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QUE CHERCHEZ-VOUS ?

Guillaume Gallienne lit Lydie Dattas

23 Juillet 2014, 22:45pm

Publié par Fr Greg.

Guillaume Gallienne lit Lydie Dattas

Actuellement à l’affiche de la Comédie Française dans le rôle de Lucrèce Borgia, Guillaume Gallienne se prépare à investir la Cour d’Honneur du Palais des papes d’Avignon pour une lecture poétique dirigée par Olivier Py, La chaste vie de Jean Genet, un texte de Lydie Dattas. Une grande première à laquelle l’acteur se prépare avec gourmandise. Entretien.

Qu’est-ce qui vous a décidé à accepter cette lecture du texte de Lydie Dattas ?
Guillaume Gallienne - Quand Olivier Py me l’a proposé, je ne connaissais pas le texte. Lorsque je l’ai lu, je l’ai trouvé tellement bien écrit, tellement beau, que j’ai dit oui tout de suite. Le sujet et la manière dont il est traité m’ont aussi complètement convaincu.

Que pouvez-vous dire de l’écriture de Lydie Dattas ?
C’est une écriture sublime. Il y a des moments où on a l’impression qu’elle est entre poésie et essai philosophique et pourtant c’est un récit continu. Je ne peux pas dire mieux !

Comment cela va-t-il se passer avec l’orchestre régional Avignon Provence ?
Cela ne m’est jamais arrivé de lire avec un grand orchestre. C’est une première. Je vais faire un vœu ! De même que c’est ma première dans la Cour d’Honneur, je vais faire deux vœux !

Impressionné ?
Oui ! Carrément ! D’ailleurs Olivier Py a été très drôle : lorsque je lui ai demandé un conseil de jeu, il m’a répondu : « tu feras ce que tu pourras »… Ce qui m’a dédouané de l’angoisse que j’aurai. C’est une manière de m’y préparer et de me dire que c’est tellement énorme qu’on peut décider un peu ce que l’on veut. Il faut plonger !

Quel est votre propre rapport à la poésie ?
Mais c’est une question intime ça ! J’ai des poèmes que je connais par cœur et que je me dis à certains moments, comme en marchant dans la rue, par exemple… C’est souvent condensé. C’est à la fois un moment d’humanité, de musique, d’observation de l’extérieur et de l’intérieur, du cœur. Un écho humain, musical, scandé ou pas, qui nourrit, qui calme. La poésie pour moi, c’est une prière du beau, un débordement de l’âme. C’est juste le plaisir de retrouver l’agencement de ces mots, de la musique de cette pensée, qu’on laisse ressortir à la surface, juste pour le plaisir…

Vous êtes un homme de plaisir ?
Vous avez décidé de me résumer en somme ? Non, j’ai un grand sens du devoir. Et surtout, je réussis à allier les deux. On va dire que je ne suis pas maso…

Quels sont les poètes dont vous vous sentez proche ou qui vous sont familiers ?
Pouchkine, Apollinaire, Aragon… C’est Pouchkine qui me vient comme une évidence. Après j’aime bien des poèmes très musicaux, comme ceux de Heredia, ou L’Ode à Perrier de Malherbes, certains haïkus…

Quelle est votre principale qualité en tant qu’acteur et votre principal défaut ?
L’exigence pour les deux. L’exigence est à la fois une qualité et aussi un défaut. C’est une qualité parce que j’aime le travail bien fait, parce que je ne me satisfais pas facilement, je suis travailleur, et en même temps c’est un défaut parce que du coup, mon jeu manque peut-être parfois de naturel.

La réalisation de Guillaume et les garçons à table ! vous a-t-elle donné le goût de la réalisation cinématographique ?
Oui, vraiment. J’ai adoré la préparation et le tournage. J’ai trouvé la post production plus difficile, plus laborieuse, plus solitaire, avec une chef monteuse que j’adorais certes, mais j’ai trouvé ça plus dur. J’ai été assez sidéré de voir qu’autant de gens pouvaient se mettre au service d’une histoire. Et surtout chercher à comprendre ce qu’il y avait dans ma tête sans essayer de me coller leurs fantasmes ou leurs égos. C’était vraiment leur métier au service de ce qu’il y avait à la fois dans le scénario et même de ce qu’il y avait entre les lignes. J’ai d’autres films en vue, oui, mais il faut gérer le temps maintenant. Cumuler cinéma, théâtre et radio, c’est déjà beaucoup en tant qu’acteur…

Un mot sur les intermittents ?
Au Français on est solidaire du mouvement. Personnellement je n’ai jamais été intermittent, mais je suis amené à le devenir le jour où je ne serai plus au Français et je travaille avec des intermittents. Je ne connais pas le dossier comme un spécialiste mais de ce que je peux en savoir, il est symbolique de la précarité de l’emploi en général. Je ne pense pas que ce soit en rayant ou en diminuant l’aide sociale des intermittents que l’on règle le problème.

L’annulation éventuelle d’un festival comme celui d’Avignon n’est-elle pas un crève-cœur ?
Ce qui est crève-cœur c’est que 110 000 intermittents risquent de se retrouver à ne plus pouvoir vivre du tout. Un danseur, s’il n’est payé que quand il danse, il fait comment le reste du temps ? Pour travailler son corps, pour ses cours ? Un musicien, il fait comment ? Un violoniste doit pratiquer plusieurs heures par jour, même quand il ne donne pas de concert. L’intermittence c’est cela aussi. Les artistes ne sont pas là à glander ! Il faut en finir avec le schéma bourgeois du saltimbanque glandeur, il faut arrêter ce genre de cliché ! On travaille énormément ! Et c’est dur ! –Propos recueillis par Marie-Hélène Bonafé

84 | Avignon, Cour d’Honneur du Palais des Papes, La Chaste vie de Jean Genet

 

Repères
Guillaume Gallienne (42 ans) passe avec autant de talent de la scène de la Comédie Française - dont il est Sociétaire depuis neuf ans, aux studios du Grand Journal de Canal + et d’une émission de lecture sur France Inter aux albums de Juliette Gréco ou Alexandre Tharaud sur lesquels il lit des textes ou chante. Le plaisir et l’enthousiasme avec lequel il exerce son métier font plaisir à voir. Son goût de la polyvalence et de la transformation éclate avec le spectacle créé en 2008, Les garçons et Guillaume, à table ! pour lequel il reçoit les César du Meilleur film, Meilleur acteur, Meilleur premier film, Meilleure adaptation.

Lydie Dattas, poétesse (67 ans) est fille d’une mère tragédienne et d’un père musicien. Elle épouse en 1972 Alexandre Bouglione avec qui elle fonde le cirque Romanès. Les gitans deviennent alors sa famille d’adoption et source d’inspiration. Elle a une vingtaine d’années lorsque ses écrits sont remarqués par le poète Jean Grosjean, lecteur chez Gallimard. Elle se lie d’amitié pour Jean Genet et, en réponse à une phrase désobligeante de celui-ci, elle écrit La Nuit spirituelle : « Je ne veux plus la voir, elle me contredit tout le temps. D’ailleurs Lydie est une femme et je déteste les femmes », avait-il déclaré. Elle publie une biographie du poète en 2006 La Chaste vie de Jean Genet aux éditions Gallimard.

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