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QUE CHERCHEZ-VOUS ?

Il me reste d’avoir pleuré. Je n’ai pas d’autre trésor.

24 Novembre 2020, 06:18am

Publié par Grégoire.

Il me reste d’avoir pleuré. Je n’ai pas d’autre trésor.

 

« La vraie bonté, la bonne volonté toute pure, la simplicité des petits enfants, tout ce qui appelle le baiser de la Bouche de Jésus, on sait bien qu’on ne l’a pas et qu’on n’a vraiment rien à donner à de pauvres cœurs souffrants qui implorent du secours. »

Léon Bloy, Au Seuil de l’Apocalypse.

 

« Il me reste d’avoir pleuré. Je n’ai pas d’autre trésor. Mais j’ai tant pleuré que je suis riche en cette manière. Quand on meurt, c’est cela qu’on emporte : les larmes qu’on a répandues et les larmes qu’on a fait répandre — capital de béatitude ou d‘épouvante ! »

Léon Bloy, Dans les ténèbres.

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Roi, comme un agneau ..

22 Novembre 2020, 15:52pm

Publié par Grégoire.

Roi, comme un agneau ..

Jésus-Roi, c’est Jésus qui nous révèle la place qu’il nous donne : Il nous veut Roi, et le voulant, on l’est ! Sa parole est efficace : lorsqu'il parle, cela est, immédiatement, réalisant en moi ce qu’elle signifie : « Venez les bénis, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde ». 

Cette dignité royale est donc celle des plus petits, des plus pauvres, de ceux qui ne peuvent s'appuyer sur aucune de leurs qualités ! Et c'est cela la royauté et le gouvernement de Jésus : il vient nous donner à vivre tout ce qu'il est ! 

Par la Révélation, je sais que ce qui est à Jésus est mien. Je suis donc roi avec lui, et Jésus  gouverne -ou conduit chacun- de l'intérieur, en s'emparant de tout nos manques pour nous marquer, nous enfanter. Et, on exerce ce 'pouvoir' royal sur tout nos frères humains, dès qu'on dévoile et donne -en la vivant- notre adoption filiale qui est LE jugement de Jésus sur nous. 

Jésus n'est pas un petit juge qui pèserait en nous le bien et le mal ; Ce regard là, est celui des petits scrupuleux, constipés de l'intelligence et autres intégristes en mal de réparation. Un tel regard maladif, étriqué et matérialiste n'a jamais fait qu'organiser le désespoir et répandre la terreur sur la terre !  Il est celui de ceux qui comptent encore sur leurs petits efforts, leurs petites pénitences, leurs résultats. C’est toujours le regard de ceux qui sont très satisfaits dès qu'ils se comparent, et très déçu lorsqu'ils se regardent, et qui se tyrannisent désespérément pour y arriver et montrer aux autres de quoi ils sont capables ! Ceux dont « l’orgueil à vif n’a cure ni de patience, ni de douceur » disait Bernanos.

Jésus nous « juge » non pas en regardant notre vie de l’extérieur et selon des résultats matériels et mesurables. Son jugement c’est un regard qui nous recrée, nous fait autre. C’est cela pour lui « juger » : faire que telle personne devienne son héritier, reçoive sa dignité.. Son ‘jugement’ est celui d'un artiste divinement efficace, qui regarde la pauvre matière que nous sommes et en fait un chef-d'oeuvre sans même nous demander notre avis!

Son jugement voit toutes nos potentialités et s'en empare pour en faire une perle divine, son lieu précieux, son trésor, son secret, son repos, son royaume, sa joie !  Son jugement vient séparer en nous ce qui est pharisien, satisfait, repus, de ce qui est pauvre, nul assoiffé, et sans éclat. Et ainsi, son 'jugement', son regard sur moi me fait être quelqu'un pour lui, quelqu'un de radicalement nouveau, recréé, unique pour lui. Et oui, l'amour de Jésus est capricieux et jaloux : il ne peut pas supporter qu'on ait pas tout ce qu'il est ! Et donc il nous l'impose dès qu'il trouve en nous une pauvreté, une blessure, une attente !

En cela il "juge" : il discerne en moi ce qui est en 'attente' d'être divinisé maintenant. Pas demain, maintenant ! Et les boucs, les brebis galeuses sont celles qui déforment le jugement de Jésus en celui d'un petit juge.

Comment Jésus veut gouverner avec moi? En agissant comme lui, en étant un autre Jésus sur terre "vous êtes la lumière du monde" : en donnant gratuitement à manger, à boire de cette dignité divine que Jésus a acquise pour chacun …  Cela, c’est la justice du Roi qui ne mesure pas, qui donne avec largesse, avec excès, en faisant sien la misère du plus petit : « Sa pauvreté, fais-la tienne ! » Et qui en échange donne à vivre ce qu’il est.

Celui qui nous fait confiance, nous confie son royaume ! Il veut qu’on règne sur ce qu'Il a de plus précieux : mon frère, ma sœur, le désespéré qui souhaiterait tant qu’on lui prenne sa misère, mais qui en a tellement honte ! Le pauvre type là que je suis, c’est ça le royaume de Dieu qui nous est confié ! La médiocrité, la nullité, la lenteur et la pourriture des pauvres : c’est cela que Jésus me confie pour que j’y révèle, là, ce que Jésus en a fait !

Et il en fait quoi de celui que je considère comme un pauvre type ? et bien il en a fait : son temple, sa demeure, son lieu, son épouse, à cause de son trop grand amour, de son amour excessif, insupportable tellement il est de trop ! Et c'est à moi d'aller le lui dire, (d'aller me le dire à moi-même, puisque je suis souvent un pauvre type insupportable pour moi-même..) en le recevant comme l'épousé de Jésus, son ami, son intime !

Et cela, de fait...  on n’y arrive pas. Pas beaucoup en tout cas.. Car on n’est pas fait non plus pour y arriver, pour obtenir des résultats.. mais pour être blessé, immolé par un désir qui est plus grand que toutes réalisations, que toutes œuvres ou manifestations.

Et c'est là que l'on est pleinement roi : en croyant que nous sommes revêtu de la plus grande des dignités, que nous sommes le trésor de Dieu, mais caché, donc sans pouvoir en vivre vraiment, sans pouvoir en user. Nous sommes roi dans notre impuissance, dans nos faiblesses, nos pauvretés; Vouloir vivre de ce don de Jésus tellement énorme, c'est accepter de ne pouvoir rien faire d’autre que d’être crucifié dans notre désir de vivre ce don, cette dignité royale, divine et de la révéler à chacun;

 Être roi avec Jésus c’est donc bien ultimement accepter comme Lui d’être agneau, de passer pour un séducteur, quelqu’un qui détourne de Dieu, condamné.. pour n’être plus qu’attente, pour tout ces pauvres que sont les satisfaits et les petits juges; attente, victime, cri qui clame vers le Père : « j’ai soif »

Grégoire +

 

 

 

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Malheur à vous qui avez fait du Christ un fils de bonne famille

14 Novembre 2020, 01:17am

Publié par Grégoire.

Malheur à vous qui avez fait du Christ un fils de bonne famille

Malheur à vous qui avez fait du Christ un fils de bonne famille. Les saints et les joueurs de jazz ne sont pas des gens convenables, c’est pourquoi les connaître donne tant de joie. La main en suspens au-dessus du clavier, Thelonious Monk appelle en silence. «Il y a quelqu’un?» est la question posée. On entend la même question dans les psaumes. Chaque note est jouée dans l’espérance d’entendre la réponse. Les musiciens de jazz ne vieillissent jamais. Avec le temps, ils deviennent des montagnes sacrées aux vapeurs de tabac anglais, chefs-d’œuvre de joie-sagesse. Monk a fini ses jours dans un appartement new-yorkais, au milieu d’une centaine de chats regardant les étoiles tituber sur les eaux noires de l’Hudson, toute l’Égypte dans leurs yeux. Une baronne l’avait adopté avec son épouse. Isabelle Rimbaud, Dora Diamant, Nadejda Mandelstam: les femmes qui prennent soin des poètes, on devrait comme je le fais ici recopier leur nom, faire en sorte que la mousse du temps ne le recouvre jamais.

Dans les dernières années, Thelonious Monk ne touchait plus aucun piano, ne parlait plus. Ce n’était pas la folie. La folie est un bêlement d’agneau égaré. C’était la paix immense que savent les nouveau-nés. Il avait rejoint ce royaume jadis entrevu entre deux notes. Vivre répond à tout. Oui, sans aucun doute, «il y a quelqu’un». J’ai vu une pauvresse dans une galerie marchande compter ses sous. De sa main droite, elle prélevait une à une les petites pièces en cuivre dans sa main gauche comme on cueille des mûres, en prenant soin de ne pas les écraser. Une lumière sortait de ses mains. Son attention valait celle d’une sainte. Son courage m’éblouissait. Il faut du courage pour tout, même pour ramasser un crayon tombé à terre. Nous sommes des brouillons de poème, les tentatives que fait Dieu pour prendre l’air. La paix intérieure est la seule terre sainte.

J’écoute un hibou dans l’opéra glacé de la nuit. Je ne crois pas à ce qu’on me dit. Je crois à la manière dont on me le dit. Je crois à la vérité inexprimable des souffles. Je crois au Dieu qui fait briller le poil des chats et les yeux des vieux pianistes de jazz. Elle est si brève, la vie interminable. Je donne mon cœur aux vagabonds qui dorment dans les fossés des livres. La vie est un conte de fées avec ses forêts, ses ogres et sa chance ultime. Je ne crois à rien de raisonnable. Les saints surgissent de leurs écrits le visage barbouillé du miel des lumières, comme des ours de l’absolu. Ce qui peut être expliqué ne mérite pas d’être compris. Je crois que nous passons le meilleur de notre vie à construire des fenêtres pour encadrer le vide et que c’est la plus belle partie du conte de fées.

Christian Bobin

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La grande fatigue des satisfaits

12 Novembre 2020, 01:15am

Publié par Grégoire.

La grande fatigue des satisfaits
 
L'ironie est une manifestation de l'avarice, une crispation de l'intelligence serrant les dents plutôt que de lâcher un seul mot de louange.
 
L'humour à l'inverse est une manifestation de générosité : sourire de ce qu'on aime c'est l'aimer deux fois plus.
 
Très peu de vivants et beaucoup de morts dans cette vie - mort étant celui qui ne se lâche jamais et ne sait pas s'éloigner de soi, dans un amour ou dans un rire.
 

Il y a un creux qui est en nous, que nous ne supportons pas et qu’on va remplir avec des nourritures plus ou moins digestes. Souvent, on remplit très vite ce creux, ce vide, cette attente naissante, alors qu’elle demanderait un peu de temps encore pour nous dire ce qu’elle a à nous dire. Mais nous, on essaie de la combler tout de suite. C’est comme une question qui se pose et qu’on essaie d’arrêter. On n’y répond pas … et on essaie de la tuer.

 
Christian Bobin.

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L'ennui, cette forme turpide du désespoir...

10 Novembre 2020, 20:25pm

Publié par Grégoire.

L'ennui, cette forme turpide du désespoir...

S’il y a quelque chose qui marque franchement la vie cubaine c’est bien l’ennui. Aucun moyen d’y échapper. Pas de distraction. Pas de Google, de texto à envoyer, de jeux vidéo en ligne, de réunions de travail, de sport, de ballade. Rien à faire ! Pas même de conversation mondaine ou de ragot.

« Il n’y a rien à faire » crie le silence des cubains assis les dimanches ou le soir, quand les heures semblent alors se rallonger et ne plus finir. L’ennui est une pesanteur qui rajoute à la chaleur. Sa fuite : interdite ! Ce poids de l’ennui semble presque une norme décidé par l’état, soutenue par le climat et maintenue par la pauvreté qui affiche elle une joyeuse bonne santé. Cette lourdeur dévore tout et accouche d’une tristesse nonchalante. 

« Le monde est dévoré par l’ennui. C’est une espèce de poussière. Vous allez et venez sans la voir, vous la respirez, vous la mangez, vous la buvez, et elle est si fine, si ténue qu’elle ne craque même pas sous la dent. Mais que vous vous arrêtiez une seconde, la voilà qui recouvre votre visage, vos mains. Vous devez vous agiter sans cesse pour secouer cette pluie de cendres. Alors, le monde s’agite beaucoup. On dira peut-être (…) que l’ennui est la véritable condition de l’homme. (…) une lèpre, un désespoir avorté, une forme turpide du désespoir. » écrit Bernanos.

En Occident, on fuit l’ennui pour des choses bien plus tristes au fond. La plupart du temps, les choses qui nous distraient sont en fait très tristes. Nos fêtes, nos discussions, les médias, ou tout ce qu’on cherche comme distraction sont terriblement désespérants. Parfois bien pires que ce qu’on veut chasser. 

J’essaye de me confronter à cet ennui, à ce présent qui semble ne faire que durer. C’est un milieu transparent dans lequel tout naît, meurt et disparait sans laisser de traces. Le temps ennuyeux nous apporte et nous emporte. Tel est l’ennui ; tout passe et il reste. A Cuba, pas d’échappatoire. Se distraire reste un luxe inconnu. Sous embargo. Pas de technologie. Ni de rêve de vacances. De travail à accomplir. D’achat à projeter. De dîner à organiser. Ou de sortie culturelle. Le rhum permet de s’échapper. Pas bien loin, ni trop longtemps. Avec les réveils que l’on sait. Peut-on apprivoiser cette chose terrible de l’ennui, ce rien terriblement lourd, cet invisible qui nous blesse, ce vide qui semble stopper tout élan ? A-t-il dans cette vie une place comme le reste ? Dans la misère des jours qui se succèdent et se ressemblent, j’ai laissé l’ennui venir m’arracher à la tyrannie des projets, à la quête insatiable de nouvelles sensations, à des nouvelles autres que celle du soleil ou du ciel bleu qui sont les plus belles nouvelles du monde. Une compulsion maladive de réaliser et d’accumuler nous empêche de voir ces riens qui font qu’aucun jour n’est comme les autres. Qu’il n’y a ni jour ni nuit. Qu’il n’y a que les instants où nous sommes éveillés et ceux où nous dormons -même éveillés-. L’ennui est-il cet enfouissement mystérieux pour une nouvelle naissance de l’âme ? L’ennui me renvoie à la petite école du rien. Celle qui nous arrache au manque d’attention, à l’endormissement face au familier. Celui d’un regard, d’un sourire, d’une lassitude. Attendre. Attendre pour pouvoir se nourrir du rien. Prêter cette attention au réel qui se fait plus neuf qu’une femme obsédée par sa coiffure. Dedans le rien qu’on ne regarde même pas. Cette nourriture des pauvres qu’on ne peut acheter nulle part. Qui comble cette soif que rien de commercial ou d’utile ne peut satisfaire.  

« Un enfant qui s'ennuie n'est pas très loin du paradis : il est au bord de comprendre qu'aucune activité, même celle, lumineuse, du jeu, ne vaut qu'on y consacre toute  son âme. L'ennui flaire un gibier angélique dans le buisson du temps : il y a peut-être autre chose à faire dans cette vie que de s'y éparpiller en actions, s'y pavaner en paroles ou s'y trémousser en danses. La regarder, simplement. La regarder en face, le nez contre la vitre du ciel bleu. (…) L’ennui est un mystère. Je le vois comme ce qui précède et prépare le plus grand fleurissement. » Bobby.

Ici quand ça va sortir, ça va inonder la terre. Il y a 55 ans que cela se prépare.

 

Grégoire +, Pérégrinations d'un cherchant-Dieu

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Le manque est la lumière, donnée à tous..

5 Novembre 2020, 20:33pm

Publié par Grégoire.

Le manque est la lumière, donnée à tous..

De grandes choses dorment en nous, toujours, d’un sommeil qu’agite un peu plus la longueur accrue des jours. Quelque chose manque, toujours. A tout ce que nous pouvons faire et dire et vivre, quelque chose manque, toujours.

On peut vouloir passer outre, s’arranger. Ce qui n’est qu’un seul et inépuisable jour on peut l’oublier, on peut l’amoindrir en jours, en semaines, en mois. S’occuper. 
Parler et croire que l’on parle. Faire des choses et croire que l’on fait quelque chose. Tout s’en va. Tout glisse doucement – les voix, les regards – tout glisse doucement sur le côté, sans heurts, comme indépendamment de tout vouloir, comme un glissement de terrain.

Et tout se poursuit aussi bien. Les mêmes choses, toujours. Apparences du travail, apparences des conversations, apparences des mouvements divers. Vie apparente. Je suppose que c’est là chose banale.  Je suppose qu’il est possible de vivre ainsi longtemps, sur un long temps. Dans cette mort merveilleuse de l’indifférence.

Dans cette horrible aptitude à vivre en l’absence de tout, dans la plus silencieuse des absences. Sans âge. Sans plus vieillir, sans plus souffrir de rien. Sans doute est-ce là cette vie, que l’on dit ordinaire.

Christian Bobin

 

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