoire mais l'orateur demeure sous la coupole et ses sources, toujours littéraires, sont de Christian Bobin en interviews. 
Après le sujet délicat de la disparition, Grégoire Plus se frotte ce festival à celui de l'apparition! L'apparition d'un moment extatique provoqué par la ritournelle d'un maçon par exemple, par une fleur, par la lente dissipation d'un nuage... Ce jour de représentation, le vent soufflait fort et il arrivait à l'interprète d'arrêter son propos pour se nourrir de ce beau bruit de vent à travers les pierres de l'église... Savoir se délester pour être prêt à recevoir ! Ainsi les choses minuscules et imprévisibles seront à même de remplir une vie. Et de la combler ! Comblés, nous le fûmes même si la qualité d'interprétation de ce que nous avons reçu était loin d'être minuscule.

Chapelle de l'Oratoire, 32,rue Joseph Vernet. Jusqu'au 27 juillet à 16 h 45. Tarifs : 15 €, carte OFF 10 €. Résas. 07 86 55 67 62.

 Jean-Christophe Gauthier le 23/07/2014 à 18:30

http://www.citylocalnews.com/avignon/2014/07/23/du-minuscule-et-de-l-imprevisible

 

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Guillaume Gallienne lit Lydie Dattas

23 Juillet 2014, 22:45pm

Publié par Fr Greg.

Guillaume Gallienne lit Lydie Dattas

Actuellement à l’affiche de la Comédie Française dans le rôle de Lucrèce Borgia, Guillaume Gallienne se prépare à investir la Cour d’Honneur du Palais des papes d’Avignon pour une lecture poétique dirigée par Olivier Py, La chaste vie de Jean Genet, un texte de Lydie Dattas. Une grande première à laquelle l’acteur se prépare avec gourmandise. Entretien.

Qu’est-ce qui vous a décidé à accepter cette lecture du texte de Lydie Dattas ?
Guillaume Gallienne - Quand Olivier Py me l’a proposé, je ne connaissais pas le texte. Lorsque je l’ai lu, je l’ai trouvé tellement bien écrit, tellement beau, que j’ai dit oui tout de suite. Le sujet et la manière dont il est traité m’ont aussi complètement convaincu.

Que pouvez-vous dire de l’écriture de Lydie Dattas ?
C’est une écriture sublime. Il y a des moments où on a l’impression qu’elle est entre poésie et essai philosophique et pourtant c’est un récit continu. Je ne peux pas dire mieux !

Comment cela va-t-il se passer avec l’orchestre régional Avignon Provence ?
Cela ne m’est jamais arrivé de lire avec un grand orchestre. C’est une première. Je vais faire un vœu ! De même que c’est ma première dans la Cour d’Honneur, je vais faire deux vœux !

Impressionné ?
Oui ! Carrément ! D’ailleurs Olivier Py a été très drôle : lorsque je lui ai demandé un conseil de jeu, il m’a répondu : « tu feras ce que tu pourras »… Ce qui m’a dédouané de l’angoisse que j’aurai. C’est une manière de m’y préparer et de me dire que c’est tellement énorme qu’on peut décider un peu ce que l’on veut. Il faut plonger !

Quel est votre propre rapport à la poésie ?
Mais c’est une question intime ça ! J’ai des poèmes que je connais par cœur et que je me dis à certains moments, comme en marchant dans la rue, par exemple… C’est souvent condensé. C’est à la fois un moment d’humanité, de musique, d’observation de l’extérieur et de l’intérieur, du cœur. Un écho humain, musical, scandé ou pas, qui nourrit, qui calme. La poésie pour moi, c’est une prière du beau, un débordement de l’âme. C’est juste le plaisir de retrouver l’agencement de ces mots, de la musique de cette pensée, qu’on laisse ressortir à la surface, juste pour le plaisir…

Vous êtes un homme de plaisir ?
Vous avez décidé de me résumer en somme ? Non, j’ai un grand sens du devoir. Et surtout, je réussis à allier les deux. On va dire que je ne suis pas maso…

Quels sont les poètes dont vous vous sentez proche ou qui vous sont familiers ?
Pouchkine, Apollinaire, Aragon… C’est Pouchkine qui me vient comme une évidence. Après j’aime bien des poèmes très musicaux, comme ceux de Heredia, ou L’Ode à Perrier de Malherbes, certains haïkus…

Quelle est votre principale qualité en tant qu’acteur et votre principal défaut ?
L’exigence pour les deux. L’exigence est à la fois une qualité et aussi un défaut. C’est une qualité parce que j’aime le travail bien fait, parce que je ne me satisfais pas facilement, je suis travailleur, et en même temps c’est un défaut parce que du coup, mon jeu manque peut-être parfois de naturel.

La réalisation de Guillaume et les garçons à table ! vous a-t-elle donné le goût de la réalisation cinématographique ?
Oui, vraiment. J’ai adoré la préparation et le tournage. J’ai trouvé la post production plus difficile, plus laborieuse, plus solitaire, avec une chef monteuse que j’adorais certes, mais j’ai trouvé ça plus dur. J’ai été assez sidéré de voir qu’autant de gens pouvaient se mettre au service d’une histoire. Et surtout chercher à comprendre ce qu’il y avait dans ma tête sans essayer de me coller leurs fantasmes ou leurs égos. C’était vraiment leur métier au service de ce qu’il y avait à la fois dans le scénario et même de ce qu’il y avait entre les lignes. J’ai d’autres films en vue, oui, mais il faut gérer le temps maintenant. Cumuler cinéma, théâtre et radio, c’est déjà beaucoup en tant qu’acteur…

Un mot sur les intermittents ?
Au Français on est solidaire du mouvement. Personnellement je n’ai jamais été intermittent, mais je suis amené à le devenir le jour où je ne serai plus au Français et je travaille avec des intermittents. Je ne connais pas le dossier comme un spécialiste mais de ce que je peux en savoir, il est symbolique de la précarité de l’emploi en général. Je ne pense pas que ce soit en rayant ou en diminuant l’aide sociale des intermittents que l’on règle le problème.

L’annulation éventuelle d’un festival comme celui d’Avignon n’est-elle pas un crève-cœur ?
Ce qui est crève-cœur c’est que 110 000 intermittents risquent de se retrouver à ne plus pouvoir vivre du tout. Un danseur, s’il n’est payé que quand il danse, il fait comment le reste du temps ? Pour travailler son corps, pour ses cours ? Un musicien, il fait comment ? Un violoniste doit pratiquer plusieurs heures par jour, même quand il ne donne pas de concert. L’intermittence c’est cela aussi. Les artistes ne sont pas là à glander ! Il faut en finir avec le schéma bourgeois du saltimbanque glandeur, il faut arrêter ce genre de cliché ! On travaille énormément ! Et c’est dur ! –Propos recueillis par Marie-Hélène Bonafé

84 | Avignon, Cour d’Honneur du Palais des Papes, La Chaste vie de Jean Genet

 

Repères
Guillaume Gallienne (42 ans) passe avec autant de talent de la scène de la Comédie Française - dont il est Sociétaire depuis neuf ans, aux studios du Grand Journal de Canal + et d’une émission de lecture sur France Inter aux albums de Juliette Gréco ou Alexandre Tharaud sur lesquels il lit des textes ou chante. Le plaisir et l’enthousiasme avec lequel il exerce son métier font plaisir à voir. Son goût de la polyvalence et de la transformation éclate avec le spectacle créé en 2008, Les garçons et Guillaume, à table ! pour lequel il reçoit les César du Meilleur film, Meilleur acteur, Meilleur premier film, Meilleure adaptation.

Lydie Dattas, poétesse (67 ans) est fille d’une mère tragédienne et d’un père musicien. Elle épouse en 1972 Alexandre Bouglione avec qui elle fonde le cirque Romanès. Les gitans deviennent alors sa famille d’adoption et source d’inspiration. Elle a une vingtaine d’années lorsque ses écrits sont remarqués par le poète Jean Grosjean, lecteur chez Gallimard. Elle se lie d’amitié pour Jean Genet et, en réponse à une phrase désobligeante de celui-ci, elle écrit La Nuit spirituelle : « Je ne veux plus la voir, elle me contredit tout le temps. D’ailleurs Lydie est une femme et je déteste les femmes », avait-il déclaré. Elle publie une biographie du poète en 2006 La Chaste vie de Jean Genet aux éditions Gallimard.

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e-generation

22 Juillet 2014, 22:57pm

Publié par Fr Greg.

e-generation

E-Génération pour génération « connectée », nous tchattons, twittons, likons à tout moment. Nos téléphones et nos ordinateurs sont devenus des extensions de nos corps, de nos cerveaux, bouleversant ainsi notre rapport au monde et les codes du« vivre ensemble ».

 

 

E-Génération c'est un monde où se croisent des personnages loufoques, attachants, drôles, émouvants, confrontés à des situations décalées, burlesques, absurdes, parfois dramatiques.

 

 

E-Génération c'est l'histoire d'une génération pleine de contradictions, à la fois désenchantée et à la fois forte d'espoirs et de rêves.

 

 

E-Génération, c'est vous, c'est nous, c'est le monde que nous partageons et cette question qui prend tout son sens :« Sommes-nous encore capables de former un groupe, un vrai groupe?»

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Motobécane

21 Juillet 2014, 10:04am

Publié par Fr Greg.

Motobécane

GENIAL!

Un texte écrit et interprété par Bernard Crombey, seul en scène, impressionnant d’authenticité. Le drame poignant et infiniment triste d’un homme seul et blessé.

 

 

Victor, surnommé “Motobécane“, mène une vie simple et sans histoires. Récolter les bouteilles vides, collectionner les étiquettes et prendre plaisir à respirer “el bon air à campagne“ en roulant sur sa mobylette bleue, voilà son gagne-pain et quelques petits bonheurs. Ce “quitte à quatorze“ (l’école) écrit sans manquer un “s“ à la fin des mots. Il n’est pas si bête.  Puis sa vie bascule. Il rencontre la “tiote“ Amandine, la recueille naïvement chez lui parce qu’elle ne veut plus aller à l’école, ni retourner chez elle car sa mère la bat. Emu par l’enfant, touché par le fait que quelqu’un lui accorde autant d’attention, il ne la ramène pas chez elle et la garde auprès de lui plusieurs semaines. Les gendarmes, à la recherche de la petite, finissent par l’arrêter, par hasard.

Drame poignant

Avec l’accent picard, Bernard Crombey  retrace l’histoire de cet homme blessé,  qui écrit sa “vérité à l’exacte“ depuis sa “chambre à barreaux“, drame poignant d’une  solitude irrémédiable et sans issue.  Au-delà des clichés du terroir campagnard, d’un vocabulaire et d’une syntaxe qui peuvent prêter à sourire, cet accent et ces mots simples donnent à l’interprétation un relief humain particulier : la langue s’enrichit d’étonnants raccourcis poétiques et d’une saveur particulière, et cette espèce d’étrangeté du verbe n’empêche en rien la proximité avec le spectateur, bien au contraire. Une telle langue ne constitue pas un masque, elle révèle au contraire cet homme dans toute sa naïveté et sa sincérité, faisant de la scène de théâtre le lieu d’une incarnation étonnamment  juste et sans fard. « Il est fondamentalement honnête », dit Bernard Crombey de son personnage, qu’il a créé en s’inspirant du roman Le Ravisseur de Paul Savatier, roman imaginé  à partir d’un fait-divers de 1975. Cette confession désespérée d’un homme seul au monde, forcément très malhabile avec les juges, impressionne par son authenticité, et par son infinie tristesse malgré le verbe éminemment savoureux.

 

Agnès Santi

http://www.journal-laterrasse.fr/

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Spectacle décalé, déjanté, mais génial!!!

21 Juillet 2014, 00:54am

Publié par Fr Greg.

Spectacle décalé, déjanté, mais génial!!!

 

Elles clignotent dans la nuit, les lettres du mot « dancing », comme un appel à la fête. Les habitués du festival Les Invités de Villeurbanne et les fans de la compagnie 26 000 Couverts arrivent en nombre : en cette mi-juin humide, ils ne voudraient pour rien au monde rater la dernière création de ces Dijonnais spécialisés dans le détournement de situations. D'ex-brillants petits jeunes du théâtre de rue qui déve­loppent depuis quinze ans - dans une autre veine que celle de Royal de Luxe - un réper­toire (même un Shakespeare !) et une curiosité gourmande pour tous les genres.

Cette fois, nous voilà conviés au cabaret dans un lieu que la compagnie trimbale partout et vénère comme un cocon : un parquet de bal des années 50, dont l'intérieur bois, métal et hublots ronds, est tout de suite accueillant. Bar d'un côté, scène de l'autre, spectateurs au milieu. De part et d'autre du rideau rouge, jamais parfaitement tiré, se laissent voir des portants remplis de costumes. Philippe Nicolle, le metteur en scène reconverti en M. Loyal déprimé, déclare : « On voulait un music-hall sur le thème de l'Idéal, mais on a vite compris que chacun avait une version très personnelle de la chose. »

Barouf de l'orchestre rock-jazz et premier numéro qui finit comme un éloge du... barbecue merguez-canettes entre copains ! On s'en doutait, les 26 000 Couverts ne renoncent pas à leur style : égratigner, en le déplaçant légèrement façon Tati, le quo­tidien consensuel et petit-bourgeois, ou s'enfoncer dans l'absurde le plus accompli, à la manière des Monty Python (mention spéciale au numéro des Rolling Bretzels). Hommage à l'air du temps qui stigmatise tant les artistes, ces inventeurs perfides des « manifs de droite » de l'été 2003 se délectent ici aussi des lieux communs véhiculés sur « les intermittents, ces feignants », mais n'épargnent pas non plus les langueurs de l'artiste dans les affres de la création.


 http://www.telerama.fr/

Spectacle décalé, déjanté, mais génial!!!

 

C'est le moment de courir vite à Avignon ! J'ai testé  ce spectacle proposé par la Scène nationale. Et malgré notre réserve habituelle, nous nous sommes carrément roulés par terre. Un lieu atypique - une salle de bal avec rideaux de velours rouge - des acteurs désopilants entre Monty Pithon, Fellini, Pipo DelBono, les Marx Brothers (and more)… c'est dire ! De l'absurde à la poésie pure, 2h50 d'un moment imprévu, férocement drôle, superbement déroutant, absolument émouvant et totalement "26 000 couverts". Ne ratez sous aucun prétexte les cartons ou les cowboys flutistes ! Du grand art vivant et du grand burlesque qui casse la baraque : les billets s'arrachent très vite et des sièges sont rajoutés chaque soir pour faire face à la demande. Un souffle d'air fou et frais souffle sur Avignon, allez-y ! 

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Un bijou de théâtre !!!

20 Juillet 2014, 00:46am

Publié par Fr Greg.

Attention Chef d'oeuvre ! Avignon off 2014!

Attention Chef d'oeuvre ! Avignon off 2014!

Quoi ? Une adaptation virtuose du livre de Jean Teulé sur un fait divers historique, survenu en Dordogne durant la guerre de 1870. Avant de partir au front, un jeune villageois apprécié se rend à la foire annuelle. Une phrase sortie de son contexte et le voilà pris à parti par voisins et amis, accusé d'être pro-Prussiens. La haine collective rampe, la violence fermente et la barbarie jaillit...

Qui ? Un duo de metteurs en scène et comédiens complémentaires, cofondateurs de la compagnie Fouic Théâtre. A Jean-Christophe Gollé, la parole, non-stop (il interprète la victime et les bourreaux) ; à Clotilde Morgièvre, un rôle quasi muet mais pluriel (la mère, la mégère, l'aimée...) et d'un symbolisme puissant. A leurs côtés, deux musiciens impriment au récit de saisissantes vibrations.

Pourquoi ? Pour sonder le mystère de cette folie incontrôlée qui parfois s'empare d'une communauté. De la foule qui exécute de supposés collabos à la Libération au lynchage de touristes innocents à Madagascar, les exemples se multiplient...

Comment ? En sortant l'événement de son carcan pour en souligner l'intemporalité. Un décor modulable ; des costumes tout en contrastes (une comédienne au look 50's, des musiciens très Men In Black, un narrateur au costume mi-rustique, mi-dandy), des riffs électro-rock menaçants ou des airs de comptines enfantines sur lesquels les acteurs fredonnent des horreurs ; une cuisinière au coup de hachoir éloquent... La pièce fourmille de trouvailles scéniques qui produisent des effets très spéciaux sur le spectateur. Le laissant pétrifié d'émotion et d'admiration.


En savoir plus sur http://www.telerama.fr/scenes/mangez-le-si-vous-voulez-chronique-d-une-violence-ordinaire,110351.php#dFqQCvCu172931m1.99

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Interview en direct d'Avignon

15 Juillet 2014, 11:24am

Publié par Fr Greg.

du minuscule et de l'imprévisible" d'après Christian Bobin. 16h45. Chapelle de l'oratoire. Avignon Off

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En direct d'Avignon !

15 Juillet 2014, 10:49am

Publié par Fr Greg.

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Alléger cette vie

9 Juillet 2014, 23:58pm

Publié par Fr Greg.

Alléger cette vie

Je voudrais alléger cette vie, mais par le vrai et non par le faux.

Le cœur brûlant et muet peut engloutir toutes les métaphysiques, tous les livres révélés.

 

L’amour embrasse toutes les saisons du temps et les rassemble.

En une seule seconde, elle fait une gerbe de tout l’or de l’autre. 

 

On n’a qu’une vie, et on l’écrit en la vivant.

Les ratures sont nos blessures, mais tout est gardé.

Peut-être qu’en mourant on emporte notre manuscrit avec nous, avec ses obscénités ou ses splendeurs, ses fautes d’orthographe et sa calligraphie incertaine.

 

Quand c’est très bien écrit, alors hosanna !

Parfois même les ratures sont belles comme des enluminures.

 

Certaines souffrances sont belles comme des œuvres d’art.

L’idéal serait de vivre comme Bach écrivait ses partitions.

 

Christian Bobin « La Lumière du monde », paroles recueillies par Lydie Dattas

 

 

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Consommer, humanum est.

7 Juillet 2014, 07:47am

Publié par Fr Greg.

Consommer, humanum est.

 

Il occupe son samedi et pas mal de ses loisirs à remplir un caddie, puis sa maison. Il n’est pas seul, ils sont toute une masse pour qui consommer, c’est vivre, et acquérir, posséder, c’est  réussir sa vie. Le consommateur se déplace en troupeau à la périphérie des villes. Transhumance qui peut parfois lui faire faire des dizaines de kilomètres, alléché par l’odeur de la bonne affaire, concept qui se divise en deux catégories.

Le « pachère », il aura, ou tout du moins l’impression d’avoir, été au prix le plus compétitif. Une sorte d’accès à l’élite de ceux qui savent où et comment, mieux acheter, mieux négocier, bref, le gros malin, le meilleur que les autres qui font le même sport.

Le « topdutop » -rare ou nouveau, mais pas vraiment donné pour cause de marge maximum – il l’aura avant les autres et se donnera ainsi  l’impression d’être le premier, l’unique, et de pouvoir se payer d’égo en  brillant avec son truc hors de prix -et faisant double emploi avec un autre machin d’avant, acquis seulement 6 mois auparavant, mais vieilli par l’arrivée de l’autre tout pareil, mais mieux, quoi-, au firmament des repas de famille, des diners en ville, de la machine à café, ou de la terrasse du café de l’Hôtel de Ville.

 Cette surchauffe de carte de crédit est, bien sur, soigneusement préparée en amont, pas par lui, mais à son insu. Par ses écrans, par sa radio, par son journal, par sa boite aux lettres, par de laids panneaux de 4 mètres sur 3  à l’entrée des villes, par son réseau de relations, par son travail, voire même par une certaine Nathalie avec un curieux accent qui l’appellera personnellement au téléphone pour lui accorder de nombreux avantages -surtout s’il est propriétaire-, et même par avion sur la plage,  oui,  un faisceau d’influence présent partout exposera massivement notre consommateur à de multiples stimuli, entretenant la flamme par tous les moyens, y compris les plus vils : la frustration, le sexe et la luxure, la jalousie, la puissance seront ainsi mises en valeur pour activer son passage à l’acte d’achat. Les réseaux dits sociaux –oui, ceux gratuits, ou le consommateur, c’est lui le produit- achèveront le travail pour donner sens à ses achats avec des débats comparatifs et passionnés.

Si par malheur, son compte en banque ne lui permettait pas d’armer de quoi satisfaire ses envies devenues pressantes, son avenant banquier ou un sympathique conseiller d’un organisme de crédit, deux altruistes pleinement dévoués à sa réussite personnelle lui accorderont un généreux emprunt à un taux jamais vu. Le pas vu pour lui étant surtout en l’occurrence les lignes minuscules du contrat qu’il n’a pas lu, et qui masquent des clauses restrictives qui augmenteront sa précarité ou sa dépendance, c’est selon.

Une fois ferré, il prendra ses aises comme un poisson dans l’eau des galeries marchandes et autres hypermarchés. Il aura accès à ses cartes de fidélité, au statut de client privilégié qui reçoit un mail ou un SMS par jour de ses marques les plus achetées préférées, il sera invité à des ventes privées –à7h du mat avant d’aller pointer, au pire il prendra un jour de congé, non mais, oh !-, il recevra même des propositions rémunérées en cadeaux commerciaux d’instituts qui lui diront qu’ils testent des produits et font appel à lui pour ses compétences, tout cela pour ne pas lui dire que ce sera bien lui et seulement lui l’objet du test, pour mieux profiler et analyser son comportement, et augmenter ainsi son temps de présence dans ces merveilleux lieux de vies conviviaux que sont les zones d’activités commerciales.

 

Le meilleur étant de devenir le vendeur de ses propres consommations, en invitant son réseau à des réunions de démonstrations chez soi -pas de frais pour la marque faut laisser les prix bas-, voire en intégrant des systèmes pyramidaux plus ou moins sectaires, payé à la commission à temps partiel, -pas de charges de salaires pour la marque, faut laisser les prix bas- histoire de piquer du boulot aux autres puisqu’il y en aurait déjà trop.

 

Pourtant, le peuple des consommateurs est surveillé par les économistes, les politiques et les spéculateurs comme du lait sur le feu, ces trois là parlent volontiers en son nom. Les premiers veillant à ce que la libre concurrence s’exerce pleinement, jusqu’à son paroxysme, avec la création de monopoles privés sur des services commerciaux devenus des besoins quotidiens, se substituant parfois en une illusion de service public; les seconds inquiets du moral des ménages et leur consommation, mais tellement omnibulés de voir la croissance exister pour prouver la justesse de leurs décisions qu’ils se perdent dans leur dictionnaire en bois,  lorsqu’elle stagne ou recule pour  éviter de prononcer le mot médiatiquement mortel ; quant aux troisièmes, tous occupés à leurs loteries mercantiles, ils miseront sur la start-up innovante pour créer l’une de leurs fameuses bulles si rémunératrices, qui produira l’objet ou le service dont les consommateurs branchés et d’avant-garde raffolent, préfigurant les montagnes de ventes à venir, et des bénéfices liés.

Oui, ce peuple des consommateurs n’est pas du tout surveillé pour sa dangerosité, vous pouvez vous calmer. Croyez-vous qu’il jouerait d’un rapport de force favorable avec les trois pouvoirs d’influence précédemment cités. Imaginez un peu les conséquences d’une semaine d’abstinence, sans âme qui vive à Plan de campagne, aux 4 temps, Atlantis, ou au Carré Sénart… Imaginez le pouvoir de nuisance que présenterait un tel mouvement pour exiger ce que les urnes ou le syndicalisme ne nous donneront plus jamais.

Que nenni, rien, il ne se passera rien, ne pas consommer, n’y pensez pas une seule seconde, faire comme les pauvres ou ces écolos tristes, hors de question ! Non, nous ne pouvons vraiment pas envisager cela. En effet, la seule liberté que les hommes sont encore à même d’imaginer : la liberté de choisir devant les rayons des supermarchés.

 

http://blogs.mediapart.fr/blog/joseph-g

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Racolage actif !

6 Juillet 2014, 09:40am

Publié par Fr Greg.

Racolage actif !


Avignon : S’il ne s’agissait que de produire un spectacle devant un public, donner un texte, donner à voir des moments d’existence, éclabousser l’assistance d’un peu de lumière, lui verser un peu de gaité sur son cœur la tâche serait relativement simple…

mais, il s’agit en Avignon d’aller comme se prostituer : arpenter le trottoir des heures durant, aller chercher le client potentiel, le séduire, apprendre à se vendre, rendre ‘sa marchandise’ attrayante, racoler activement quoi… 

fr Grégoire.

 

Racolage actif !

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La vie épistolaire ressemble à celle du sommeil. Elle se déroule en marge des œuvres et des groupes.

6 Juillet 2014, 09:36am

Publié par Fr Greg.

La vie épistolaire ressemble à celle du sommeil. Elle se déroule en marge des œuvres et des groupes.

 

 

Lettre de Cocteau à ses amis

15 juin 1945

Chers Amis connus et inconnus,

Je n'aime pas écrire. J'aime l'encre lorsqu'elle commence à vivre, c'est-à-dire lorsqu'elle se change en gestes de théâtre ou de films, en livres qui circulent de main en main.

Au reste l'encre ne nous aime pas, ni le papier. L'encre refuse d'être écrite. Le papier refuse d'être couvert. Il en résulte une bataille dont l'œuvre témoigne comme un lien de victoire, une preuve d'héroïsme.

Le téléphone ajoute à cette vie de fantôme que tisse l'homme moderne, et qui ne laisse aucune trace familière.

La comtesse de Noailles faisait du téléphone un violon (sa viole d'Ingres). Elle en jouait à merveille. Elle maintenait l'appareil entre sa joue et son épaule. Elle parlait, parlait, parlait, sans se rendre compte que les forces s'épuisent à cet exercice et que le fluide humain va se perdre dans le sol comme la foudre.

Si le téléphone avait existé, que saurions-nous d'une Madame de Sévigné, d'une Madame de Staël? Ces dames loquaces eussent téléphoné interminablement, l'une à sa fille, l'autre à Benjamin Constant. Il est facile de mesurer à leur correspondance, ce que le téléphone nous ôte.

Marcel Proust, lui, de sa chambre nocturne, de ses murs de liège, de son désordre où s'accumulait une fourrure de poussière, écrivait des lettres et téléphonait. Il combinait la voix (dont sa main gantée barbouillait sa barbe) et l'encre, pour tendre, croiser, nouer les fils de l'étonnante toile d'araignée où il savait prendre les âmes.

Quelquefois l'écriture me fatigue. Former les jambages me semble un travail au dessus de mes forces. C'est alors que je dénoue la ligne de l'encre afin de la renouer autrement, et que je dessine. Pourquoi pas?

Nous lisons toujours mal une lettre, nous croyons la lire. En réalité nous ne prenons d'elle que ce que nous y cherchons vite. C'est à la longue qu'une lettre donne son sens, lorsqu'il est trop tard et que nous la retrouvons sous une pile de livres. Le recul nous permet d'en mesurer le relief et la profondeur.

A ce compte ce qui importe c'est l'aspect d'une lettre car c'est à cet aspect qu'un graphologue nous découvre, bien mieux que d'après notre style.

Le dessin ajoute à cette vie intime qu'une lettre doit communiquer à son lecteur.

Voyez: j'inaugure les "Nouvelles Epîtres" et, au lieu de vous écrire une lettre-préface à cette collection, je me laisse prendre à vous écrire n'importe quoi, à bavarder avec vous; à vous traiter avec la désinvolture d'un ami intime.

Rien ne dégage plus cette électricité magique d'un bavardage entre personnes qui s'entendent à demi-mot, que le genre épistolaire.

Les poètes, en somme, ne reçoivent que des lettres d'amour, des cris d'appel, des signes de souffrance. S'ils répondent, ils reçoivent réponse à leur réponse. Réponse qui en exige une autre. Hélas les lettres sont innombrables. Chacun croit être le seul à nous écrire. Que faire? Les artistes de cinéma reçoivent une masse de lettres, mais ce qui compte pour eux c'est la réserve mystérieuse des personnes qui les aiment et n'osent écrire. Le reste se limite à des demandes d'autographes, sous la forme de déclarations d'amour.

En ce qui concerne le poète le problème est autre. Chaque lettre vaudrait une véritable prise de contact. Et s'il multipliait de tels échanges le poète ne pourrait poursuivre le mécanisme de l'oeuvre à cause de laquelle on le sollicite.

La Jeunesse est exigeante. Elle a raison. Comment lui faire admettre qu'entre elle et le poète il ne peut s'établir qu'un échange d'ondes et qu'il faut deviner que certains silences ne relèvent ni de la paresse ni de l'orgueil.

La vie épistolaire ressemble à celle du sommeil. Elle se déroule en marge des oeuvres et des groupes. Soudain elle se montre après la mort. Contrairement aux récits des rêves qui se fanent dans le règne de la veille comme des plantes de mer qu'on sort de l'eau, les lettres commencent à vivre dans l'inactualité. Elles y puisent, par quelque prodige, une actualité toute neuve.

Ecrivez, conservez les lettres, relisez-les. Laissez-les travailler dans l'ombre.

Votre Jean Cocteau

 

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Ce soir : "du minuscule et de l'imprévisible" Création festival Off 2014

5 Juillet 2014, 07:05am

Publié par Fr Greg.

Ce soir : "du minuscule et de l'imprévisible"                         Création festival Off 2014
à diffuser !

à diffuser !

  Au festival OFF 2014 du 05 au 27 Juillet, une création entièrement réalisée à partir d'interviews et textes de Christian Bobin, intitulée "du minuscule et de l'imprévisible".
 
Ce monologue se veut une redécouverte de la vocation humaine première: s'émerveiller de ce qui est vivant, un éloge de la vie lente et amoureuse qui veut se garder de tomber dans le mièvre, le fade ou le gentil, un réapprentissage à voir, à s'arracher de cet empêchement de trop connaitre, à cette illusion ou l'on croit connaitre, un chant d’espérance humaine sur nos luttes banales, nos morts quotidiennes, sur la joie d'être vivant malgré la dureté du monde qui est parfois comme disait Robert d'Antelme un 'grand camp de concentration invisible'... bref, un rafraîchissement de la vie et du regard qu'on pose sur notre quotidien: "le baiser d'une lumière sur notre cœur gris"....
 
Merci de diffuser.
du minuscule et de l'imprévisible
du 05 au 27 Juillet,
chapelle de l'Oratoire, 16h45. 
Monologue de 55min.
Résa: 0786556762

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Ce pays qu'on abat

4 Juillet 2014, 07:55am

Publié par Fr Greg.

Ce pays qu'on abat

 

Natacha Polony est chroniqueuse au Figaro. Son dernier livre,Ce Pays qu'on Abat, vient de paraître.


Votre dernier livre, Ce pays qu'on abat, reprend les chroniques que vous avez publiées dans le Figaro entre 2009 et 2014. Quel en est le fil rouge? Comment avez-vous vu évoluer le pays durant ces cinq dernières années?

 

Natacha Polony: A travers ces chroniques, j'ai notamment essayé de défendre la République comme cœur d'une vision digne de l'être humain. Surtout, j'ai tenté de mettre en œuvre ce qui sans doute manque le plus aux débats qui nous animent: un système de pensée cohérent. Ce qui explique l'impuissance actuelle des politiques, de droite comme de gauche, c'est justement leur absence de cohérence et leur incapacité à penser en système. Bossuet écrivait «Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes «Peut-on vraiment déplorer l'instrumentalisation du vivant à travers les OGM et trouver libérateur et moderne l'instrumentalisation de l'humain à travers la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui? La préservation du monde va de pair avec la préservation de la civilisation. Il faut comprendre que les deux sont liés et que défendre la décroissance, c'est aussi assumer une forme de conservatisme. Lorsque que je défends l'écologie et la bioéthique, c'est parce que je suis conservatrice. Non pas au sens négatif du terme comme repli sur soi, mais parce que je crois en la nécessité de préserver et de transmettre ce qui nous a précédés. Nous sommes des «passeurs», comptables du monde dont nous avons hérité, et que nous léguerons aux générations futures.

Vous décrivez «un pays fracturé, blessé, en proie à toutes les formes de rejets et de détestations». Quelles sont ces fractures et ces angoisses qui minent le pays?

Elles sont nombreuses et ce qui est certain, c'est qu'elles se creusent. Si non, comment expliquer que de jeunes gens qui ont entendu le discours de l'école républicaine partent en Syrie pour le djihad? Comment expliquer que de jeunes gens ayant passé douze ou treize ans sur les bancs de l'école française soient malgré tout capables de torturer un jeune garçon au fond d'une cave parce qu'il est juif? Que d'autres lynchent mortellement pour une photo de réverbère ou un accrochage sur l'autoroute? Dans mes chroniques, je suis attentive à ce genre de drames qui, bien plus que de simples faits divers, nous racontent le drame de la société: la fracture entre ceux qui sont intégrés et ceux qui ne le sont pas.

 

Qu'entendez-vous par «intégration»? Doit-on réduire la crise de l'intégration à la question de l'immigration?

Lorsque je parle d'intégration, je ne fais pas seulement référence aux questions d'immigration. L'intégration est le devoir des adultes à l'égard de l'ensemble de la jeunesse qu'il s'agit d'intégrer au monde qui l'accueille. Qu'elle vienne d'ici ou d'ailleurs. Or, la société de consommation, qui fonctionne sur l'instrumentalisation des pulsions et l'instantanéité, rend quasiment impossible cette tâche essentielle. Une société dans laquelle des jeunes gens toujours plus nombreux veulent tout, tout de suite, au point de gommer la plus élémentaire empathie, est une société gravement malade. Nous avons malheureusement en partie échoué dans notre mission de transmission parce que nous avons peu à peu affaibli ou détruit toutes les institutions permettant cette transmission, école, famille, églises, armée, partis politiques ou syndicats. Nous avons échoué à inscrire nos enfants dans une civilisation, mêlant l'héritage gréco-romain et judéo-chrétien, qui a voulu, plus que tout autre, accorder sa dignité à toute vie humaine en proscrivant la violence et la loi du plus fort. Rien à voir donc avec une quelconque couleur de peau.

 

Comme l'explique Christophe Guilluy, les fractures françaises se traduisent également par l'explosion de l'espace géographique. Tandis que les grandes métropoles bénéficient des bienfaits de la mondialisation, une partie de la société française est reléguée physiquement, mais aussi culturellement et économiquement à la périphérie. Un abandon qui se traduit jusque dans nos paysages défigurés par d'affreux lotissements qui uniformisent le pays. Ces gens-là souffrent de voir disparaître leur mode de vie, qui constituait leur identité en tant que Nation et en tant que civilisation. Dans l'Europe et la mondialisation, ils se sentent dépossédés de leur histoire et de leur destin, d'autant plus qu'ils ne sont pas consultés par leurs dirigeants. La seule fois qu'ils le furent, le Parlement réuni en Congrès s'empressa de s'asseoir sur leur vote. C'est l'une des causes du malaise français, qui peut se transformer dans les urnes en colère et en protestation.

 

La plupart de vos chroniques sont extrêmement sombres. Le déclin de la France est-il inexorable ou existe-t-il encore des raisons d'espérer? Lesquelles?

Le mot «décliniste» a été inventé par ceux qui encouragent leurs enfants à quitter la France et qui veulent voir cette dernière se fondre dans la mondialisation. L'objectif est de décrédibiliser les Cassandres qui ont le mauvais goût de mettre le doigt où ça ne va pas et de se revendiquer de la nation et de la République. Je ne suis pas décliniste car je crois en la France. Ceux qui souffrent de voir la France se déliter sont aussi ceux qui l'aiment le plus, y compris dans sa beauté, dans ses paysages. Ce pays a porté un moment de l'histoire humaine à travers Rabelais, Montesquieu, Voltaire ou Hugo. A travers, surtout, un idéal fondé sur l'émancipation des individus par le savoir. L'idée républicaine n'est pas une nostalgie. Mais pour continuer à vivre, elle doit s'incarner de manière charnelle.

 

A travers votre livre, vous construisez une pensée à la fois anti-libérale sur le plan économique et anti-libertaire sur le plan social. Selon vous l'extension à l'infini du marché finit par être destructrice des valeurs et par empêcher toute transmission. Le vieux clivage droite/gauche est-il définitivement mort?

En effet, le clivage droite/gauche n'est plus opérant aujourd'hui. Toute une partie de la droite a abandonné son conservatisme sur les valeurs pour se raccrocher à la modernité, au culte du Progrès désormais détaché de tout impératif moral, mais consacré à l'extension supposée du bien-être par la marchandisation de tout. Face à cela, toute une partie de la gauche a servi d'idiot utile à l'extension du marché dans tous les domaines de la vie en refusant de voir que la destruction des institutions anciennes et l'extension à l'infini de nouveaux droit individuels faisaient le lit de la société de consommation. Je crois que le clivage droite/gauche doit se redéfinir autour de la question de la mondialisation avec d'un côté ceux qui sont favorables à l'extension d'un marché mondialisé et une mise en concurrence universelle et de l'autre les tenants d'une protection des citoyens par l'exercice de la souveraineté des peuples. Il doit également se redéfinir autour de la notion de progrès: avec d'un côté ceux qui voient dans l'histoire de l'Humanité celle d'une conquête permanente et infinie sur la nature et la tradition et ceux qui pensent que l'individu est confronté à ses limites. Partout règne l'incohérence au nom d'une hémiplégie politique. Et dans ce jeu de dupes, les uns et les autres poursuivent un intérêt commun: éviter que n'émerge une véritable alternative qui ne soit pas de ces extrêmes en forme de repoussoir.

 

Justement, hormis Debout de la République de Nicolas Dupont-Aignan et ce qui reste du chevènementisme, le FN est le seul parti à lier à la fois la critique du néolibéralisme économique et celle du «néomoralisme soixante-huitard». D'une certaine manière, Marine Le Pen semble vous rejoindre idéologiquement. En quoi le Front national reste-t-il, selon vous, un parti «extrême»?

Extrême ou pas, ce n'est pas le débat. Le drame politique d'aujourd'hui est qu'il n'y a plus personne pour incarner à la fois un récit national et une défense de la souveraineté du peuple et de la Nation. La République en tant que projet collectif fait se gausser des politiques gavés de discours pseudo pragmatique et de soumission à l'ordre du monde libéral et libertaire. Il est vrai que Marine Le Pen a siphonné le corpus idéologique de Jean-Pierre Chevènement ou Philippe Séguin. Sur le papier, cela peut sembler intéressant. Mais, j'ai du mal à comprendre comment des militants qui ont soutenu pendant tant d'années le «reaganisme» de Jean-Marie Le Pen peuvent aujourd'hui défendre exactement l'inverse. Comment des gens qui étaient anti-laïcs et refusaient la loi sur les signes religieux à l'école peuvent aujourd'hui proclamer leur amour pour la laïcité et l'école républicaine? J'y vois une forme d'opportunisme et je me méfie des impostures derrière les postures.

Par ailleurs, il y a, non pas forcément chez les électeurs du FN, mais chez certains militants et soutiens, des gens chez qui la frustration a basculé dans la haine. Il suffit de surfer sur internet pour trouver dans certains propos un déferlement de violence qui me révulse. Je ne connais pas Marine Le Pen et il est possible qu'elle soit sincère dans sa démarche (même si je crains qu'elle soit surtout représentante d'une génération de politiques, tels qu'on les voit aussi dans les autres partis, sans architecture idéologique et fonctionnant à l'opportunisme) mais il lui sera très difficile de se débarrasser de ses militants historiques. Et puis, en politique, on ne porte jusqu'au bout que les idées auxquelles on croit de toute son âme.

 

Chez Marianne ou en vous engageant au côté de Jean-Pierre Chevènement, vous avez-vous-même défendu l'émergence d'une troisième voie. Comment expliquez-vous que le Front national soit en passe de réussir à créer une alternative alors que tant d'autres plus modérés ont échoué? Vous-même, avez-vous le sentiment d'avoir raté quelque chose?

C'est incontestablement un échec fondamental. En 2002, Jean-Pierre Chevènement a été le premier à parler de désindustrialisation, des conséquences potentiellement désastreuses du traité de Maastricht, de l'indépendance de la BCE, de la crise de l'intégration. L'avenir a montré qu'il avait raison, que nous avions raison. Malheureusement nous avons échoué politiquement et tout s'est arrêté le 21 avril 2002. Les raisons de cet échec sont complexes et ne peuvent être résumées en quelques phrases, même s'il est probable qu'un certain sectarisme a joué. Le drame politique d'aujourd'hui est qu'il n'y a plus personne pour incarner ces idées. D'autant que les médias et les partis de gouvernement ont systématiquement et méthodiquement éradiqué toutes les dissidences en les assimilant au Front National pour les décrédibiliser. En cela, ils ont offert un boulevard à Marine le Pen en lui laissant le monopole de la contestation d'un système que tant de Français jugent étouffant et générateur de malheur et de pauvreté. Alors, cette aspiration politique à une forme de gaullisme social existe et pourrait même être majoritaire dans le pays, mais elle n'est pas incarnée pour l'instant et c'est un des aspect de notre crise morale et politique.

Alexandre Devecchio

http://www.lefigaro.fr/vox/culture

 

 

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La racine de la vie c'est la contemplation (IV)

2 Juillet 2014, 07:32am

Publié par Fr Greg.

La racine de la vie c'est la contemplation (IV)

La contemplation de la nature constitue-t-elle une partie du bonheur ?

C’est au-delà. Comment ne pas être heureux quand on est devant le livre le plus enluminé du monde, le plus bienveillant, malgré les tempêtes - je sais aussi l’autre face de la nature - malgré les choses violentes qui peuvent parcourir la terre parfois ? C’est le livre foncièrement le plus bienveillant. Comment ne pas être heureux quand on se découvre soi-même à l’intérieur de ce livre ?


Vous évoquiez le pissenlit, vous faîtes aussi souvent référence au tournesol dans vos chroniques, ce sont des symboles solaires. Y a-t-il une raison particulière à ça ?

Le soleil, c’est le grand maître. Sans lui, il n’y a rien. Et puis c’est un peu mon maître d’écriture. J’aimerais que chaque page - je n’y arrive pas - ait la densité d’un soleil. C’est vers quoi je tendrais. La plus grande leçon nous est donnée par cet astre. Si on le regarde même du point de vue des savants, c’est très beau. De lui, vient la lumière, et pourquoi vient la lumière ? Elle vient des sacrifices qu’il fait. Puisque, sans arrêt, des explosions se produisent en sa surface : c’est un astre qui perd sans arrêt de sa force pour nous donner une lumière vitale, indispensable. C’est le grand maître et je crois qu’on peut comprendre que les Égyptiens en aient fait un dieu.


Pourriez-vous faire un inventaire à la Prévert de petits riens qui font le bonheur quotidien ?

Le bonheur, ce ne sont pas des choses qui peuvent faire partie d’une liste.


Rien n’est plus important qu’autre chose ?

Rien n’est prévisible et rien ne vient jamais qu’une fois. Il n’y a pas de méthode, je ne crois surtout pas aux méthodes pour être heureux. Je pense qu’il faut même ne pas chercher à être heureux. Je pense qu’il faut chercher juste à voir le mieux possible cette vie, à la voir comme elle est, parce qu’elle va nous quitter, parce qu’on va la quitter, donc ce serait dommage de ne pas l’avoir rencontrée. Je crois qu’il faut chercher à la voir, vraiment, et que dans cette vue, le bonheur, un état très heureux, très paisible, viendra de lui-même. Je ne pense pas que le bonheur soit une marchandise ou quelque chose qu’on puisse obtenir par une méthode.


Y a-t-il une question que je ne vous ai pas posée ?

Est-ce que le vin est bon ?


Absolument, alors est-ce qu’il est bon ?

Oui, il est bon.

 

 

 Christian Bobin

 

Source texte : http://www.le-monde-des-religions.fr/articles/christian-bobin-bonheur-christianisme.html

 

 

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